Les ministres du gouvernement Djerad appellent avec insistance les citoyens à respecter scrupuleusement les barrières de prévention contre le nouveau coronavirus, mais ne précisent pas où en trouver les moyens.Au regard du nombre de gros-porteurs militaires qui assurent des vols entre Alger et Pékin pour s'approvisionner en moyens de lutte et de prévention contre le Covid-19, l'on pense que les pénuries des masques sont totalement éradiquées. D'autant qu'à chaque fois qu'un avion atterrit tard dans la nuit, les ministres du secteur s'enorgueillissent d'avoir reçu des quantités considérables de ces moyens. De nombreuses associations affirment tous les jours produire des milliers de masques à travers le pays. Les chiffres officiels s'élèvent à des millions, «on a 20 millions de masques », a lancé le ministre de l'Industrie pharmaceutique sur le tarmac de l'aéroport à l'atterrissage d'un lourd porteur militaire en provenance de Chine. Mais un simple petit détour à la pharmacie du coin peut tout de suite renseigner sur le fait que les masques ou les bavettes de protection demeurent toujours une denrée rare sur le marché.
« Il y a plusieurs semaines qu'on n'a pas été livré, en plus les rares fois où l'ont a été, on nous a donné de petites quantités », nous disait hier une pharmacienne qui a reconnu qu'elle-même porte un masque qu'elle lave et remet tous les jours. Les officines les mieux achalandées sur la place d'Alger affichent carrément sur leur porte d'entrée «Pas de masques» pour éviter de chaque fois répondre par la négative à une question récurrente de leurs clients. Des pharmaciens avouent qu' « il n'y a aucune coordination entre eux et la pharmacie centrale, on ne sait même s'il y a des stocks de secours, on ne nous demande jamais si on en a ou pas, c'est très curieux comme gestion ». Le 7 mai dernier, le wali de Constantine a décidé d'imposer le port du masque dans l'ensemble des administrations publiques et des commerces. L'on ne sait comment se débrouillent les Constantinois pour les avoir à chaque fois qu'ils sortent de chez eux.
« On me le donne sous le manteau »
«On en trouve, on les achète l'un à 60 DA », nous renseigne un collègue sur place. Tant mieux !, doivent penser ceux qui en cherchent partout à Alger mais en vain. Dans la capitale, beaucoup avouent que « nous arrachons un ou deux à nos connaissances ». Encore un produit qui oblige à passer par des réseaux « clientélistes » pour son acquisition. «On me le donne sous le manteau comme on dit, les rares fois où je l'ai trouvé sur le marché, je l'ai acheté à 100 DA, c'est de la folie pour quelque chose de jetable », se plaint une dame.
Couacs d'officiels, le ministre de la Santé n'a de cesse d'appeler les citoyens à respecter la distanciation sociale et à porter le masque. Le professeur Benbouzid doit savoir pourtant que le masque est introuvable et que la distanciation sociale n'est pas marquée par ceux-là mêmes qui appellent à son respect. Lors de son déplacement au sud du pays, lui-même était entouré d'une foule compacte qui n'a respecté aucune distance. C'est d'ailleurs le cas du 1er ministre et des ministres qui sortent sur le terrain et qui apparaissent accompagnés d'un grand nombre de cadres, d'élus, avec à leurs côtés très serrées les autorités locales. Des images qui donnent un sérieux coup à la crédibilité de la communication officielle. Le communiqué rendu public samedi par le ministère du Travail relatif aux revalorisations des pensions de retraite paraît affirmer des velléités d'aligner les titres de presse et l'ensemble des médias uniquement sur l'information officielle aussi banale soit-elle. Une augmentation des retraites ne peut être cachée sous le prétexte de la confidentialité ou du devoir de réserve. En rendant public la semaine dernière un démenti à ce sujet, la tutelle a été obligée de jouer sur les mots parce qu'à l'origine l'information n'était pas fausse.
« Site en cours de construction »
Autre couac, celui-ci venu de plus haut, des acteurs politiques et économiques se sont étonnés d'avoir reçu des copies de la mouture de révision de la Constitution mal imprimées parfois avec des pages qui manquent. A première vue, le document de la commission Laraba a été très mal scanné ou l'a été avec un mauvais matériel. De nombreuses pages sont illisibles parce que scannées tordues et d'une manière superficielle jusqu'à ne pas pouvoir lire des lignes entières. La version numérique est inexistante nulle part. Ceux qui pensaient pouvoir la décharger en ouvrant le site électronique de la présidence de la République ont déchanté en lisant en gros et en gras sur la page «site en cours de construction». Le staff de la communication d'El Mouradia ne daigne même pas répondre aux doléances des journalistes qui veulent savoir ce qu'il en est ou tout au moins en avoir une copie. «De rares exceptions parmi nous l'ont eu à titre amical», lâchent avec un sourire certains d'entre eux. Jusqu'à hier, l'on se demande comment compte la présidence amorcer un débat « citoyen » le plus inclusif possible autour du projet Laraba alors qu'il n'a pas été encore mis en ligne...
Révolu semble le temps des «sources fiables», «sources sûres» ou «sources bien informées» pour diversifier l'information et permettre aux lecteurs de la lire différemment et d'en débattre librement. L'on croise les doigts pour que l'option du confinement sanitaire ne déteigne pas sur les esprits pour les amener à penser à un confinement de la corporation en brimant son élan professionnel, piétinant au passage la liberté d'informer.
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Posté Le : 11/05/2020
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Ghania Oukazi
Source : www.lequotidien-oran.com