Algérie

Pourrissement



La Coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique (CNSAFP) a bouclé hier sa troisième et dernière journée de grève. Malgré les menaces de représailles brandies par le gouvernement dès le premier jour à l?encontre des travailleurs et la tentative sournoise du ministère de la Santé de désamorcer le mouvement de contestation dans les hôpitaux en recourant notamment à l?arbitrage de la justice, l?appel au débrayage de la CNSAFP a été massivement suivi. Bien entendu, la décision des fonctionnaires de braver les « interdits » ne résulte pas ? comme serait tenté de le faire admettre le gouvernement ? d?une volonté d?instaurer un climat de désobéissance civile pour mener une rébellion future ou pousser à un coup d?Etat. Alors là, ce n?est pas du tout le cas ! Les « troupes » de la coordination nationale des syndicats sont de simples fonctionnaires, des gens sans histoire, de respectables mères et pères de famille, qui n?en peuvent plus d?être humiliés, traînés dans la boue et payés au rabais alors que l?inflation se compte à deux chiffres depuis déjà plusieurs années. Tout ce beau monde ne demande qu?à vivre dignement et à améliorer son ordinaire. Pour ceux qui ne le savent pas encore, les grévistes comptent dans leurs rangs une grande majorité de cadres de l?Etat dont la compétence est établie qui font véritablement l?Algérie au quotidien, mais qui malheureusement sont réduits, à chaque fin de mois, soit à faire l?aumône, soit contraints, le soir venu, à se convertir en chauffeur de taxi clandestin pour pouvoir joindre les deux bouts. Eh bien oui, des experts en gestion, des informaticiens de haut niveau ou des magistrats de haut vol se voient très souvent obligés de verser dans le commerce informel, de faire des petits boulots ou de vendre des cacahuètes au bas de leurs immeubles pour payer leurs factures. Non, que le gouvernement se détrompe et se rassure à la fois... définitivement. Les fonctionnaires ne se sont pas arrêtés de travailler pour s?opposer à la révision de la Constitution ou provoquer un putsch. C?est évident, il doit y avoir certainement beaucoup de gens dans l?administration qui ne sont pas prêts à cautionner le scalp que l?on s?apprête à faire subir à la loi fondamentale du pays. Mais cela ne doit pas servir d?argument pour créer la confusion. Les gens ont fait grève parce qu?ils pensent n?avoir plus rien à perdre. C?est sans doute la lecture à faire de cette grève. Malgré la précarité dans laquelle ils se trouvent et les propos provocateurs et insultants du gouvernement qui n?a pas hésité à les traiter d?« agitateurs », les fonctionnaires ont su maîtriser leurs nerfs et mener une grève irréprochable à tous les points de vue. Mais cela risque de ne pas être le cas, à l?avenir, si l?Exécutif continue de refuser le dialogue et ne fait rien pour trouver un compromis avec les syndicalistes. Mais si la situation venait à se dégrader, le gouvernement ne pourrait en vouloir qu?à lui-même, car il aura été le seul responsable du pourrissement et de l?impasse dans laquelle il pourrait éventuellement se retrouver.


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