Il ne reste que la désinfection du réseau des canalisations pour
alimenter l'ensemble de la population de Tamanrasset en eau à partir d'In
Salah. «L'eau coulera dans les robinets dans une quinzaine de jours», rassure
le ministre des Ressources en eau.
C'est hier que le ministre des Ressources en eau s'est déplacé à
Tamanrasset pour vérifier les derniers travaux du mégaprojet alimentant
Tamanrasset en eau potable à partir d'In Salah. «Tout est fin prêt, l'eau est
arrivée la semaine dernière dans les stations de pompage de Tamanrasset. Nous
procédons maintenant à la désinfection des canalisations de la ville pour que
l'eau arrive propre : elle doit être aux normes», nous a déclaré Abdelmalek
Sellal hier au niveau de l'une des stations de pompage.
Il explique que l'eau ramenée d'In Salah a un taux de turbidité très
élevé, il faut qu'elle soit déchargée des substances qu'elle comporte pour
devenir potable. De 400%, ce taux est à 65%. Le ministre pense qu'il est très
possible de le ramener à 5%. «C'est un taux largement acceptable, l'eau aura un
goût à peine salé», dira-il avec son sourire habituel. Il souligne surtout
«l'impureté» des canalisations d'eau de Tamanrasset «qui n'ont presque jamais
servi» à cause de l'absence d'eau potable dans les robinets. «Il faut nettoyer
d'In Salah à Tamanrasset. Nous avons ramené pour cela cinq équipes de l'ADE»,
fait-il savoir. L'eau ne sera lâchée dans les robinets que dans quelques jours.
Le ministre estime la durée à «3 ou 4 jours». «On peut le faire dans 48 h, mais
la ville ne sera alimentée qu'à hauteur de 40%. Je veux du 100%, il faut donc
qu'on nettoie tout», indique-t-il.
Il dit quand même que le délai retenu est d'à peu près 15 jours. «Les
équipes de l'ASE ont détecté à ce jour 65 défections du réseau qui ont été
réparées», relève Liès Hidouci, le chef de projet. «Petit à petit, nous
arriverons à tout réparer», ajoute le ministre.
Sellal aura ainsi gagné le magnifique défi d'alimenter en eau potable une
région qui en a oublié presque le goût. «Nous achetons 100 litres d'eau au
privé à 70 dinars, l'APC peut nous en vendre 400 à 80 dinars, mais il faut
galérer pour avoir son tour. Il y a énormément de monde qui attend», nous dit
un habitant de la ville.
Seuls deux ou trois quartiers ont de l'eau dans les robinets et, bien
sûr, les institutions de l'Etat. Nous attendons avec impatience que l'eau
arrive dans les robinets», souhaite-t-il.
197 milliards de dinars, un projet moins cher que chez les voisins
Pour que «le projet du siècle» devienne réalité, il aura fallu au
ministre des Ressources en eau susciter des efforts considérables de personnels
venus de lointaines contrées chinoises, mais aussi bien de chez nous, même
s'ils sont bien moins nombreux que les équipes étrangères, et aussi 38 mois de
travaux et 197 milliards de dinars.
«Il y a beaucoup de femmes sur les sites, elles sont venues de Chine
comme interprètes ou ingénieurs», nous dit une charmante Chinoise avec un large
sourire. Habillées comme leurs collègues hommes d'une combinaison bleue et
coiffées d'un casque, les femmes travaillent tout autant que les hommes. «Nous
travaillons jour et nuit, 7 jours sur 7, sans relâche. Nous avons même reporté
nos congés depuis que nous sommes dans la phase finale du projet»,
souligne-t-elle.
«Le travail est dur. Si nous n'avions pas un salaire conséquent, nous ne
serions pas venues», ajoute-t-elle. Les personnels chinois signent des contrats
de trois ans. «Il y en a qui les ont renouvelés pour une même période», dit
notre interlocutrice, qui note que «c'est un projet très important, que ce soit
pour l'Algérie ou pour la Chine. Tout est terminé, il ne reste que quelques
détails». Les habitants de la région témoignent de «la correction et de la
sagesse des Chinois : ils n'ont jamais créé de problèmes, ils respectent nos
traditions, nos règles et nos lois», nous dit-on.
Cosider est pratiquement la seule entreprise nationale qui y a participé
en prenant en charge la réalisation d'un seul lot. «Cosider est spécialisée
dans le pipeline ; on y a réalisé un tiers des 750 km, tout au long desquels
l'eau doit passer pour arriver d'In Salah à Tamanrasset», nous explique son
PDG, Lakhdar Rakhroukh. Pour réaliser ce lot, Cosider a eu 30 milliards de
dinars. «On a respecté les délais, nous le livrons entier dans un mois,»
précise-t-il. Il rappellera avec une pointe de fierté que «les durs travaux
dans la roche, c'est nous !».
