Algérie

Quand "el-houma" terrorise la ville



Quand
Le scénario est maintenant rodé : une clique de jeunes se regroupe, encercle sa cible, se fait bruyante et rogue pour l'effrayer, déborde sur la chaussée pour créer un début de désordre sur la voie publique (.)... Un quart d'heure plus tard, la police commence à arriver, véhicules de trois ou quatre agents... Ils avancent, arborant d'abord l'air offensif de ceux qui disposent de la prérogative de représenter la loi et des instruments de la violence légitime, puis plus conciliants avec les jeunes vigiles de la "houma" qui vocifèrent leurs droits à réduire l'offense à la foi et à défendre la "horma" du quartier.La scène, qui probablement se répète un peu partout, s'est, il y a quelques jours, passée ainsi au boulevard Mohammed-V à Alger, à l'occasion de la réouverture d'une boutique de vins et liqueurs après une période de fermeture administrative ; elle s'est rejouée, avant-hier, au boulevard Télemly, toujours dans la capitale, au moment où des amateurs de "cadenas de l'amour" étaient là pour procéder à leur acte fétiche.
Voyez-vous, on parle de boulevards, de boulevards structurants de la circulation et de la vie algéroise. Et ces espaces subissent l'ordre "houmiste" en guise d'ordre public. Il y a toujours là, un ou plusieurs "sages", barbus et en kamis, pour légitimer le bien-fondé rédempteur de l'agression et quelques jeunes fiers à bras qui exhibent tapageusement leur envie musclée d'en découdre.
Les agents du service d'ordre officiel semblent, quant à eux, être là pour éviter un niveau de débordements qui les contraindrait à assumer une intervention effective. Point pour dire la règle qui départagerait les antagonistes. À aucun moment, la loi et le règlement ne sont invoqués face au discours des gardiens des valeurs de quartier. Faute d'être armés d'arguments de droit ou peur de les confronter à la référence "morale" et religieuse des miliciens en herbe ' Au demeurant, il est rare que l'on remarque la présence d'un responsable ou d'un officier en pareilles circonstances. Ces incidents, cumulés, confinent à un mode de gestion de l'ordre public. L'Etat peut toujours proclamer qu'il n'y a de force que pour la loi, les faits sont là : n'importe quel jeunet peut à tout moment improviser sa milice pour réduire une situation qui, dans son quartier, ne convient pas à sa "morale".
Dans le cas des "cadenas" du Télemly, ce n'est pas l'autorité qui empêche "les poseurs de cadenas" de le faire, même si elle pourrait avoir des raisons de l'interdire ; elle préfère laisser des groupes agressifs supervisés par des meneurs islamistes s'en charger. Elle n'intervient que pour s'assurer que la menace et l'ardeur des "houmistes" aboutissent sans dégâts.
Etrangement, "el-houma", comme communauté, ne s'offusque que du commerce de l'alcool et des manifestations de l'amour. Un point de convergence stratégique entre le zèle dévot des autorités et la bigoterie liberticide des islamistes. Mais point d'initiative contre l'expansion de la consommation et du commerce des drogues, contre les vols à l'arraché ou pour l'amélioration de l'hygiène et de l'environnement du quartier. En faisant de la "houma" la cellule de défense de la vertu, et en cédant à ses vigiles le droit de faire peur, le pouvoir est en train de former le personnel d'une terreur de proximité.
M. H.
musthammouche@yahoo.fr
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