Algérie

Protesta, le retour



Les échos en provenance de l'intérieur du pays ont fait état, la semaine dernière, de la remontée au créneau de ces grappes de citoyens hargneux qui, pour extérioriser leur colère et interpeller les évanescents pouvoirs publics, ferment des routes, enflamment des pneus ou scellent d'autorité les portes de l'administration locale. On semble brutalement revenir au réel, après la longue parenthèse du Mondial sud-africain, et le découvrir plus rêche encore en cette période de grande chaleur et de torpeur généralisée. Les plus réservés comprendront, désormais, pourquoi finalement il y a tant et plus à gagner, quand on est au pouvoir, à investir sans compter dans l'entretien d'une diversion aussi providentielle finalement que les aventures trépidantes des Fennecs, du pays des Pharaons jusqu'au pays du vuvuzela.Les coupures d'électricité et le manque d'eau dans les robinets, tourments récurrents et spécifiques à la saison s'il en est, sont ceux qui poussent le plus les gens, en ce moment, à sortir de leurs gonds et à provoquer le désordre sur la voie publique pour amener présidents d'APC, chefs de daïra et walis à prendre au sérieux leurs déboires. Un classique, désormais, dont tout le monde semble s'accommoder même si, souvent, la confrontation débouche sur de lamentables joutes avec les services de sécurité, avec leurs lots de blessés, d'arrestations et de perturbations de la vie publique.Ces coups de sang sporadiques de populations soumises à des privations lancinantes restent pour l'heure trop dispersés pour véritablement inquiéter en haut lieu, l'essentiel étant, dans la logique des tenants du pouvoir, que ces courroux collectifs ne soient pas mis en lien par un quelconque mot d'ordre politique. Sur ce plan, les politiques analyseront que tant que l'énergie du ressentiment se dépense à la marge, elle ne risque pas d'incuber en rejet généralisé et puissant de la politique, aussi fanfaronne que chaotique, érigée depuis longtemps en mode de gouvernance dans le pays.Dans le contexte remonte une nouvelle fois, à la surface, la question de la médiation politique et sociale. Tous les protestataires vous le diront : rien ne sert de réclamer audience à un maire ou même à un chef de daïra. Le pouvoir restant l'apanage des sphères au dessus, il vaut mieux avoir à faire à Dieu qu'à ses saints. Disqualifiée et privée de tous les leviers de décision par le pouvoir, dépréciée par une pratique partisane calamiteuse qui n'envie rien au folklore tribal, la fonction de l'élu a fini par se limiter à une sorte de bénévolat rémunéré qui dispense finalement des engagements et des bilans politiques.Le pays, dévitalisé politiquement, peut continuer donc à s'offrir, sans trop d'émotion et de vagues, l'affligeant spectacle de ces émeutes à répétition, tolérées tout compte fait comme autant de soupapes de sécurité en attendant une nouvelle aventure des Fennecs.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)