Algérie

QATAR Usine sidérurgique, Volkswagen et autres leurres (6e partie)



QATAR                                    Usine sidérurgique, Volkswagen et autres leurres (6e partie)
Par Ali El Hadj Tahar
Froissés par le soutien algérien à la Libye, le refus de soutenir les rebelles en Tunisie, en Egypte et surtout en Syrie, les Qataris boudent notre pays entre l'été 2011 et l'hiver 2012. En tout cas ils ne s'y manifestent plus.
Fidèle à sa politique de non-ingérence dans les affaires internes des Etats et des pays, l'Algérie s'est opposée à l'exclusion de la Syrie de l'Unesco et de la Ligue arabe. Ce refus de s'aligner sur Doha aurait suscité l'ire du Premier ministre et ministre des AE qatari qui, selon le journal saoudien Al Watan, aurait même menacé son homologue algérien que le tour de notre pays n'allait pas tarder. D'ailleurs, l'ingérence étrangère était le thème essentiel des discours du FLN et du RND lors de la campagne électorale pendant les dernières législatives algériennes. Ensuite survient, comme par hasard, le problème malien ! Une partie des stocks restant des armes allouées par l'OTAN au libyen Belhadj et ses terroristes déferlent vers l'Azawad. Le Mali est alors coupé en deux, sept diplomates algériens sont kidnappés, des ambulances qataries sont aperçues dans le désert — on sait que le sigle du Croissant- Rouge sur un véhicule qatari signifie qu'il s'agit de ses services de renseignements — et la menace qui pèse sur l'Algérie devient de plus en plus précise. D'une pierre, le Qatar fait plusieurs coups. Il abat Kadhafi, puis vise le Mali tout en ciblant l'Algérie et la Mauritanie, ses deux pires ennemis. L'Algérie, pour l'antécédent libyen, pour son refus à une opération armée contre la Syrie, son exclusion de la Ligue arabe et le maintien de l'ambassadeur syrien à Alger. Le grief contre la Mauritanie est plus personnel, car en janvier 2012, le président Mohamed Oueld Abd Al Aziz avait carrément humilié Hamad en lui disant de ne pas s'ingérer dans les affaires de son pays, contraignant l'émir indélicat à quitter le pays sans même être accompagné ne serait-ce que par un sous-secrétaire de la présidence du pays hôte. Pourtant, au lieu de sortir ses griffes, Alger a préféré offrir l'autre joue, en cherchant à amadouer un pays qui monte davantage sur ses ergots lorsqu'il remarque une faiblesse chez sa proie. Pour l'Algérie, les changements des pouvoirs politiques en Syrie ou ailleurs ne doivent pas être dictés de l'extérieur mais émaner du peuple en toute souveraineté. D'où son appel constant au dialogue et à la réconciliation nationale en Syrie, ce que les autorités syriennes demandent d'ailleurs depuis le début de la crise alors que les Etats-Unis et leurs alliés arabes, surtout qataris, veulent faire échouer en demandant à «l'opposition» composée majoritairement de djihadistes de ne pas déposer les armes et en leur en fournissant ! D'ailleurs, le Conseil national syrien est essentiellement composé d'islamistes et son premier président était Burhan Ghalioun, le conseiller politique d'Abassi Madani ! La nouvelle situation au Mali complique la donne maghrébine, surtout avec des terros rôdant dans le désert. Le 3 avril 2012, le général-major qatari, Hamad Bin Ali Attiya, débarque à Alger. L'Algérie n'est pas au bout de ses peines, car des 4x4 qataris frappés du Croissant- Rouge qatari ont été vus au Mali, révèlera plus tard le Canard Enchaînédu 6 juin 2012, précisant que Doha finançait les groupes armés qui ont pris le contrôle du nord du Mali, en se basant sur une information de la Direction du renseignement militaire (DRM) française indiquant que «les insurgés du MNLA (indépendantistes et laïcs), les mouvements Ansar Dine, Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique) et Mujao (djihad en Afrique de l'Ouest) ont reçu une aide en dollars du Qatar». Parmi les groupes ayant reçu l'aide qatarie figure donc le Mujao qui a kidnappé sept diplomates algériens le 5 avril dernier. Cette information conforte une autre, préalablement donnée par le même hebdomadaire dans son édition du 26 mars dernier où il est précisé que les responsables français, au premier rang desquels le ministre de la Défense, n'ignorent rien de l'affaire et que la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) aurait transmis, quant à elle, plusieurs notes à ce sujet à la présidence de la République française, apparemment donc bien avant la prise du nord du Mali. Cette information s'ajoute à celle donnée par l'ancien ambassadeur tunisien à l'Unesco, Mezri Haddad, qui a révélé au journal arabophone algérien El Khabar que le Qatar œuvrerait à la déstabilisation de l'Algérie. Mezri Haddad, auteur d'un livre intitulé La face cachée de la révolution tunisienne : islamisme et Occident, une alliance à haut risque ajoute qu'il détiendrait des informations selon lesquelles le Qatar «concentre ses efforts de déstabilisation actuellement sur l'Algérie», notamment pour sa position sur la question syrienne.
