Algérie - Revue de Presse

Première frappe contre la Libye: Le début de la fin



Le président français Nicolas Sarkozy a annoncé, hier après-midi, le début d'une action militaire menée par la France contre la Libye, en accord avec Londres, Washington et des partenaires arabes qu'il venait de réunir à Paris.

« En accord avec nos partenaires, nos forces aériennes s'opposeront à toute agression des avions du colonel Kadhafi contre la population de Benghazi. D'ores et déjà, nos avions empêchent les attaques aériennes sur la ville», a indiqué Sarkozy, à l'issue d'un sommet extraordinaire avec une vingtaine de dirigeants internationaux. «D'ores et déjà, d'autres avions, français, sont prêts à intervenir contre des blindés qui menaceraient des civils désarmés», a-t-il ajouté. L'état-major français des armées a annoncé que la première frappe aérienne française contre la Libye a eu lieu vers 17 h45 visant «un véhicule indéterminé»

Une source proche des discussions sur la réunion internationale d'urgence à Paris indiquait que la France, la Grande-Bretagne, le Canada et la Norvège devraient être les premiers à effectuer des frappes contre Tripoli. Suivraient plus tard les Etats-Unis puis des pays arabes. Des mouvements d'avions ont été enregistrés hier dans plusieurs bases italiennes du nord et du sud. Selon l'agence italienne Ansa, trois Awacs sont prêts à décoller à Trapani où ont été également rassemblés les Tornado ECR italiens habituellement basés à Piacenza et spécialisés dans la destruction de défenses antimissiles et de radars, ainsi que les Tornado IDS d'attaque de Ghedi et les chasseurs Eurofighter de Grosseto. En outre, six F-16 danois sont arrivés à la base de Sigonella (sud-est de la Sicile), tandis que le préfet de Pordenone a annoncé l'arrivée prochaine d'avions américains à la base d'Aviano, toujours selon Ansa.

Et, avant même la fin de la réunion internationale sur la Libye, des chasseurs français étaient déjà dans le ciel libyen. Plusieurs avions de chasse Rafale de l'armée française survolaient hier «l'ensemble du territoire libyen» pour des missions de reconnaissance. Ces «missions de reconnaissance» devaient durer toute l'après-midi et les Rafale n'ont rencontré aucune difficulté après plusieurs heures de survol du territoire libyen. Et, pour signifier à Kadhafi la fin de son règne, le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, a estimé qu'il avait «perdu toute légitimité» et devait abandonner le pouvoir, dans une interview au quotidien espagnol El Mundo publiée hier. «Kadhafi a perdu toute légitimité. Il ne peut rester au pouvoir en Libye. Quoi qu'il arrive, il doit partir», a déclaré M. Ban.

Menaces de Kadhafi

Mouammar Kadhafi, de son côté, a prévenu dans des messages «urgents» aux dirigeants britannique, français, américain et l'Onu, qu'il ne rendrait pas les armes. «Si vous intervenez dans notre pays, vous le regretterez», a dit le numéro un libyen dans l'un des messages, «tout le peuple libyen est avec moi et ils sont prêts à mourir pour moi, les hommes, les femmes et les enfants», assure-t-il dans un autre.

Mais, le président français Nicolas Sarkozy compte aller jusqu'au bout de sa logique et a proposé lors du sommet international sur la Libye plusieurs scénarios de frappes militaires. Il s'était, avant le début de ce sommet qui avait réuni des représentants de la Ligue arabe, de l'Union africaine, de l'UE, du SG de l'Onu, entretenu avec le chef du gouvernement britannique David Cameron, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, et le chef de la diplomatie française Alain Juppé pour se mettre d'accord sur le commandement de la coalition internationale, et le lieu où se fera la coordination des missions.

De violents combats faisaient rage à l'entrée de Benghazi, bastion rebelle dans l'Est, le leader Mouammar Kadhafi défiant jusqu'au bout la communauté internationale qui a mis en place la zone d'exclusion aérienne avec un survol d'avions français. La situation était en train d'évoluer en fin d'après-midi vers une intervention militaire contre les troupes du régime de Mouammar Kadhafi, qui assiègent depuis plusieurs jours la ville de Benghazi, un des derniers bastions tenus par l'opposition, 48 heures après le vote de l'Onu pour l'usage de la force en Libye.

