Algérie

Qu'est-ce qui fait courir Le Caire '



Les Egyptiens ont-ils compris enfin que la fin de la guerre en Libye passe d'abord par l'observation du principe d'équidistance entre les parties en conflit, ou leur changement de cap procède-t-il d'un calcul impliquant le rival turc, à l'influence grandissante à Tripoli 'Après avoir soutenu le controversé général Khalifa Haftar dans sa croisade contre le Gouvernement d'union nationale (GNA) de Tripoli et mené un processus de réconciliation avec les seules autorités de l'Est libyen, l'Egypte a rompu dimanche avec cette politique qui a alimenté le conflit en Libye.
La visite d'une délégation de hauts responsables du renseignement à Tripoli, la première depuis six ans, marque un nouveau départ dans les relations entre le GNA et Le Caire, qui compte d'ailleurs rouvrir sa représentation diplomatique à Tripoli. Ce revirement signifie-t-il pour autant un lâchage en règle de Khalifa Haftar ' Certainement pas, Abdel-Fattah al-Sissi n'ayant pas en tête l'arrêt de sa guerre contre la nébuleuse islamiste des Frères musulmans, classée en Egypte comme une "organisation terroriste".
Pourtant, l'Egypte, les Emirats arabes unis ou encore l'Arabie Saoudite ont toujours considéré le GNA comme un gouvernement à la solde des islamistes, appuyés par le Qatar et la Turquie. Mais qu'est-ce qui a changé depuis ' La défaite cinglante de Haftar dans sa bataille de conquête de Tripoli, après un an de combats meurtriers autour de la capitale avec les forces du GNA, en juin dernier, ainsi que la pression internationale pour la relance du processus de dialogue interlibyen ne sont pas les seuls à pouvoir justifier ce changement de cap dans la diplomatie égyptienne.
Pour rappel, après la défaite de Haftar en juin, grâce à l'appui déterminant apporté par Ankara, la guerre en Libye a failli tourner à un conflit régional durant l'été. Galvanisés par leurs victoires successives contre les troupes de l'Armée nationale libyenne (ANL), les soldats du GNA ont décidé d'aller à l'assaut de Syrte et d'al-Jofra, considérées comme des bastions de Khalifa Haftar.
En tant que pays voisin de la Libye, l'Egypte avait dès lors menacé d'intervenir militairement, estimant que sa sécurité était indirectement menacée. De toute évidence, ces menaces étaient plutôt adressées au soutien turc du GNA qu'au GNA lui-même qui était, début janvier 2020, sur le point de capituler, n'était l'alliance conclue entre son chef Fayez al-Serraj et le président turc, Recep Tayyip Erdogan. Il aurait ainsi fallu l'implication active de deux acteurs majeurs, la Russie et les Etats-Unis, pour mettre fin à une escalade diplomatique qui était sur le point de se transformer en une confrontation militaire.
Parallèlement, l'ONU était engagée dans une démarche constructive de réconciliation interlibyenne qui a abouti à la tenue du dialogue de Tunis en novembre dernier et d'où est sortie une feuille de route, que seule la fin des ingérences étrangères peut faire aboutir, outre la volonté des Libyens à mettre fin à leurs rivalités personnelles et tribales.
Dans ce jeu d'échec régional, les enjeux énergétiques en Méditerranée impliquant ces pays et des alliés européens du Caire pourraient être perçus comme des arguments fiables pour justifier un tel revirement. Mais ce n'est pas seulement une question de lutte pour le partage des ressources pétrolières et gazières dans un bassin méditerranéen miné par d'autres tensions politiques et sécuritaires, les enjeux géopolitiques étant aussi importants que les ressources souterraines.

Lyès Menacer


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