Le Parlement catalan n'a pas voté la déclaration d'indépendance que seuls les élus indépendantistes ont signée, mardi, à l'issu d'un débat qui risque de laisser des traces.La République indépendante de Catalogne aura duré vingt secondes. Celles qui ont séparé l'annonce du président régional, Carles Puigdemont, selon laquelle il «assume le mandat pour que le peuple de Catalogne devienne un Etat indépendant sous forme de République» et sa proposition de «suspendre les effets de la déclaration d'indépendance pour que durant les prochaines semaines, nous entreprenions un dialogue [avec Madrid].»
En Espagne, l'incrédulité et l'incompréhension ont accueilli cette déclaration d'indépendance avortée, et la suspension d'une République catalane non proclamée formellement, qui laisse planer la menace d'une sécession imminente tout en laissant une place au dialogue avec Madrid. Sous pression des milieux économiques et des nationalistes modérés de sa formation, le Parti démocratique de Catalogne (PdeCAT) d'un côté, et des séparatistes révolutionnaires de la Candidature d'union populaire (CUP) et des puissantes associations indépendantistes de l'autre, M. Puigdemont a joué sa dernière cartouche : l'ambiguïté. Avec deux objectifs : interpeller la communauté internationale pour qu'elle force Mariano Rajoy à négocier, et nourrir «le processus» indépendantiste pour le maintenir en vie.
La mine contrite
«Nous pensons fermement que le moment exige non seulement une désescalade de la tension mais surtout la volonté claire et l'engagement d'avancer dans les demandes du peuple de Catalogne à partir du résultat du 1er octobre [la victoire du oui au vote sur l'indépendance]», a déclaré M. Puigdemont, ouvrant une nouvelle fois la porte au dialogue tout en réaffirmant son intention d'aboutir à l'indépendance. Ce sont les divergences entre la CUP et le groupe indépendantiste Junts pel Si (Ensemble pour le oui), une coalition qui regroupe les nationalistes du PdeCAT et la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), qui ont compliqué, et retardé le discours de M. Puigdemont.
Selon les députés anticapitalistes, la «déclaration d'indépendance» ne leur a été présentée qu'une heure avant le début de la session parlementaire et ne correspond pas à l'accord négocié ces derniers jours. En colère, avec le sentiment d'avoir été trahis, ils sont entrés les derniers dans la salle du Parlement régional sans saluer le président, Carles Puigdemont.
Ce dernier ne s'est d'ailleurs pas tant adressé aux députés présents dans la salle qu'aux médias internationaux et aux télévisions étrangères qui retransmettaient en direct ce qu'il a défini comme «un moment historique». «La Catalogne est une affaire européenne», a-t-il martelé dès le début de son discours, avant de lister ses griefs envers Madrid. M. Puigdemont demande alors à l'Union européenne qu'elle «s'implique à fond et veille à ses valeurs fondatrices.»
Après plus d'une demi-heure d'exposé des motifs est venue la «déclaration d'indépendance», non solennelle et non soumise au vote du Parlement. «La Catalogne a gagné le droit d'être un Etat indépendant et d'être respectée», a-t-il insisté. Les députés indépendantistes ont alors applaudi avec force la naissance de la République catalane, avant de reprendre, lorsque M. Puigdemont a aussitôt annoncé la suspension de l'indépendance, la mine contrite qu'ils arboraient en ce «jour historique».
Ses explications n'ont pas levé les contradictions d'un discours qui cherchait à satisfaire tout le monde mais n'a convaincu personne. Ni la CUP qui a menacé de boycotter le Parlement, au risque de provoquer des élections anticipées. Ni le gouvernement espagnol qui a immédiatement annoncé la tenue d'un conseil des ministres extraordinaire à 9 heures, mercredi 11 octobre, pour aborder la réponse à donner à la crise institutionnelle qui dure depuis des mois. Aucune option n'était écartée avant la réunion, y compris l'activation de l'article 155, afin de suspendre l'autonomie de la région. «M. Puigdemont a plongé sa région autonome dans la plus grande incertitude.
Ce discours est celui d'une personne qui ne sait pas où elle va, a déclaré la vice-présidente du gouvernement, Soraya Saenz de Santamaria. Et de conclure qu'il «ne peut pas imposer une médiation». Pour Madrid, pas question d'accepter de parler «d'égal à égal» avec la Généralité ; ce qui serait une reconnaissance implicite de la souveraineté de la Catalogne. Le bras de fer va donc continuer. «Si le gouvernement applique l'article 155 [suspension de l'autonomie], il est clair qu'il ne veut pas dialoguer. Et donc nous serons conséquents avec notre engagement. Nous proclamerons la République», a prévenu le porte-parole du gouvernement catalan, Jordi Turull, mercredi matin.
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Posté Le : 12/10/2017
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : R I
Source : www.lnr-dz.com