Algérie

Pourquoi le report ne suffira pas à régler la crise



Il serait naïf de croire que le peuple s'échine à mettre en échec le rendez-vous électoral du 4 juillet, pour s'accommoder d'un report de scrutin orchestré par les représentants du régime.L'élection présidentielle n'aura pas lieu le 4 juillet prochain. L'enregistrement, au Conseil constitutionnel, de deux candidatures ne changera rien à cet aphorisme. L'institution dispose d'un délai de dix jours pour statuer sur les dossiers déposés puis finirait fatalement par déclarer l'absence de postulants à la magistrature, car il est difficile de supposer que deux inconnus ont réussi à collecter 60 000 parrainages alors que de grosses pointures de la politique peinent à les réunir dans des conditions normales. Inimaginable sur papier, les mécanismes de gestion d'une telle situation ne sont prévus dans aucun article de la loi fondamentale. Certains relais médiatiques et politiques du régime insinuent, cependant, dans les esprits, l'idée du report de la présidentielle sous le couvert d'un principe édicté dans l'article 103 de la Constitution. "En cas de décès ou d'empêchement légal de l'un des deux candidats au deuxième tour, le Conseil constitutionnel déclare qu'il doit être procédé de nouveau à l'ensemble des opérations électorales. Il proroge, dans ce cas, les délais d'organisation de nouvelles élections pour une durée maximale de soixante (60) jours. Lors de l'application des dispositions du présent article, le président de la République en exercice ou celui qui assume la fonction du chef de l'Etat demeure en fonction jusqu'à la prestation de serment du président de la République. Une loi organique détermine les conditions et modalités de mise en ?uvre des présentes dispositions", stipule ladite disposition. Les pouvoirs publics envisageraient de continuer à s'appuyer sur la Constitution en jouant sur un parallèle procédural.
La démarche, qui donne dans l'absolu un sursis au régime, est "irrationnelle et irraisonnée", pour reprendre les termes utilisés par le général de corps d'armée lorsqu'il a qualifié la revendication populaire portant départ inconditionnel de toutes les personnes ayant servi les quatre mandats de l'ex-président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Il est admis, aujourd'hui, que la voie constitutionnelle, défendue jusqu'au bout par Ahmed Gaïd Salah, conduit à l'impasse. Quel que soit l'artifice juridique auquel feront désormais référence les autorités nationales ? ou plus précisément le chef de l'institution militaire ?, elles ne réussiront qu'à reculer de quelques semaines l'échéance d'une période de transition dans les formes dictées par la rue. Les millions d'Algériens qui manifestent chaque vendredi ne sont pas contre un nouveau président de la République élu par les urnes. Ils ne veulent pas cautionner un scrutin organisé par ceux qu'ils appellent "la bande ou le gang", en allusion aux personnels politiques et de l'administration centrale, devenus, au fil des ans, des experts dans la fraude électorale.
Il serait naïf de croire que le peuple a mis en échec le rendez-vous électoral du 4 juillet, pour s'accommoder d'un report du scrutin orchestré par les représentants du régime qu'il combat et surtout avec une Constitution et des lois organiques (Code électoral et textes régissant les partis politiques et les associations, notamment) taillées sur mesure pour pérenniser le règne bouteflikien.
Le maintien d'Abdelkader Bensalah dans les fonctions de chef de l'Etat par intérim au-delà des 90 jours que lui accorde l'article 102 de la Constitution exacerbera inéluctablement la colère des citoyens. Même si un probable limogeage du Premier ministre, Noureddine Bedoui, sera présenté comme une concession du pouvoir en place, il gardera ses appendices dans le Parlement et dans les exécutifs des collectivités locales, sans compter les partis politiques et les médias d'allégeance.
L'option politique est l'unique issue à la crise en cours. Au moment opportun, le mouvement populaire désignera forcément ses représentants et ouvrira son chemin vers la deuxième république.
Souhila H.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)