Algérie

Présentation-Les éditions socrate : La petite maison'



' qui monte, qui monte, avec unnom qui détonne et unpositionnement judicieuxde son catalogue. La naissance d'une nouvelle maison d'édition (comme d'une librairie, d'une galerie') est toujours un bonheur dans notre univers culturel encore anémié malgré les progrès enregistrés. Nous avions salué celle de la librairie et des éditions Socrate, dans le giron de Djazaïr News, qui avaient déjà la particularité de porter le nom d'un philosophe grec, chose unique dans l'annuaire des éditeurs algériens. Les deux dernières parutions de la maison montrent que cette dénomination n'était pas gratuite, puisqu'il s'agit de deux romans de la littérature moderne grecque. Mais le champ éditorial des Editions Socrate ne se veut ni exclusivement helléniste ni même spécifiquement méditerranéen mais plutôt complètement universel, ce qui rend d'ailleurs justice à Socrate dont la notoriété et l'audience s'étendent aux antipodes d'Athènes.La présentation de la maison par elle-même est d'ailleurs éloquente : « Notre objectif est de proposer autre chose, de s'ouvrir vers d'autres littératures, d'autres univers ». Bonjour le voyage, cap sur les ailleurs semble-t-on nous dire et c'est bien ce qui transparaît des publications depuis le deuxième trimestre 2009 et de celles à venir.Le Manucure de Christos Chryssopoulos (105 pages) nous entraîne sur les pas d'un soigneur de mains itinérant qui, à travers les dédales de sa ville, se rend de clients en clientes, passionné par son métier jusqu'à l'obsession, sinon dans les parages d'une douce folie. Il nous fait visiter l'humanité à travers les mains, relevant les caractères de leurs propriétaires, les utilisant comme des révélateurs de personnalités, de conditions et de caractères. Mais son amour des mains l'amène aussi à les déconnecter des humains, à les personnifier, à leur attribuer une certaine autonomie. Elles sont surtout pour lui l'expression d'une perfection qui ne peut être que divine. « Un tout harmonieusement assorti. Créé avec simplicité et économie. Rien de superflu. Rien d'inutile. Aucune fioriture, que des éléments sobres, si savamment agencés que de la simplicité surgit la complexité, de l'unicité, la souplesse », pense le personnage fascinant de Phillipos Dostal et l'on croit que par ces lignes, il ne parle pas de son métier mais de l'écriture de son créateur l'écrivain, au style aussi dépouillé et apuré que peuvent l'être des mains. Il rencontrera la passion, pas celle d'une femme, mais celle d'une paire de mains et, avec un humour rentré d'une efficacité foudroyante, ce roman crée un véritable univers.Aussi original et plus savoureux, le roman de Andreas Staïkos, Les liaisons culinaires (140 pages). Ignorant le grec, nous ne pouvons en apprécier le titre original mais sa traduction ou interprétation en français est d'une fidélité particulière au récit, avec une allusion amusante aux Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos. L'histoire d'une femme partagée entre deux hommes. Rien de bien original, à part qu'elle va les amener à rivaliser entre eux, autant par l'amour que la cuisine, dans un imbroglio détonnant où se mêlent draps et torchons, mouchoirs et serviettes. Pas moins de dix-sept recettes authentiques de cuisine scandent cette intrigue amoureuse à trois, aux rebondissements inattendus. Un livre à lire éventuellement à la cuisine, en essayant les recettes et en parcourant les chapitres, là aussi d'une écriture limpide. Vraiment merci aux Editions Socrate de nous faire découvrir cette nouvelle littérature grecque quand nous en étions restés aux antiquités ou à l'incontournable Nikos Kasantasakis.Dans la même foulée, la jeune maison, dirigée par l'affable et remuant Abdallah Benaouda, promet quelques pépites. Dans le roman toujours, une édition bilingue de La salle de bain de Jean Phillipe Toussaint. Balé et Yaba Terminus , deux recueils de nouvelles, marquées polar, du Congolais Achille Ngoye. Une percée aussi du côté de la Scandinavie avec un roman du Suédois Henning Menkel, Comedia Infantil, dans un Mozambique déchiré par la violence, et un essai de son compatriote Sven Lindqvist, intitulé Exterminez toutes ces brutes, titre symbolique puisque repris de la chute du roman-culte de l''uvre de Conrad Au c'ur des ténèbres (qui a donné au cinéma ApocalypseNow).Commençant à Aïn Salah, ce livre plonge au c'ur du syndrome occidental de l'extermination.On nous annonce aussi une série d'essais dont Le Monde selon Mosanto que nous avions présenté à Arts & Lettres, réquisitoire ahurissant contre l'une des multinationales les plus puissantes de nos jours. Notons aussi : Massacres coloniaux de Yves Benot, Réformer l'Islam de Abou Filaly Ansari, A quoi sert la sociologie de Bernard Lahire, Voile et modernité de Nilüfer Göle, et d'autres encore'Mais là où les éditions Socrate seront les plus attendues, ce sera sans doute dans le projet de publication de récits autobiographiques d'Algériens, dans une série intitulée Qui suis-je ' Qui sommes-nous ', voilà bien la seule question que la littérature pose depuis sa naissance.


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