Algérie

Promesses, Promesses



La rédaction du communiqué final est l'un des rituels les plus complexes des sommets du G8. Le conseil d'administration du monde indique par ce moyen sa vision de l'ordre des choses et annonce la hiérarchie de ses actions prioritaires.

L'usage veut que cette puissante assemblée fasse inscrire parmi ses préoccupations et ses engagements le sort des déshérités du monde et en particulier ceux du continent africain. Ainsi, la réunion de Toyako n'a pas manqué de sacrifier à cette tradition en promettant, sous la pression des ONG et de représentants africains invités pour asseoir un décor « démocratique », d'engager plusieurs dizaines de milliards de dollars pour lutter contre la pauvreté et les maladies endémiques. Les Etats les plus riches, dont la majorité a construit sa puissance par le pillage colonial et la traite négrière, promettent un effort renouvelé avant 2010. Les observateurs n'ont pas manqué de rappeler que moins d'un quart des 25 milliards de dollars annuels supplémentaires promis par le G8 en 2005 avait effectivement été débloqué.

Pour justifier cet état de fait, les riches ont mis en avant les détournements et la corruption qui caractérisent, hélas, la gestion de nombre d'Etats récipiendaires de l'aide. L'argument est d'autant plus inacceptable que la fortune mal acquise des dirigeants malhonnêtes est à l'abri dans les banques occidentales et dans les paradis fiscaux protégés par les pays du G8. Selon des spécialistes bancaires, les capitaux illicitement amassés par les nomenklaturas africaines se compteraient à plus de deux cents milliards de dollars en Suisse, au Liechtenstein et au Luxembourg. Plus gravement, l'argument de la corruption tient encore moins quand il existe déjà des mécanismes d'allocation financière rigoureux et contrôlés qui permettent d'éviter l'intermédiation d'administrations locales peu fiables.

Peu d'ONG estiment que les objectifs d'augmentation de l'aide publiquement annoncés seront effectivement tenus. En revanche, il est fort à parier que la décision d'imposer l'augmentation de la production aux membres de l'OPEP sera bel et bien appliquée. Si tous se félicitent que le G8 ait enfin admis qu'il pouvait y avoir une politique coordonnée de réduction des émissions de gaz à effet de serre, l'on observe que les riches n'ont pas même considéré qu'il faille accorder une attention particulière à la crise alimentaire qui frappe plus de deux milliards d'êtres humains. L'indifférence manifeste que les dirigeants des pays les plus riches opposent aux cris de désespoir du tiers de l'humanité est révélatrice d'une conception tragique du monde.

Le G8 apparaît pour ce qu'il est: une instance de régulation des puissances dominantes. Ses membres sont bien obligés de donner l'apparence d'un minimum de conscience des problèmes les plus aigus du moment mais ils ne cachent pas que seuls les aspects qui concernent directement leur mode de vie sont réellement pris en charge. Pour les autres questions, fussent-elles de vie ou de mort, il n'est que des graves déclarations solennelles sans substance et des engagements difficilement concédés et faiblement tenus.

La désillusion est telle que l'opinion les enregistre sans y accorder un grand crédit. Après tout, il est vrai que les promesses n'engagent que ceux qui y croient.




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