Algérie

Projet de loi portant profession d'avocat Les non-dits d'un texte



Projet de loi portant profession d'avocat Les non-dits d'un texte
"Nous avons contesté le texte et même occupé la rue. De crainte que les choses ne s'embrasent, le gouvernement a accepté de revoir le texte. Au final, il a conclu un marché avec les avocats pour acheter la paix sociale. Ce n'est pas normal", a accusé Me Chaoui lors d'une des rencontres du bâtonnat d'Alger.Les avocats n'ont pas cessé de le dire avant d'observer un silence troublant. Le projet de loi portant organisation de la profession d'avocat, en débat général depuis hier au Conseil de la nation, comporte plusieurs dispositions qui portent atteinte aux droits de la défense et limitent la liberté d'action des robes noires. Mais pas seulement, à bien lire la mouture en voie d'adoption par le Parlement. L'article 13 stipule, en effet, que "sauf dispositions législatives contraires, il est interdit à l'avocat de communiquer à des tiers tout renseignement ou document relatif à une affaire dont il a la charge et de se livrer à toute polémique concernant ladite affaire. En tout état de cause, il est tenu de garder les secrets de son client et le secret professionnel".
Dans ce sillage, l'article 14 fait obligation à l'avocat de préserver le secret de l'instruction et l'article 15 lui interdit de représenter des intérêts opposés. Et pourtant, une polémique peut naître entre un avocat et le magistrat en charge de l'affaire à cause de soustraction de documents sur la base desquels on a retenu des chefs d'inculpation et des pièces de procédure considérées comme importantes pour assurer une bonne défense d'un justiciable.
Les avocats algériens rencontrent souvent ce genre de difficulté, particulièrement dans les affaires liées à la corruption. À de nombreuses occasions, ces derniers ont dû se retirer de l'audience en guise de protestation contre de tels faits. Si de coutume l'avocat doit respecter le secret de l'instruction et ne pas communiquer sur le fond de l'affaire, il peut s'exprimer sur la forme sans nuire aux intérêts de son client. Cet article semble avoir été introduit dans une forme vague spécialement pour contrecarrer les fuites autour des affaires de terrorisme, de corruption et bien d'autres dont la médiatisation peut s'avérer gênante pour le pouvoir en place. Les grandes affaires de corruption, comme celle de l'autoroute Est-Ouest, Sonatrach, Sonelgaz et bien d'autres, ont été, en effet, révélées par les médias.
Le secret de défense peut devenir rapidement une parade abusive pour entretenir l'omerta autour de ce genre de dossiers. La mouture en débat au Sénat reste également imprécise sur la notion d'incident d'audience. Constatons : l'article 25 stipule que "lorsque l'avocat commet un grave incident d'audience, l'audience est obligatoirement suspendue. Le président de juridiction et le délégué des avocats sont saisis du différend pour un règlement à l'amiable". Qu'entendent les rédacteurs de ce texte par un grave incident d'audience ' Le retrait des avocats de la salle d'audience ' Leur protestation vis-à-vis d'un vice de procédure ' Là encore on est dans un flou total, ouvrant la voie aux dérives. On ne peut alors que s'interroger sur ce silence soudain des robes noires.
Car, c'est quand même curieux d'observer 10 des 15 bâtonniers que compte l'Union des barreaux d'Alger pestiférer durant des mois contre ce projet de loi ' les cinq autres ne se sont pas prononcés ', pour ensuite les entendre affirmer qu'il est correct. "Nous avons contesté le texte et même occupé la rue. De crainte que les choses ne s'embrasent, le gouvernement a accepté de revoir le texte. Au final, il a conclu un marché avec les avocats pour acheter la paix sociale. Ce n'est pas normal", a accusé Me Chaoui lors d'une des rencontres du bâtonnat d'Alger.
En effet, en contrepartie de ces restrictions, le présent projet recule sur certains points contenus dans la mouture initiale. Il concède, notamment, l'inviolabilité du cabinet d'avocat en prévoyant que toute perquisition ou saisie ne peut y être effectuée que par le magistrat compétent en présence du bâtonnier ou de son délégué, ou après les avoir dûment avisés. Il prévoit également que les honoraires sont convenus librement entre le justiciable et l'avocat et rend compatible la profession d'avocat avec les fonctions d'enseignement dans les universités et établissements d'enseignement supérieur. Ces reculs ont-ils suffi à faire taire les avocats ou ne constituent-ils que la partie visible du deal '
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