Complots et projets communs
En outre, selon le quotidien algérien, des partis islamistes algériens auraient perçu de l'argent du Qatar et de la Turquie, selon une source au Qatar. Ce genre d'informations atteste d'une velléité d'ingérence clairement affichée par le trublion. La déstabilisation comme action et les brochettes de mémorandums comme leurres… Selon Eric Denécé, docteur ès sciences politiques et directeur du Centre français de recherches sur le renseignement (CF2R), le Qatar tient à placer les salafistes extrémistes au pouvoir en Algérie et dans les autres pays arabes, tandis que l'Arabie Saoudite est déterminée à placer les wahhabites à la tête de ces Etats. «Ils veulent imposer à l'Algérie le sort réservé à la Libye, l'Egypte et la Tunisie. Pour eux, le pays est coupable de ne pas avoir accepté de sombrer dans le “printemps arabe” qui vise à remettre le pouvoir aux islamistes», a-t-il dit au quotidien algérien Le Temps d'Algériedu 13 juin 2012, ajoutant : «J'ai été frappé par des propos tenus par des diplomates du Golfe et des Etats-Unis. Ces diplomates que j'ai rencontrés m'ont exprimé leur déception du fait que l'Algérie n'ait pas chuté lors des élections législatives du 10 mai 2012 et au cours des émeutes du 5 janvier 2011. C'est très curieux et terrible. Ils sont déçus et ils me l'ont dit le plus normalement du monde. Tout ce monde veut faire parvenir coûte que coûte les islamistes au pouvoir dans les pays arabes. On constate ça dans la presse anglo-saxonne et wahhabite.» Puis revoilà les Qataris à Alger en juillet 2012. Apparemment, il y a urgence pour Doha : cette fois-ci, c'est le ministre de l'Economie et des Finances, Youcef Husseïn Kamel, qui nous vient avec une autre brochette de projets, inscrits dans un nouveau mémorandum d'accords comprenant la création d'une usine de sidérurgie à Bellara (Jijel) et celle d'une usine automobile de l'allemand Volkswagen ! Il a ajouté que l'Algérie et le Qatar projetaient de créer «un fonds mixte pour réaliser ensemble des investissements à l'étranger», oubliant de mentionner que ce «projet» était déjà inscrit dans le poussiéreux mémorandum de janvier 2010 ! Il a ajouté : «En raison de notre expérience en matière d'investissements à l'étranger, nos frères algériens ont exprimé l'envie de créer avec nous un fonds mixte pour réaliser ensemble des projets d'investissements en dehors du Qatar et de l'Algérie» !
