Algérie

Présidence de la République et Télévision nationale: Des nominations et des lectures



Les premiers changements d'hommes effectués par le président de la République semblent répondre à des considérations de réorientation des missions des institutions et structures de l'Etat, sur fond d'affinité et de reconnaissance mais aussi de reproche et de sanction.Dès son intronisation au palais d'El Mouradia, Abdelmadjid Tebboune a procédé à un changement de personnel, en premier par son acceptation jeudi dernier, juste après sa prestation de serment, de la démission du Premier ministre Nouredine Bedoui pour le remplacer, à titre intérimaire, par Sabri Boukadoum qui gardait le portefeuille de ministre des Affaires étrangères. Le premier jeu de quille de Tebboune a fait tomber Salah Eddine Dahmoune, alors ministre de l'Intérieur et son remplacement par Kamel Beldjoud, celui qui était ministre de l'Habitat, dans le gouvernement Bedoui. Le surlendemain, samedi dernier, il a nommé son secrétaire général et son directeur de cabinet. Ces changements n'ont rien d'inédit. Ils étaient attendus par tous parce qu'il est d'usage que le chef de l'Etat s'entoure de personnes en qui il a confiance. C'est ainsi que Noureddine Ayadi qui était secrétaire général de Abdelkader Bensalah, devient directeur de Cabinet de la présidence de la Pépublique et cède son poste initial à Mohamed El Amine Messaïd qui devient donc SG de la même institution. Ce dernier était compté parmi les hommes qui allaient bénéficier d'une haute fonction dans la plus importante institution de l'Etat et ce, pour avoir été le directeur de campagne de Tebboune, alors candidat à l'élection présidentielle. La formule consacrée pour ce genre de promotion est «pour service rendu». Mais l'on rappelle que Messaïd est connu pratiquement par l'ensemble des décideurs et personnels politiques pour avoir servi sous l'autorité du Président Bouteflika. Il a été chef de cabinet de Abdelmalek Sellal alors Premier ministre mais surtout directeur de Cabinet de Tebboune alors ministre de l'Habitat.
Décryptage de «man?uvres» audiovisuelles
Ces limogeages et placements immédiats sont dictés en évidence, les premiers par un sentiment de colère que Tebboune candidat avait nourri envers les concernés et les seconds par un geste de reconnaissance envers ceux qui sont restés à ses côtés, durant sa courte traversée du désert. D'autres changements ont été opérés au niveau du plus grand média audiovisuel, au même moment. La Télévision publique a ainsi vu son directeur de l'information et son adjoint limogés et remplacés par deux journalistes de «la boîte». Les nouveaux venus occupaient respectivement le poste de rédacteur en chef et de directeur adjoint de l'information (il y a quelques mois pour le second). Des sources internes à la télévision nous renseignent que les limogés ont « man?uvré contre le candidat-président». Décryptage de la «man?uvre» audiovisuelle « une mauvaise prise d'image, de faux montages de séquences (...) et mauvais cadrage lors de la prestation de serment». L'on apprend ainsi que « quand le candidat Tebboune animait ses différents meetings, les responsables de l'information à la Télévision publique reprenaient les images des foules que constituaient ses soutiens à travers le pays et les attribuaient à d'autres candidats qui, eux n'avaient pas de monde dans leurs déplacements», affirment nos sources. Autres griefs retenus contre eux, «le jour de la prestation de serment, les caméras de la Télévision publique étaient plus fixées sur Bedoui que sur Tebboune. A plusieurs reprises, le Premier ministre apparaissait sur l'écran alors que le président de la République prêtait serment». Le Journal télévisé du 20 h, de jeudi dernier, a, lui aussi, été vu comme étant «un scandale télévisuel». Nos sources nous font remarquer que « ce jour là, les responsables de l'information n'ont pas voulu se casser la tête, ils ont passé le discours du président à la Nation sans avoir procédé au préalable à un montage d'images et de sons qu'exigent le professionnalisme, en pareilles circonstances». Remarque de taille «le discours a été passé pratiquement en entier sans en mettre, en exergue, les passages les plus importants et sans élaguer certains gestes jugés quelque peu déplaisants quand ils sont faits par un président de la République comme par exemple tourner les pages en imbibant l'index avec de la salive (...)».
Des changements inévitables
