Algérie

Précisions de Mohamed Harbi



«J'ai pris connaissance de l'interview que je vous ai donnée. Permettez-moi d'y apporter quelques précisions :
1/Le choix des titres et des sous-titres a été fait par la rédaction. Je n'en suis donc pas le responsable.
2/ Je ne pouvais dire que les archives françaises qui seront ouvertes en 2012 sont sensibles et explosives . Elles sont accessibles depuis plusieurs années mais elles ne sont pas toutes libres à  la consultation.
3/ La mise en cause d'un dirigeant de premier plan comme Krim par Bentobbal, dont les  Mémoires gagneraient à  àªtre rendues publiques, doit àªtre contextualisée. Elle est intervenue après la mini-crise de direction qui a suivi le meurtre d'Abane Ramdane. Si j'ai évoqué cet épisode, c'est pour mentionner qu'il y a dans la sphère politique des antécédents aux règlements de compte selon des méthodes maffieuses et non pour discréditer un homme à  qui l'Algérie doit beaucoup. De tels épisodes ne doivent pas àªtre occultés si on veut civiliser et réguler le jeu politique.
4/ La réponse à  la question sur les trois tabous que vous avez évoqués appelle une clarification.
En occultant une partie de son histoire, l'Algérie s'est condamnée elle-même à  l'enfermement. Prenons par exemple l'histoire de l'Eglise d'Algérie. Les tentatives d'évangélisation ont laissé chez les Algériens vaincus des souvenirs douloureux. Est-ce une raison pour taire les efforts de cette église pour s'algérianiser et s'intégrer à  la nation, le rôle de ses prêtres et de ses séculiers dans la résistance '
Ce faisant on a laissé la porte grande ouverte au fanatisme,  à  l'intolérance et aux assassinats.  C'est en pensant aussi à  cela que j'ai répondu à  votre question sur les trois tabous. Le remède aux dérives du fanatisme religieux est complexe. Il requiert un système éducatif autre, un personnel enseignant gagné aux valeurs humanistes et un aggiornamento de l'islam.  Sur la question des harkis, je me suis souvent exprimé. Je ne plaide pas, comme pourraient le croire des gens de mauvaise foi, l'innocence. Mais un historien sérieux et un patriote soucieux de la cohésion nationale ne peuvent pas accepter dans l'examen d'une question coloniale la mise en œuvre d'une grille d'explication privilégiant le couple collaboration-résistance.
Il est grand temps d'arracher le destin de l'Algérie au flot des légendes pieuses et aux brumes des mythologies  qui le masquent de toute part . Il ne faut pas oublier qu'au-delà de ce qu'on appelle parfois légitimement la collaboration, l'attitude des Algériens s'est surtout caractérisée par une multitude de tactiques visant à  s'y soustraire, tactiques qui expliquent l'échec de l'Etat colonial à  parfaire sa domination sur notre société.
5/ Une vision saine de l'attitude des Algériens pendant la guerre de Libération doit inclure toutes les données disponibles. Je reproduis, ci-joint, un tableau établi par le professeur C.R. Ageron, tableau qui appelle débat, confrontation et éventuellement correction.


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