Des mirages en gage d'amitié
S'agissant de l'usine sidérurgique, le ministre qatari a dit que «la société sera opérationnelle d'ici 24 mois ou au maximum 30 mois» tandis que notre ministre de l'Industrie, de la PME et de la Promotion de l'investissement, Mohamed Benmeradi, a indiqué que le «futur complexe» de Bellara permettra la création de quelque 2 000 emplois directs. D'abord pourquoi l'Algérie ne crée pas seule cette usine publique au lieu d'une mosquée publique ' Ensuite pourquoi le projet similaire d'un opérateur algérien est-il bloqué alors que l'Algérie importe annuellement pour près de 10 milliards de dollars de produits sidérurgiques, soit près de 20% de sa facture d'importation globale ' L'Algérie a vendu El Hadjar à ArcelorMittal, et aujourd'hui, elle cherche un associé dans un secteur où elle est pionnière et où elle se devrait d'imposer sa politique, notamment en matière de recrutement des cadres nationaux ! Sinon à quoi cela sert-il de créer des usines en Algérie ' On a créé une autoroute est-ouest pour 11 milliards de dollars et on ne s'est pas soucié d'y employer une main d'œuvre algérienne conséquente, ni même d'imposer nos ingénieurs pour capter la technologie chinoise ou japonaise. On construit un million de logements répartis entre sociétés chinoises et turques auxquelles on n'a même pas imposé de prendre un seul cadre algérien pour lui permettre d'acquérir le savoir-faire ! Pour cette «prouesse», Ghoul est récompensé par une dizaine de postes de députés et l'autorisation de créer son parti politique !! Entre l'Algérie et le Qatar, la coopération et les investissements se résument en vérité à l'acquisition, en 2007, par Qatar Telecom de 80% de Wataniya Telecom Algérie, devenu Nedjma. Les échanges commerciaux avec ce pays sont quasiment nuls, car le Qatar compte parmi onze autres pays arabes qui ne détiennent que 6,1% des échanges algéro-arabes. Mais les mémorandums qataris sont devenus une sempiternelle promesse pour les peuples d'Afrique et d'ailleurs. Connaissant l'incapacité du gouvernement algérien, notamment en matière d'emploi en faisant miroiter la promesse d'une usine Renault, les Qataris lui offrent un nouveau mirage, à condition qu'il adhère au point de vue contre la Syrie et probablement d'autres coups fourrés de ce genre. Chaque fois que Qatar a besoin d'un pays, il lui concocte une brochette de projets mirobolants. Et voilà que l'Algérie se met à vendre ses principes pour du vent, en votant pour l'exclusion de la Syrie de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), une décision, nous rassure notre ministre des Affaires étrangères, qui n'a pas de conséquences contre le peuple syrien ! Interdire à des milliers de Syriens de faire leur hadj 2012 à La Mecque, ce n'est pas grave ! La fermeture du signal de trois chaînes syriennes sur Nilesat et Arabsat décidée récemment par la Ligue arabe n'est également pas grave, ni l'embargo qui frappe le peuple syrien ! L'Algérie a voté pour exclure, ou plutôt excommunier 22 millions de Syriens de l'Organisation musulmane. Demain fermera-t-on les yeux sur les terroristes qui seraient tentés de rejoindre les mercenaires en Syrie, comme le font la Libye, la Jordanie, la France, la Hollande ou la Grande- Bretagne qui, à elle seule, compte plus de 100 citoyens britanniques dans les rangs des islamistes qui se battent en Syrie ' L'Algérie a-t-elle adhéré à la diplomatie takfiriste excommunicatrice de Qatar et de l'Arabie Saoudite ' Alger a-t-elle été mise au pas ' Ce qui est sûr c'est que les autorités syriennes n'ont jamais soutenu les hordes islamistes du GIA ou de l'AIS lorsqu'ils massacraient et détruisaient dans notre pays. Au sein de la Ligue arabe qu'il préside comme s'il s'agissait de son royaume, le Qatar ne tolère que l'attitude de la serpillère. Dans le mémorandum d'entente de juillet, «le Qatar prévoit de réaliser plusieurs projets en Algérie notamment dans la construction automobile», selon le ministre qatari qui a précisé que son pays est en train d'encourager le constructeur allemand Volkswagen à s'installer à Alger. Pendant qu'ils bloquaient l'octroi de visas pour les Algériens résidents au Qatar, les Qataris se battaient donc pour une usine Volkswagen dans notre pays ! Le Qatar qui ne détient que 17% du capital de l'entreprise allemande peut-il la convaincre d'investir dans notre pays ' Que ne le fait-il pour l'un des pays qui viennent d'être intégrés au Conseil de Coopération des Etats arabes du Golfe (Maroc, Jordanie) ou encore pour ceux dont il a fomenté les «révolutions» '
A. E. T.


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