Ceci dit, il est très possible qu'un tel geste n'a ni choqué ni déplu à l'opinion publique parce que tous les Algériens -à des exceptions rares- y recourent pour ouvrir les sacs en plastique même pour y mettre un sandwich. Le ministère du Commerce et ses services de contrôle d'hygiène n'ont jamais été choqués par ce recours systématique des commerçants (même les boulangeries) à une méthode qui pourrait être une source de propagation de microbes.
D'autres changements de responsables vont certainement suivre dans les jours qui viennent. L'on parle déjà, entre autres, d'un redéploiement des responsables, des missions et des structures de l'entreprise audiovisuelle publique dont une partie de la pléthore des employés perçoit des salaires faramineux tout en restant chez elle. Constituant un magma humain venu de divers horizons, la Télévision publique continue de fonctionner avec les anciens réflexes qui font de l'information une donne dictée, confectionnée et régentée par les pouvoirs de l'heure. Une nouvelle perception du champ médiatique national sur la base de normes modernes et universelles nécessite l'éclatement de ce lourd média public en chaînes thématiques avec obligation de résultats. La démarche pourrait paraître absurde, dans un environnement politique qui a bien créé l'Arav (Autorité de Régulation de l'Audiovisuel) il y a quelques années, mais refuse à ce jour d'y conformer le moindre média public ou privé, pour des raisons qui cachent mal la préservation d'intérêts matériels et l'accaparement d'espaces au sein de ce simulacre de contre pouvoirs par les clans en confrontation.
Les nominations les plus attendues sont indéniablement les ministres du nouveau gouvernement. Rien n'a filtré à ce sujet excepté peut-être que le président veut faire vite pour ne pas laisser de «blanc» sur la scène nationale. Les nombreux chantiers qu'il a annoncés exigent, aussi de lui, de permettre aux institutions de l'Etat de se (re)mettre en place rapidement et commencent à travailler. De la profonde révision de la Constitution à celle de la loi organique portant régime électoral et dont les effets ‘boule de neige' pousseront à une nouvelle élaboration de l'ensemble du cadre juridique et législatif, tout obligera le président de la République à chercher pour trouver l'encadrement humain approprié que le paysage politique n'a pas forcément
Le premier avertissement du président
Des cadres marginalisés depuis longtemps attendent d'être réinvestis de leur mission pour prouver leur compétence, chacun dans son domaine. D'autres, maintenus en rade, loin des centres institutionnels, pourront répondre de leur savoir-faire, une fois sollicités. Les services de l'Etat ont en principe en leur possession des listes de compétences qui constituent le vivier de la Nation. Y puiser pour constituer l'encadrement qu'il faut, dans un pays en reconstruction morale et matérielle, devra répondre à des exigences éthiques qui n'ont jamais été des références pour les pouvoirs qui se sont succédé. Le choix des hommes est un art d'envergure politique qui n'a jamais été enseigné en Algérie. Un président de la République a besoin d'être «coaché» convenablement pour en apprendre les principes.
Pour l'heure, depuis que Tebboune est président, les institutions semblent trépigner dans la mare du manque de tact comme l'a encore fait hier la Télévision publique. Hier, lors de l'inauguration de la 21ème édition de la Foire de la production nationale par le chef de l'Etat, à la Safex, aux Pins maritimes, le JT de 13h a diffusé en boucle des images de Tebboune serrant la main au responsable du stand du ministère de la Défense nationale. « Monsieur le Président, c'est le pavillon militaire, les services militaires sont prêts à la fouille», lui a dit le haut gradé de l'armée... Le président a plus loin discuté avec des entrepreneurs auxquels il a promis la création d'un nouveau ministère et d'une nouvelle banque pour les encadrer. L'occasion a été surtout pour lui de leur lancer que « il y aura des jeunes parmi vous dans ce ministère».
Ce qui fait quelque peu atténuer de sa déclaration de vouloir des jeunes de 25-26 ans dans le nouveau gouvernement. Déclaration qu'on qualifie depuis de «lapsus (zelat lissane)». Le chef de l'Etat prévient, d'une manière implicite, que rien ne se fera au hasard ni sans qu'il le sache. «Tout le monde surveille, les services surveillent, la justice surveille (...),» a-t-il affirmé devant des hommes d'affaires exposant à la foire.


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