Algérie

Pourquoi faut-il accélérer le dialogue inter-malien à Alger '



Pourquoi faut-il accélérer le dialogue inter-malien à Alger '
Les groupes politico-militaires et les autorités de Bamako devraient reprendre demain les pourparlers de paix inter-maliens, dans le cadre du dialogue inclusif d'Alger, après une pause de trois semaines, durant laquelle les évènements se sont accélérés dans le Nord-Mali. En trois semaines, le Nord-Mali a renoué avec la violence armée qui a ciblé la force de maintien de la paix onusienne au Mali (Minusma), faisant près d'une vingtaine de morts et quasiment autant de blessés. Les embuscades tendues par les terroristes et les tirs à la roquette qui ont visé les camps de la Minusma ont été attribués aux islamistes d'Ansar Eddine et au Mouvement de l'unicité pour le jihad en Afrique de l'ouest (Mujao). Ces attentats ont été différemment analysés. D'un côté, il y a les partisans de la thèse d'un redéploiement des groupes terroristes dans le nord du pays après le retrait des forces françaises de l'opération Serval et la mise en place d'une nouvelle opération Berkhane, qui intègre dans sa stratégie de lutte les pays voisins du Mali. De l'autre, il y a les opposants aux dialogues d'Alger et partisans d'une lutte militaire contre la rébellion touareg, qui accusent les mouvements du nord de laisser les terroristes agir contre la Minusma pour la pousser à partir. Ce qui permettra, selon eux, au Mouvement national pour la libération de l'Azawad (Mnla) et à ses alliés de négocier en situation de force avec les autorités de Bamako pour l'obtention d'un statut particulier pour cette région. Si l'on isole la crise malienne du contexte politique et sécuritaire régional, l'on peut admettre facilement ces deux hypothèses, constamment relayées par les médias de Bamako, qui accusent le président du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta, de négocier à Alger un plan de partage du Mali en deux pays. Mais les évènements en cours au Mali sont loin d'être limités à ce pays, puisque c'est tout le Sahel qui est devenu une véritable poudrière et un nid pour les terroristes islamistes du Mujao, d'Ansar Eddine et d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). L'opération militaire française Serval a réussi, certes, à pousser les terroristes loin de Kidal, de Gao et de Tombouctou, mais la lutte contre ces mouvements, qui se financent avec le commerce de contrebande et les enlèvements d'étrangers dans le Sahel, ne peut pas être efficace si elle n'est pas envisagée d'une manière plus étendue. La mise en place d'une base militaire «temporaire» dans le nord du Niger, à la frontière avec la Libye, a déjà permis à l'armée française de détruire un convoi d'Al-Qaïda qui allait se rendre au Mali, chargé d'armes et d'autres produits de contrebande. Autrement dit, assurée par la forte sécurité aux frontières algériennes, l'armée française essaie de concentrer ses efforts du côté sud et est de la frontière malienne, devenue une passoire pour les terroristes islamistes et les contrebandiers. Avec la multiplication des attaques contre les troupes de la Minusma, l'ONU a décidé de passer à l'action, ce qui réconforte le gouvernement de Bamako qui a réclamé plus de moyens matériels, humains et financiers de la communauté internationale, saisissant aussi l'occasion d'appeler la France à se redéployer dans le nord pour éradiquer le terrorisme. Toutefois, ces solutions sont loin d'être une clé pour retrouver une stabilité durable au Mali, un des pays les plus pauvres du continent africain et qui survit grâce à l'aide financière internationale. Car, sur le plan social, le Mali vit une situation explosive, marquée par une montée en puissance du front social à Bamako et dans d'autres villes, qui réclame de meilleurs salaires et une nouvelle stratégie sur le plan économique. L'instabilité politique et sécuritaire a détruit des centaines d'emplois et a accéléré la fermeture de petites entreprises locales qui manquaient déjà de moyens et d'argent pour survivre.Le Fonds monétaire international et la Banque mondiale avaient bloqué l'année dernière toutes les aides financières octroyées au Mali, suite à des soupçons de mauvaise gestion de cet argent et de passations douteuses de marchés publics, en ayant recours au gré à gré. Cela a créé une crise au sein des structures de l'Etat au niveau de la Fonction publique, poussant le puissant syndicat des travailleurs maliens l'Union nationale des travailleurs du Mali (Untm) à observer plusieurs journées de grèves et de protestations dans la capitale et ailleurs, en signe de contestation contre la dégradation des conditions de vie et l'érosion des salaires. Ceci, sans compter les présumés scandales financiers et le passé pas tout reluisant de certains membres de l'actuel gouvernement, qui est loin de faire le consensus au sein de la classe politique locale et du mouvement de la société civile. Face à cette crise multidimensionnelle, le président Ibrahim Boubacar Keita se retrouve face à une forte pression politique et sociale qui l'affaiblit davantage et lui laisse une faible marge de manœuvre dans les négociations d'Alger. Le Mnla et ses alliés ont d'ailleurs usé de ce contexte difficile pour consolider leurs arguments sur la «nécessaire» adoption d'un nouveau statut qui permettra à l'Azawad d'avoir plus d'autonomie dans la gestion des affaires des populations du nord, longtemps marginalisées et réprimées par Bamako. Si tous les partenaires du dialogue d'Alger sont d'accord pour le respect de l'unité du territoire malien, les groupes touaregs insistent sur l'obtention d'un statut particulier de l'Azawad, dans le cadre d'un Mali uni. Les autorités de Bamako sont conscientes que l'éradication des groupes islamistes ne peut se faire sans la signature d'une paix durable avec les Touareg du Mnla et le Mouvement arabe pour l'Azawad, ainsi que le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad. Pour ce faire, il faudra d'abord offrir suffisamment de garanties et de conditions pour la mise en œuvre de ce qui a été négocié à Ouagadougou et de ce qui sera signé à l'issue du dialogue d'Alger.L. M.




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