En dépit de l'annonce d'un cessez-le-feu décrété par le régime libyen dans le sillage de la décision du Conseil de sécurité, la ville de Benghazi donnait l'impression de subir un véritable siège militaire. Des bombardements intensifs ont visé la région de Benghazi, la «capitale» des insurgés et deuxième ville du pays, alors que des milliers de personnes fuyaient par le nord-est de la ville. Dans la localité de Al-Marj, à 50 km à l'est de Benghazi, sur la route de Tobrouk, distante de 350 km de la frontière avec l'Egypte, de gros embouteillages se formaient en raison de l'afflux de véhicules. Les forces loyales à Mouammar Kadhafi tiraient à l'arme lourde contre des quartiers résidentiels proches de Benghazi, selon un témoin. Des milices pro-Kadhafi «tirent à l'arme lourde sur des quartiers résidentiels. Elles ont l'ordre de tirer indistinctement. Ce qui se passe est un massacre». Un témoin a confirmé que les quartiers ouest de Benghazi «ont été pilonnés par les forces de Kadhafi» mais qu'aucun char n'était entré dans le centre de la ville. «Seuls les chars des insurgés sont présents dans le centre de Benghazi, mais les miliciens sont visibles dans plusieurs quartiers», a précisé ce témoin.

Selon des insurgés, l'artillerie et les chars ont tiré contre les quartiers ouest, et certains des obus ont touché le centre de la ville, principalement la rue principale Gamal Abdel Nasser. En outre, de violents accrochages ont eu lieu notamment à Foweihat, à 5 km du centre, entre les insurgés et des forces de Kadhafi «qui tiraient depuis des véhicules et lançaient des grenades». Selon l'hôpital Jala, les bombardements de samedi sur la ville ont fait 26 morts et plus de 40 blessés.

Calme à Misrata et combats à Zenten

Des insurgés ont par ailleurs annoncé hier avoir repoussé une offensive la veille des forces gouvernementales à Misrata, ville toujours contrôlée par l'opposition à quelque 200 km à l'est de Tripoli, au prix de 27 morts dans les rangs de l'opposition. Les forces du régime de Mouammar Kadhafi ont pénétré dans le centre-ville avant d'en être repoussées par les insurgés, a assuré à l'agence française AFP un porte-parole de l'insurrection sur place, joint par téléphone, précisant que la ville était calme hier. «Vingt-sept combattants ont été tués», a ajouté ce porte-parole, tout en affirmant: «Nous avons détruit 14 véhicules blindés, y compris des chars».

Par ailleurs, les forces de Kadhafi avançaient hier sur Zenten et ont pilonné les abords de cette ville au sud-ouest de Tripoli, contrôlée par l'opposition, poussant à la fuite ses habitants, a rapporté un témoin. Les pro-Kadhafi ont attaqué depuis des positions situées au sud de la ville. «Là, les chars sont à 2 ou 3 km du centre de la ville», raconte un témoin, précisant que «les gens partent en courant». «Ils ont avancé dans la nuit et ont commencé à attaquer et à bombarder avec des tirs de chars et mitrailleuses en continu» en milieu de matinée, poursuit-il. «Les tirs provenaient du sud de la ville. J'ai vu une dizaine de chars, des blindés légers type BMP et des chars avec des mitrailleuses lourdes», a ajouté le témoin. Selon lui, au nord de la ville, d'autres troupes du colonel Kadhafi ont tiré quelques salves de Grad en direction de Zenten. Deux maisons ont été touchées et six personnes blessées, dont trois gravement. Les opposants tentaient de défendre les abords de la ville, armés de vieux fusils italiens, «mais ont dû reculer et se replier par les dunes». En fin de matinée, «les tirs se poursuivaient mais de façon sporadique», selon le témoin, et les forces gouvernementales continuaient d'avancer avec les chars.




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