L'annonce il y a
un mois de chiffres indiquant la baisse du marché publicitaire algérien en 2010 a fait réagir les
professionnels. L'un d'entre eux, Mourad Ait Aoudia, directeur
de FP7 Mc Caan revient sur
les causes d'un marasme qui ne fait qu'accroître le gap des métiers de la
communication algériens vis-à-vis des voisins maghrébins. Le monopole de
l'audiovisuel n'est pas seul en cause.
« La coupe du
monde de football a évité un effondrement du marché publicitaire algérien en 2010»
prévient d'entrée Mourad Aït Aoudia,
l'un des professionnels algériens les plus en vus dans la publicité, lauréat en
février dernier à Beyrouth de la
Lawhat d'or pour le meilleur film
publicitaire dans la catégorie TIC. «En réalité la baisse exprimée en valeur ne
relate pas la réalité de la chute. Les supports, la télévision en particulier, a
augmenté ses prix de manière constante sur la période alors même que son
audience baissait. Si on devait évaluer le marché par le nombre de production, la
baisse est encore plus spectaculaire. Voyez par exemple depuis combien de temps
Mobilis n'a pas fait un film !». L'écart entre le
marché algérien et le marché marocain de la publicité est de 1 à 4 en valeur, mais
plus important en nombre de produits et de campagnes réalisées. L'interdiction
de Djezzy à la télévision algérienne, un déni du
droit des affaires, est l'autre cause de la baisse du marché publicitaire, évaluée
à 10% en 2010. «D'une manière générale Djezzy a été
contraint de réduire son budget d'annonce et cela pèse sur le marché car la
concurrence n'a plus besoin de s'étalonner sur lui dans les campagnes. Si Djezzy ne communique pas, les autres aussi». La seconde
source qui alimente les annonces publicitaires, le marché automobile n'a pas
augmenté ses budgets sur la période. La faute sans doute à la suppression du
crédit à la consommation qui a tassé ses ventes en 2009 et au premier semestre 2010.
Où se trouve donc l'espoir d'un rebond côté annonceur ? «Regardez la publicité
à la télévision en Europe. Un annonceur sur trois est une banque, une assurance,
un vendeur de service. En Algérie, ces acteurs sont absents à la télévision. C'est
là que se trouve le gisement de développement des recettes». Il y a aussi les
entreprises publiques. Pour Mourad Aït Aoudia, elles subissent une distorsion de concurrence par
le fait de ne pas pouvoir choisir librement les supports efficaces et dépenser
comme les concurrents privés pour défendre leurs parts de marché. La
communication institutionnelle devrait également enfin prendre son essor, tant
elle demeure encore atone.
Nessma TV et les libanaises
en profitent
La crise du
support image reste toutefois le plus gros frein à la reprise d'un marché qui
s'est ressenti en 2010, des premiers effets de l'arrêt des investissements
directs étrangers et de l'incertitude sur le climat des affaires. «L'audience
de la télévision algérienne baisse d'année en année. Aujourd'hui, en dehors du
mois de ramadan, elle n'est plus un média porteur pour de très nombreux
annonceurs. Nessma TV et les chaînes libanaises en
profitent. Mais avec les tarifs proposés pour la prochaine grille du ramadan je
suis curieux de voir combien d'annonceurs vont tout de même y aller».
C'est la logique Felix
Potin… plus cet ancien distributeur de proximité en France approchait de la
banqueroute et plus il augmentait les tarifs sur ces rayons. La presse papier
n'a pas pu réellement profiter du désamour forcé des annonceurs pour la
télévision nationale qui garde tout de même 46% des recettes de la pub en 2010.
«Il existe trop de titres. Un certain dynamisme des débuts s'est un peu perdu. Trop
de journaux généralistes. Pas assez de perspicacité. La presse papier a besoin
de se renouveler pour augmenter ses recettes de publicité». Une dernière panne
contribue au gros trou d'air du marché publicitaire algérien selon Mourad Aït Aoudia ; la créativité des
publicistes est bridée : «Notre champ d'expression est complètement réduit. Il
faut faire gaffe même dans l'humour. Nous travaillons sur le plus petit
dénominateur commun. Dans les débriefings avec les clients la formule standard
est «vous ne pensez pas que cela va choquer». L'idée la mieux partagée chez les
grands annonceurs est que les Algériens ne comprennent pas. Il faut faire le
plus terre à terre avec eux déplore Mourad Aït Aoudia qui note comme «pas du tout anodin», que seules deux
ou trois agences de publicités algériennes arrivent à coexister avec des
acteurs étrangers qui dominent le marché. «Le rôle de la publicité est aussi de
faire évoluer les sociétés». C'est une étude présentée par Mohamed Haoues, directeur du Marketing à Média Algéria,
lors de la 5e journée euro-maghrebine sur la
publicité le 09 mai dernier, qui avait révélé la baisse en 2010 de la valeur
monétaire du marché algérien de la publicité de 142 millions d'euros à 128
millions d'euros.
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Posté Le : 07/06/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : El Kadi Ihsane
Source : www.lequotidien-oran.com