Algérie - Dinanderie


Oubliée, la fabrication d’ustensiles en cuivre ! Ces artisans créent désormais des objets uniques, dans le respect d’une technique ancestrale. Apparue au Moyen Âge dans la vallée de la Meuse, près de Dinant (Belgique) – comme son nom l’indique –, la dinanderie est un savoir-faire en pleine mutation. Après avoir été longtemps cantonnée aux ustensiles ou aux objets liturgiques, cette technique, qui consiste à créer des pièces « de forme » par martelage à froid de feuilles de métal – en général du cuivre ou des alliages cuivreux –, appartient désormais au champ de l’artisanat d’art et de la création.

Seule une quinzaine d’artisans sont encore recensés dans l’Hexagone. « Je suis intimement persuadé que nous appartenons à une génération de transition, souligne Olivier Courtot, meilleur ouvrier de France. Après l’âge d’or du début du siècle, la dinanderie traditionnelle a souffert des réquisitions de cuivre lors des deux guerres mondiales puis a disparu dans les années 1950 avec l’arrivée de l’aluminium et de l’inox. Mais aujourd’hui, une nouvelle clientèle, qui est à la recherche de pièces uniques ou de créations personnalisées, s’intéresse de plus en plus à la dinanderie. »

Outils introuvables
Après des années de dédain dues à une image galvaudée, le cuivre séduit à nouveau les décorateurs qui l’utilisent sur des éléments de mobilier. « C’est à nous de modifier l’image de cette matière ! », poursuit Olivier Courtaut, qui crée des pièces uniques mais travaille aussi en collaboration avec des architectes d’intérieur. Si de nouveaux débouchés s’offrent aux professionnels, la technique est demeurée inchangée. Elle est très proche de celle des orfèvres et reste encore exclusivement manuelle. Après l’emboutissage, au cours duquel la feuille de métal est frappée sur une forme – tas, rognon ou bigorne –, suit l’étape de la rétreinte, qui permet de faire passer la feuille en position verticale, avant le sous-planage et le planage, pour les finitions. Patines, gravures, incrustations ou assemblages par soudure complètent ensuite le travail sur la pièce ainsi formée. Comme pour tous les métiers artisanaux, l’apprentissage est très long, d’autant plus que tous les enseignements spécifiques ont disparu. Devenu dinandier après une formation de chaudronnier, Olivier Courtaut estime qu’une dizaine d’années sont nécessaires pour maîtriser toutes les subtilités de la technique et des matériaux. Et d’autres contraintes viennent se greffer à la pratique de la dinanderie. À une très forte élévation du prix du métal, s’ajoute la rareté du matériel, comme en témoigne Gladys Liez, qui exerce dans l’Aisne. « Les outils du dinandier sont aujourd’hui introuvables », explique la jeune professionnelle, qui a eu la chance de bénéficier d’un don. « Nous rencontrons de grandes difficultés pour la mise en place du matériel de l’atelier, confirme Olivier Courtaut, car les forges qui fabriquaient les tas ou les marteaux ont toutes fermé. Nous utilisons donc notre réseau pour en récupérer là où nous pouvons. » Créatrice de pièces uniques aux lignes épurées qui requièrent souvent plus d’une cinquantaine d’heures de travail, Gladys Liez s’est formée dans le cadre d’un stage, par passion pour la dinanderie. « Fabriquer une sphère à partir d’une simple feuille de métal est fascinant », poursuit-elle. Installée depuis 2001, Gladys Liez est pourtant encore obligée de cumuler cette activité avec un mi-temps dans une entreprise de réédition de luminaires de Serge Mouille. Très engagé dans la transmission du métier, Olivier Courtaut, lui-même devenu apprenti à l’âge de 16 ans, dispense pour sa part des cours d’initiation dans les lycées techniques des Deux-Sèvres, où est installé son atelier. Il avoue que les débouchés restent minces. « Certains jeunes seraient prêts à reprendre le flambeau, mais je ne leur cache pas qu’il est très difficile d’en vivre correctement. »
Sophie Flouquet
'Champignon'


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