Algérie

Promotion des arts plastiques, un champ en jachère Les artistes végètent et vivotent en attendant d'improbables jours meilleurs



Promotion des arts plastiques, un champ en jachère Les artistes végètent et vivotent en attendant d'improbables jours meilleurs
Photo : Riad
Par Kamel Amghar
On a généralement une fâcheuse tendance à assimiler les arts plastiques à un vulgaire besoin d'ornement. Bien au-delà de l'esthétique véhiculée, on oublie souvent que le dessin, la peinture, la sculpture, le design, la caricature et le patchwork sont aussi des moyens d'expression et de formulation des idées nouvelles. On s'en inspire dans tous les domaines de la vie. Les artistes ne cessent de mettre le doigt sur cette vérité fondamentale. «L'art plastique est antérieur à la parole. Il incarne une sorte d'anthropologie du silence, et cette sérénité qui tamise notre existence nous la craignons plus qu'on ne l'admire. Cela renvoi à l''uvre plastique qui nous impose silence et retour sur soi pour appréhender ce qu'elle véhicule», explique le plasticien Smail Ouchène, enseignant à l'Ecole régionale des Beaux-arts d'Azazga.
Diplômé de l'Ecole supérieure des Beaux-arts d'Alger, le plasticien insiste encore pour mettre en évidence toute l'importance de l'art dans la vie des nations. «Traduire une 'uvre en paroles est une absurdité. On ne pourra jamais retrouver la poétique initiale d'un texte dans une traduction à une autre langue. Le monde des arts plastiques est un monde du regard qui débusque les infimes détails de la vie. Cela nous apprend à voir vrai ce que nous vivons au quotidien et aussi ce qui transcende le banal», dira-t-il.
Le métier d'artiste est une profession de foi où il y a davantage de spiritualité que de matière proprement dite. Son 'uvre, qui ressemble davantage à celle d'un mystique ou d'un prophète, échappe en réalité aux quantifications et aux et évaluations ordinaires. «La plastique ne s'insère que dans le système des valeurs immatérielles. Même le mot ''valeur'' parait trop sec pour designer la noblesse de l'art, car il désigne généralement un échange à caractère commercial. Il faut trouver un autre concept, le plus adéquat pour exprimer l'immatérialité de l'art. Entre la malléabilité du monde et la main intelligente de l'homme se développe une relation mystérieuse qui aiguise ses fantasmes de puissance. C'est un intervalle, même s'il parait restreint, il n'en demeure pas moins qu'il est le lieu de profondeurs astronomiques. Ce sont les abysses qui permettent à l'art de ramener à la surface la chose artistique», explique encore Smaïl, qui compte aussi parmi les fondateurs et les animateurs de l'Association des artistes plasticiens de la wilaya de Béjaïa (AAP).
Ce collectif s'emploie depuis 2007, et souvent avec les moyens du bord, à la vulgarisation et à la promotion des arts. Rencontres de plasticiens, ateliers de création et expositions, les actions intermittentes de l'AAP ressemblent à une goutte d'eau dans un vaste désert. Faute de soutien conséquent des autorités de tutelle, la démarche tarde à se transformer en dynamique collective qui redonnerait à l'art son sens profond et son importance.
L'absence de galeries, le manque d'espaces d'exposition, l'inexistence de revues spécialisées et d'espaces de débats sont autant de carences qui privent nos artistes des moyens indispensables pour la promotion de leurs activités. L'indifférence de l'école à la chose artistique et le peu d'intérêt des médias nationaux constituent des inerties supplémentaires. Même sur le plan strictement individuel, l'artiste survit difficilement faute d'un marché de l'art qui lui permettrait de s'émanciper et de perfectionner davantage ses recherches. Les acteurs économiques et institutionnels devraient, en principe, s'y intéresser pour en poser les premiers jalons.
En attendant, nos artistes préfèrent se tourner vers l'étranger afin se faire une place au soleil, même si la tâche n'est pas aisée pour bien «percer» à ce niveau.


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