Algérie

Qaryat Djemaâ, le village indigent



Qaryat Djemaâ, le village indigent
Situé à peine à 500 m de la nouvelle ville Hamla, ce lieu classée officiellement comme cité illicite, est voué à la démolition.Sur la route qui mène de la nouvelle ville Hamla au village Condorcet, situé à la sortie sud de la ville de Batna, pousse un nouveau quartier : Qariat Djemâa (hameau de Djemaâ, Ndlr). Une appellation qui lui vient du nom du premier occupant, une femme nommée Djemaâ. Le semblant de village est érigé au beau milieu d'une clairière verdoyante et a pour arrière-plan, les foisonnants immeubles de la nouvelle ville, et pour quotidien une misère extrême. Plus d'une vingtaine de familles y vivent sans la moindre commodité, dans des habitations, plus proches d'abris que de maisons décentes. Des murs en parpaing, des toits en plaques de ternit à base d'amiante, et des séparations en bric-à-brac.Ainsi, toutes les saisons sont source de galère pour les habitants. Lorsqu'il pleut, l'eau inonde les maisons. Le froid s'y engouffre aisément en hiver et les chaleurs sont étouffantes en été. Autant dire qu'il s'agit d'un extérieur cloisonné. L'eau est ramenée par des camions-citernes et stockée dans des jerricanes et des citernes, pour ceux qui en possèdent. L'électricité est produite à l'aide de groupes électrogènes, souvent défectueux, causant ainsi des pannes et parfois des problèmes de santé, lorsqu'ils sont installés à l'intérieur de la demeure. On se réchauffe à l'ancienne, avec du bois dans «des cheminés» de fortune. Des latrines non conventionnelles sont creusées à l'intérieur des maisons, ce qui pose un problème récurrent d'hygiène et constitue une menace permanente pour la santé des occupants.Djemaâ, la pionnière du village, s'est installée toute seule en 2000, sur ce qui n'étaient encore que des terres agricoles. Elle était là, bien avant que la nouvelle ville ne soit construite. Elle vit de sa retraite de femme de ménage, presque heureuse de vivre, et comme ses aïeux, elle accepte sa condition. Elle s'est résignée. N'ayant pas encore atteint la soixantaine, Djemaâ est encore en bonne santé ; elle est joviale et surtout digne. Elle raconte qu'elle a préféré vivre ainsi plutôt que d'être un boulet pour ses enfants, tous mariés. El Hadj, un autre résident, a construit, lui, sa maison il y a plus de 8 ans. Rencontré sur les lieux de son interminable chantier, il nous décrit sa vie de misère, disant : «Actuellement je vis avec ma femme et mes trois enfants dans un garage au quartier Kechida, sans porte, sans fenêtres, ni même l'électricité. Le comble c'est que je le loue à 8000 DA le mois.» Tout compte fait, il préfère ce chez-soi au milieu de nulle part, à l'autre abri, misérable et précaire.-8 000 DA le m2Sur plusieurs façades de ces taudis, des inscriptions en peinture mentionnant des numéros de téléphone. Des coordonnées destinées aux éventuels acquéreurs de terrain en ces lieux, et l'indigence qui va avec. Pas moins de 8000 DA le m2, sans acte de propriété. Ici on achète sous seing privé (orfi). «Ma parcelle m'a coûté 22 millions de centimes, il y a 14 ans», nous a confié Djemaâ. Devant tout ce malheur, les responsables n'ont pas daigné bouger le petit doigt, et ce, malgré de nombreuses promesses. Selon les habitants du village, les forces de police ne se déplacent que pour les menacer et prendre leurs papiers d'identité.Le président de l'APC de Batna, Abdelkrim Maroc, leur a rendu visite il y a une année, et toujours selon eux, il leur a promis l'électricité avant le mois de Ramadan d'alors. «On est allés le voir après sa visite, il a réitéré sa promesse, mais une année après rien n'a été fait», nous déclare une femme au foyer rencontrée au gré de notre ballade à l'intérieur du village, avant de poursuivre: «Le devis pour l'installation de l'électricité s'élève à plus de 150 millions de centimes. D'où nous viendrait tout cet argent si l'Etat ne s'occupe pas de nous '» Le maire, pour sa part, confirme avoir fait cette promesse.Néanmoins, il affirme avoir été dissuadé par ses conseillers qui lui ont expliqué que si l'électricité était installée, un nouveau village de constructions illicites verrait le jour et serait un nouveau pôle d'attraction. «Ce sont des constructions illicites. Il est plus que probable qu'on va les démolir», a-t-il affirmé. Le choix de la facilité a donc été privilégié, et ces citoyens laissés à la rue, puisque Abdelkrim Maroc a aussi déclaré que les reloger était du ressort de la wilaya et non de l'APC.




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