La mission actuelle de l'entreprise nationale qui a réussi, a lancé le
ministre à son PDG, «à concurrencer les Chinois», est de raccorder les
réservoirs aux châteaux d'eau qui desservent la ville en eau potable. «Pour le
faire, nous avons bénéficié d'un apport financier de 500 millions de dinars»,
affirme Rakhroukh. Interrogé sur les lenteurs qui se font sentir pour la
désinfection du réseau de canalisation de Tam, le ministre tentera de leur
trouver des circonstances atténuantes. Mais il mettra les pieds dans le plat et
lâchera : «Vous savez que pour faire accepter un projet, la commission des marchés
publics (CMP) prend tout son temps, jusqu'à deux ans, et c'est ce qui s'est
passé pour le projet des réseaux de la ville». C'est ce qu'on appelle,
ajoute-t-il, «la bureaucratie à l'algérienne». Des délais supplémentaires ont
été aussi consentis en raison, dit-on, de travaux non inscrits dans les études
préalables. «Sa réalisation nous a pris 38 mois», affirme le ministre.
La pointe de fierté du ministre
Sellal continuera à expliquer la nécessité des opérations
d'assainissement et de javellisation qui doivent être menées pour «une bonne
eau». Aussi prévue, une opération d'installation d'un réseau moderne qui sera
connecté à celui existant. Le ministère a fait appel à une entreprise étrangère
pour faire l'étude nécessaire. «Pour lui, aujourd'hui, le pari a été relevé
pour faire marcher ce qu'on appelle la ligne verte de la première canalisation,
la deuxième sera mise en marche, par télégestion, dans 4 à 5 mois». Ce sont,
selon lui, «les derniers détails pour ouvrir les vannes à l'ensemble de la
population de la ville». Le grand détail est cependant, à ces yeux, la
réalisation d'une station de déminéralisation «pour la réduction de la
salinité». L'appel d'offres est lancé. «On n'est pas pressé. Pour le moment, on
n'en a pas besoin, les capacités que nous avons répondent largement aux besoins
des populations», dit le ministre. Il ambitionne même d'en faire bénéficier les
régions alentours.
Après son inspection des stations de pompage et des réservoirs, le
ministre ira «renifler» les odeurs émanant des trois bassins de lagunage
construits pour l'épuration des eaux usées de Tam. A plusieurs kilomètres à la
ronde, ça ne sentait pas la rose ! Ce sont des fosses de 57 m3, équipées de
deux pompes chacune, pour recevoir les eaux des égouts, les apurer et les redistribuer
pour les besoins de l'agriculture. La vase restée au fond des bassins et qui
empeste la région sera, indiquera Sellal, après son séchage, utilisée comme
engrais.
Pour le fonctionnement de cette grosse machine, le ministre indique que
«nous n'avons pas trop besoin d'électricité parce que tout le reste, pour ce
qui est des stations de pompage, est alimenté avec le gasoil et le gaz». Il
note d'ailleurs que «ce projet s'inscrit dans l'avenir, dans celui liant le
Nigeria à l'Algérie pour la commercialisation du gaz (projet Nigal)».
Sellal fera savoir par ailleurs que les travaux de viabilisation des
sites pour ce mégaprojet ont aussi profité à l'installation de trois câbles de
fibre optique, le premier pour la télégestion du projet en question, le second
profitant à Algérie Télécom et liant l'Algérie au continent africain. Le
troisième câble, apprend-on à Tam, servira les militaires pour surveiller une
zone aussi vaste que celle de Tamanrasset.
Durant ses déplacements, le ministre et sa délégation traverseront des
quartiers où la pauvreté fait presque honte. Sersouf en fait partie, avec ses
rues complètement défoncées et ses poubelles à ciel ouvert. Il ira jeter un Å“il
dans un autre, moins poussiéreux : c'est le quartier de Tehagouine. Mais le
plus urbanisé est celui Aderiane, faisant face au mont du même nom. Ce sont en
fait deux montagnes séparées par une fente. «Aderiane, qui veut dire thelja,
cette fente entre deux incisives», nous explique un habitant de la région. Le
quartier abrite 1.028 logements sociaux, un CEM et d'autres instances
étatiques. Les habitants affirment «faire confiance au nouveau wali qui se
déplace partout,», nous dit l'un d'eux.
La délégation terminera sa mission par un bon couscous de la région dans
un camp de jeunes, dont l'architecture, dit-on, a été copiée sur un camp de
Djanet. Un endroit chaleureux, calme et reposant.
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Posté Le : 16/03/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Envoyée Spéciale A Tamanrasset : Ghania Oukazi
Source : www.lequotidien-oran.com