Le procès des 30 Algériens de confession ahmadite s'ouvre aujourd'hui au tribunal d'Akbou, dans la wilaya de Béjaïa. Ils sont poursuivis pour offense à l'islam, constitution d'association illégale et collecte illégale d'argent. Interpelés le 10 mars 2017, les prévenus, issus de plusieurs localités de la wilaya de Béjaïa, avaient été laissés en liberté provisoire, dans l'attente de leur procès. A cette occasion, la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) annonce, dans un communiqué signé par son vice-président, Saïd Salhi, qu'elle sera présente à cette première comparution en première instance au tribunal d'Akbou pour assurer la défense par deux de ses avocats et qu'elle observera le procès par le biais de l'Observatoire algérien des procès (OAP). La défense des Ahmadis avait plaidé la libération des prévenus et l'abandon de l'ensemble des poursuites, car, selon le communiqué, «en contradiction avec les libertés de culte et de conscience consacrées par la Constitution et le pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par l'Algérie».La même source d'informations ajoute que le seul tort des 30 prévenus est d'être «ahmadis, algérien-ne-s et musulman-ne-s de confession non malékite, déclaré seul ‘‘référent confessionnel'' des Algérien-ne-s». Le dossier des Ahmadis revient donc au-devant de l'actualité à la lumière de ce procès, exposant le pays à une nouvelle salve de critiques. En effet, le sujet est devenu du pain béni pour les organisations droits-de-l'hommistes qui ne ratent aucune occasion pour épingler le pouvoir en place sur cette question. Dans son rapport annuel publié en février dernier, Amnesty International (AI) exposait le cas de la communauté des Ahmadis. « Plus de 280 membres du mouvement religieux minoritaire ahmadi ont fait l'objet de poursuites en lien avec leurs convictions ou pratiques religieuses durant l'année », rapporte-t-elle. «A partir d'avril, les tribunaux ont remis en liberté 16 ahmadis après avoir réduit leur peine ou leur avoir accordé un sursis, mais des dizaines d'autres faisaient toujours l'objet d'une enquête ou de poursuites et cinq étaient encore en détention à la fin de l'année », ajoute la même source. En 2017, Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch (HRW) avait exigé de «cesser de s'en prendre à cette minorité sans défense», évoquant l'«intolérance envers les croyances minoritaires, qu'elles se disent islamiques ou non».
L'ONG, basée à New-York, dénonçait également l'attitude officielle du pays évoquant même un «discours de haine» tenu par de hauts fonctionnaires du gouvernement, citant nommément le ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa ainsi que Ahmed Ouyahia, alors directeur de cabinet de la présidence. Se basant sur les chiffres fournis par la communauté ahmadie et le témoignage de certains de ses membres, HRW dresse un bilan sévère de la riposte du gouvernement entre poursuites en justice, peines de prison et harcèlements administratifs. Pour sa part, AI indiquait que le chef de la communauté était mis en cause dans six affaires différentes (…), toutes découlant de l'exercice de sa foi». A propos de ce dernier, rappelons qu'il avait été condamné, en septembre 2017, à six mois de prison avec sursis en première instance par le tribunal correctionnel de Aïn Tédelès, dans la wilaya de Mostaganem, pour collecte de fonds sans autorisation, atteinte au Prophète et constitution d'une association sans agrément. Le premier responsable d'Al Ahmadiyya, qualifiée officiellement de secte en Algérie, avait été arrêté le 28 août de la même année à Aïn Sefra, wilaya de Naama, dans la maison de sa mère, et incarcéré au centre de rééducation de Mostaganem en attente de son procès.
Mohamed Fali est revenu pour HRW sur ses poursuites judiciaires «débutées en juin 2016», dans la wilaya de Blida, avant de s'étendre à d'autres régions. Il dira qu'un an plus tard, «ce sont 266 Ahmadis qui ont été traduits devant les tribunaux de tout le pays, avec plusieurs personnes poursuivies dans de multiples procès». Un chiffre que l'ONG n'a pas été en mesure de confirmer auprès d'une source indépendante. Parmi les chefs d'inculpations présentés par la justice, Fali cite notamment le dénigrement du dogme ou des préceptes de l'Islam ; appartenance à une association non autorisée ; collecte de dons sans autorisation et possession et distribution de documents d'origine étrangère et nuisant à l'intérêt national.
Il a aussi déclaré que des condamnations et des peines avaient été prononcées à l'encontre de 123 accusés, allant de trois mois à quatre ans d'emprisonnement. Il y a eu quatre acquittements. Des représentants de la communauté ont également déclaré à l'ONG qu'au moins 17 fonctionnaires de confession ahmadie avaient été suspendus de leurs postes.
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Posté Le : 29/05/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Moncef Wafi
Source : www.lequotidien-oran.com