Pourquoi Paris a besoin d'Alger

Annoncée comme une démarche expéditive pour demander des «explications» sur la prétendue implication de notre pays dans le conflit libyen, la visite du ministre français des Affaires étrangères en Algérie s'est avérée être, au contraire, une véritable opération de charme, en ces temps de vaches maigres pour la France.
Pour lever toute équivoque, il a, dès son arrivée, exprimé un soutien sans ambages à Alger contre les accusations de la rébellion libyenne. La question est, pour les Algériens, de savoir si ce discours laudateur et très offensif d'Alain Juppé sur l'avenir des relations algéro-françaises a convaincu les dirigeants algériens ' parce que d'autres étaient passés avant lui ' et s'il peut être un prélude à une véritable relance, après le flottement entretenu depuis des années, et aider ainsi à transcender «les sujets qui fâchent», dont Juppé nie même l'existence, en préférant parler de «discussions». S'il ne faut pas toujours se fier aux déclarations publiques au ton diplomatique, parfois trompeur, d'un responsable politique de son rang, il nous parait clair que la France tient sincèrement à «ménager» l'Algérie dans cette nouvelle croisade dans la région, dans laquelle elle s'est embourbée aux côtés d'autres puissances, et cherche visiblement à se proposer ' au lieu de s'imposer ' comme partenaire fiable, durable et garant. Précédée par une visite importante de l'ex-Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, dont ce n'était pas le premier voyage en Algérie, la venue d'Alain Juppé est perçue comme le couronnement d'un effort soutenu pour arriver à assainir les relations entre nos deux pays que des gestes maladroits et des propos discourtois, de part et d'autre faut-il reconnaître, ont eu à envenimer depuis une longue période. L'objectif, on le devine, est de pouvoir conquérir «amicalement» des parts de marché en Algérie dans la conjoncture de crise endémique que traverse de la France, en essayant peut-être de profiter des faiblesses conjoncturelles, réelles ou supposées, du pouvoir algérien. Mais on voudrait bien savoir ce qu'ils ont à nous proposer, en contrepartie, pour mériter cette preuve d'amitié, en dehors d'une promesse de partenariat illisible.