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Poutine maître de cérémonie de la paix



Poutine maître de cérémonie de la paix
Les présidents Poutine, Rohani et Erdogan
Le sommet organisé par le président Poutine avec ses homologues iranien et turc pour discuter du programme politique pour la Syrie a mis un point final à la guerre qui a ravagé ce pays et ouvert les perspectives de paix en présence d'une opposition qui a révisé ses positions radicales.
Triomphale, l'opposition syrienne annonçait hier qu'elle est parvenue contre toute attente à faire front commun pour le prochain round des négociations de Genève, sous l'égide de l'ONU. Après trois jours d'intenses tractations à Ryadh, les quelque 140 représentants du panel éclectique d'opposants syriens sont parvenus à un accord sur un comité de 36 membres, remplaçant le Haut comité des négociations (HCN) qui représentait jusqu'alors l'opposition à Genève. Huit des membres de ce nouveau comité relèvent de la Coalition nationale syrienne-composante de l'opposition en exil, basée à Istanbul-, quatre du «Groupe du Caire» et quatre du «Groupe de Moscou» -tous deux considérés comme plus conciliants vis-à-vis du régime de Damas-. Cette instance comprend en outre huit indépendants, sept représentants des rebelles et cinq du Comité de coordination national pour le changement démocratique, toléré par Damas. Elle est présidée par Nasr Hariri, un opposant déjà impliqué dans des négociations de paix.
Mais Vladimir Poutine qui a reçu à Sotchi le président syrien pendant quatre heures, à la veille du sommet avec l'Iranien Rohani et le Turc Erdogan, Bachar al Assad est repositionné au centre des pourparlers pour la paix, le rendant incontournable, que ce soit à Astana ou à Genève. C'est là une défaite avérée de l'Arabie saoudite et d'Israël qui, même s'ils sont parvenus à détruire complètement le pays, n'ont pas réussi pour autant à mettre à genoux le régime.
Peu d'observateurs ont d'ailleurs mesuré à sa juste valeur la réunion de Sotchi, préoccupés par des questions relatives au drame des migrants en Libye ou au feuilleton du Premier ministre libanais, Saad Hariri. Le sommet organisé par le président Poutine avec ses homologues iranien et turc pour discuter du programme politique pour la Syrie a mis un point final à la guerre qui a ravagé ce pays et ouvert les perspectives de paix en présence d'une opposition qui a révisé ses positions radicales.
Au sortir de la réunion avec le président Al Assad, le président Poutine a aussitôt contacté son homologue américain, le président Donald Trump. Quant aux partenaires de Sotchi, qu'ils soient pour ou contre le régime syrien, ils ont été également informés de la teneur des discussions ainsi que des décisions éventuelles auxquelles Damas a donné son aval. Des données qui montrent clairement que le président Poutine est bel et bien le maître de cérémonie dans la région et que les éléments déclencheurs de la crise en 2011 sont définitivement écartés. Autant dire que les pays arabes seront les grands absents des négociations de paix et des accords qui en découleront en 2018, eux qui ont tenté à coup de centaines de milliards de dollars de peser sur le cours des évènements en Syrie et plus largement au Proche-Orient.
La preuve, plus personne au sein même de l'opposition radicale d'où les plus extrémistes ont dû claquer la porte voici quelques jours, à Riyadh, ne parle de la démission préalable du chef de l'Etat syrien. Et plus encore, la surprenante volte-face, hier, du président turc Reccep Tayip Erdogan qui a déclaré que «des discussions avec le président Bachar el-Assad ne sont pas à exclure au sujet du dossier kurde» constitue une indication éloquente sur le nouvel état d'esprit qui prévaut désormais dans la gestion du dossier syrien.
La seconde carte est celle des groupes armés dans la région de la Ghouta orientale autour de Damas, notamment l'Armée de l'islam. Mais dans ce secteur, la tendance est désormais à l'accalmie, des accords ayant été conclus entre l'armée syrienne et certains groupes armés. Quant à ceux qui veulent poursuivre le combat, ils devront subir l'ultime assaut des troupes du régime car il n'est pas envisageable de laisser cet abcès si proche de la capitale. Les visées d'Israël et de ses acolytes sont plombées par ce retournement de situation, surtout que lors de la bataille de Hadar, dans le sud syrien, leurs manoeuvres se sont soldées par un échec face à l'armée arabe syrienne qui a brisé l'offensive lancée avec le soutien actif de l'Etat hébreu.
La Russie et l'Iran, tous deux alliés de la Syrie ainsi que la Turquie, engagée aux côtés des forces rebelles mais résolue à empêcher coûte que coûte l'embryon kurde à la frontière syro-irakienne sont porteurs d'un seul et même projet qui vise à garantir la souveraineté et l'intégrité des deux pays ciblés par le terrorisme de Daesh. Même le rêve kurde caressé par Barzani s'est fracassé sur le mur des Gardiens de la Révolution quand le général Qassem Souleimani s'est adressé aux FDS en Syrie et aux peshmergas irakiens pour leur rappeler que sans Téhéran, la Turquie aurait déjà envahi le Kurdistan pour éliminer toute menace séparatiste dans la région. «Mais, a-t-il ajouté, si vous persistez dans votre projet, non seulement nous laisserons faire Ankara et nous serons même à ses côtés, et tout ce que vous aurez obtenu, c'est un pari perdu d'avance.»
Ceci explique cela et on peut considérer dès lors que Turquie et Iran sont sur la même longueur d'onde, à la grande satisfaction de Moscou qui est, dorénavant, seul à distribuer les cartes sur la table des négociations politiques. On ne connaît pas encore avec précision les détails du plan envisagé, sinon qu'il y aura dès élections anticipées et qu'une nouvelle Constitution introduira trois postes de vice-président en vue d'un certain équilibre des pouvoirs. Mais cela ne signifie pas que tout danger est écarté car les perdants ne désespèrent pas de déclencher une nouvelle guerre, sous de nouveaux prétextes, en ciblant l'Iran en premier lieu. Une menace qui a été au coeur des entretiens de Sotchi où on a choisi de prévenir avant de guérir.


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