Projection de Le citoyen Pierre Chaulet Hommage à un homme d’exception!

Publié le 02.06.2024 dans le Quotidien l’Expression
La maison diocésaine, sise à Alger, a abrité jeudi soir la projection du magnifique film documentaire Le citoyen Pierre Chaulet du réalisateur Saïd Mehdaoui….

L'occasion était donnée aussi pour parler de l'aventure éditoriale que fut la publication des Mémoires de Claudine et Pierre Chaulet «Le Choix de l'Algérie.
Deux voix, une mémoire» par Selma Hellal, coresponsable des Editions Barzakh, en présence de Luc Chaulet, le fils du couple légendaire.
Produite en 2023 dans le cadre de la célébration du soixantième anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, le réalisateur dira que le désir de faire ce film sur «cet homme d'exception» selon ses propos, remonte à 2012, mais faute d'octroi de financement par le ministère de la Culture via le Fdatic, il dut attendre plusieurs années, sans pour autant renoncer à son projet qui lui tenait à coeur. Sa rencontre avec Pierre Chaulet, fera t-il remarquer, remonte à son premier documentaire qui date de 2009, intitulé « Les cinéastes de la liberté» où le fameux médecin était un des témoins clés dans son film.

Engagement et transmission
Rejoignant Saïd Mehdaoui dans son désir de faire connaître aux nouvelles générations qui était Claudine et Pierre Chaulet, Selma Halal insistera, en effet, sur la notion de «transmission», qui grâce à ce livre, publié en 2012, lui a permis d'inaugurer, par la suite, toute une série d'ouvrages qui donnent la parole à des Algériens aux parcours atypiques dont on devrait prendre exemple.
Ainsi, le film de Saïd Mahdaoui s'ouvre sur les images d'enterrement de Pierre Chaulet, en présence de son fils et petit-fils (gros plan sur ce dernier qui clôt aussi le documentaire). Puis l'on fait un bond dans le passé colonial de l'Algérie pour comprendre la prise de conscience très tôt qui touchera Pierre Chaulet et son désir de venir en aide aux plus démunis durant la Guerre de Libération nationale, en s'associant d'abord au mouvement des Scouts, puis, en travaillant au sein des cellules de soutien où il soignait les malades et les blessés parmi les révolutionnaires, dont le commandant Azzedine qui, dans le film, témoignera du courage du couple, qui est venu le chercher en voiture, en dehors d'Alger, alors qu'il était blessé
et Claudine enceinte...
Pierre Chaulet se devait ainsi pour sauver les vies des moudjahidine distribuer des médicaments, tout en formant des infirmières.
Parti en Tunisie, après avoir poursuivi son doctorat en médecine en France, il rejoindra le Front de Libération nationale (FLN).
Le documentaire évoquera aussi le lien qu'il a entretenu avec de grands moudjahidine et autres militants de la cause algérienne dont Larbi Ben M'hidi, Abane Ramdane, Mohamed Boudiaf, Saâd Dahlab, et Ben Youcef Ben Khedda, ou encore Frantz Fanon.
Le documentaire évoque également le travail de Pierre Chaulet au sein du journal El Moudjahid.
Place à son engagement sans faille, après l'indépendance de l'Algérie, pour la lutte contre la tuberculose dont le traitement a été écourté de deux ans à six mois grâce à lui et instauré en Algérie dix ans avant que les autres pays ne le suivent, mais aussi la gratuité de la médecine.

L'apport de Chaulet
Ainsi c'est grâce à Pierre Chaulet que le système de santé fut réformé en Algérie.
Le documentaire de 63 minutes est ponctué en outre à de nombreux témoignages.
On citera, notamment l'historien Mohamed Corso, la militante psychiatre Alice Cherki et autres professeurs en pneumologie qui ont eu la chance de travailler en côtoyant de près le grand professeur Chaulet et devenir amis. Ces derniers souligneront avec émotion d'ailleurs, l'intérêt que portait Pierre Chaulet à sauver des vies, ce qui était plus qu'un sacerdoce lié au serment d'Hippocrate mais la continuité de sa fidélité de son engagement envers l'Algérie dont il se sentait un citoyen à part entière.
Un film très intéressant sur le plan pédagogique d'autant plus qu'il est rehaussé d'images de reconstituions grâce auxquelles deux jeunes comédiens de talent ont su d'un côté insuffler dynamisme et originalité au film et d'un autre côté, humaniser autrement cette histoire avec un grand H.
Une belle démarche filmique des plus ingénieuses venant de la part du réalisateur qui a su penser l'esthétique de son film en ne se contentant pas seulement sur la narration et les images d'archives seules, comme certains. Ou quand la pertinence du propos rejoint la beauté de la forme.
Une bonne idée qu'a eu Saïd Mehdaoui de faire ce film donc!

O. HIND