Algérie

Protéger les chrétiens d'Occident contre la bêtise



Protéger les minorités pour faire plaisir à l'Occident ou protéger tous les citoyens pour bâtir la citoyenneté ?

On y est ! Les coptes ne sont plus en sécurité nulle part dans le monde. Après l'attentat d'Alexandrie, c'est désormais en Europe que les églises coptes ont été mises sous surveillance.

 Eric Besson et Brice Hortefeux peuvent jubiler. Ils ont de quoi alimenter la chronique sécuritaire pour quelques semaines, voire quelques mois. L'extrême droite a, quant à elle, de quoi nourrir leurs phobies pour plusieurs années.

 Mais l'attentat d'Alexandrie, qui a fait 21 morts dans la nuit de la Saint Sylvestre, a créé un immense malaise. L'écho qu'il a provoqué dans le monde entier a aggravé cette situation, et la condamnation unanime qu'il a suscitée n'a guère contribué à dissiper ce sentiment de descente aux enfers. Bien au contraire, l'ampleur de l'évènement a renforcé ce sentiment que quelque chose est en train de se briser en Egypte et, bien au-delà, dans tout le monde musulman dont la relation avec le monde extérieur devient chaotique.

 Ceci dépasse largement la seule Egypte, même si la fragilité de ce pays, le plus peuplé du monde arabe, est devenue inquiétante. Nombre d'analystes ont d'ailleurs évoqué un régime dépassé, dans un pays qui donne l'impression d'être condamné à vivre dans la pauvreté et à subir éternellement la crise, sous l'étroit contrôle des Etats-Unis et d'Israël. L'inquiétude est cependant plus étendue et plus profonde. Elle englobe cette vague d'intolérance qui, comme une fatalité, semble s'être définitivement implantée dans le monde musulman. Elle en est même devenue la marque, une sorte de label. Avec un résultat qui fait peur : la quasi-totalité des zones de violence dans le monde se situe désormais dans le monde musulman. Il ne s'agit pas d'auto flagellation ni de racisme à l'envers. C'est une réalité qu'il faudra regarder en face, pour tenter de la comprendre, de l'expliquer et trouver les remèdes.

Les explications sont nombreuses. Certaines, primaires, sont facilement brandies dans les pays occidentaux. Elles renvoient à diverses lectures qui convergent vers un point : islamophobie et ignorance. D'autres, plus élaborées, mettent en avant divers facteurs connus, comme l'absence de démocratie, la corruption, la non sécularisation de la vie politique, la pauvreté et l'analphabétisme, ainsi que l'échec des politiques de développement. Cet héritage historique donne un cocktail suffisant pour provoquer le chaos.

 Mais d'autres explications renvoient vers des directions inattendues. Particulièrement quand domine ce sentiment confus que l'attentat d'Alexandrie était souhaité, presque voulu. Pourquoi, au fait, a-t-on cette impression que certains sont soulagés qu'il ait finalement eu lieu ?

 Depuis plusieurs semaines, des écrits et des déclarations répétées affirmaient que les chrétiens d'Orient étaient menacés. Cela avait commencé par l'attentat dans une église de Baghdad, qui avait fait 42 victimes le 3 octobre. Un déchaînement de haine s'était déclenché aussitôt après le drame. L'Occident découvrait, lors que des chrétiens vivaient en Irak, qu'ils étaient menacés et qu'il fallait les sauver. Le Pape et Eric Besson avaient joint leurs efforts à cet effet.

 Le premier a appelé à sauver les chrétiens « persécutés » en Irak et dans tout le Moyen-Orient, pendant que le second organisait l'accueil de chrétiens d'Irak. Message implicite : la menace de l'Islam est arrivée en France. C'est la preuve que le débat sur l'identité nationale était fondé. Et tout lien avec des élections futures ne serait que simple coïncidence. Curieusement, M. Eric besson n'a pas évoqué les chrétiens de Palestine. Mais l'agitation ainsi créée autour des chrétiens d'Orient a eu un triple effet. D'une part, des terroristes engagés dans une guerre d'un autre temps découvraient que leur voisin était un ennemi, et qu'il n'était pas nécessaire d'aller attaquer Paris ou New York. Il suffisait de faire exploser l'église d'en face. D'autre part, cette agitation occultait les dizaines de milliers de victimes appartenant à d'autres sphères religieuses, principalement musulmanes. Faut-il rappeler que le rapport des victimes est peut-être de un pour dix, voire un pour cent ?

Enfin, cette agitation déplaçait le conflit pour le mettre sur un terrain religieux, ce qui constitue une victoire pour ceux qui organisent ou exécutent les attentats. C'est aussi une défaite pour ceux qui, dans les pays musulmans, tentent de parler de politique, de démocratie, de développement, de citoyenneté et de Droits de l'Homme. Ainsi, ceux qui parlent de citoyenneté dans les pays musulmans sont étouffés par la formidable propagande de ceux qui, dans les pays occidentaux, les réduisent à une identité communautaire. Et ceux qui parlent des droits pour tous les citoyens sont étouffés par ceux qui pleurent les droits des minorités. Comment dire que le copte et le musulman sont tous deux privés de leurs droits en Egypte, quand le pape lui-même répète à longueur d'année que le chrétien est un religieux qui doit être défendu dans sa communauté ? S'il y a des hommes persécutés à protéger en Orient, ce sont tous les citoyens privés de leurs droits. Et s'il y a des chrétiens qu'il faut protéger, ce ne sont visiblement pas les chrétiens d'Orient, mais ceux d'Occident, avachis par la propagande et la bêtise.








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