Algérie

Pourquoi faire émerger un troisième secteur ?


Le constat est là. Ni le secteur privé capitaliste ni le secteur public étatiste en déperdition ne remplissent socialement leur fonction. Les tares sont nombreuses, un taux de croissance dépendant exclusivement des hydrocarbures, un taux de chômage frustrant, une protection sociale mal assumée et des services de proximité inexistants. Une partie importante de la population se trouve par la force de l?incompétence exclue de l?économie malgré les efforts des pouvoirs publics.Les stratèges de l?économie restent focalisés sur cette division entre secteur public et secteur privé, sans pouvoir ou vouloir explorer d?autres voies ou entrevoir le développement du troisième secteur qui pourrait constituer la solution économique à des problèmes économiques vécus par une frange de la communauté à la recherche d?une insertion sociale. Ce troisième secteur est constitué par l?ensemble des formes d?activité économiques qui ne font pas partie des deux secteurs classiques où le profit reste le seul critère de mesure de la performance. Il est évident que les contraintes budgétaires de l?Etat ne permettent pas de relever tous les défis et satisfaire une demande socialement utile qui relève néanmoins de la sphère marchande. Le fossé se creuse de plus en plus entre ce qui intéresse le marché et ce que peut faire l?Etat d?une part, et l?ensemble des besoins des citoyens et de la société d?autre part. Cet écart ne peut être comblé que par l?existence d?un espace socioéconomique occupé par des citoyens qui apportent ensemble des réponses aux problèmes posés. Cet espace socioéconomique existe sans pour autant constituer un vecteur de progrès pour ceux qui sont sans activité parce que tout simplement il n?est pas perçu comme un gisement économique et social. Pour atténuer les chocs et contrer l?exclusion générée par l?économie de marché, l?économie sociale doit marquer des points en favorisant le développement d?un troisième secteur, garant de la stabilité et de la cohésion sociale qui se fracture de plus en plus. Si pour certains, on ne peut exister dans l?économie que si on est une entreprise vendant sa production ou ses services sur le marché, pour d?autres, par contre, énormément de choses peuvent être faites sans passer par le marché. Les véhicules juridiques de l?économie sociale existent et ils sont déclinés dans les textes en vigueur. Mieux encore, les structures ou les entités qui composent ce troisième secteur activent sur le terrain mais très souvent éloignés de leurs objectifs. Elles n?ont pas été constituées dans cette vision d?économie sociale. Il reste maintenant à leur donner une nouvelle impulsion pour ne pas les faire dévier de leurs objectifs. Un texte récent est venu enrichir très fortement les supports juridiques de l?économie sociale qui avance très lentement parce qu?elle n?est pas inscrite dans une matrice d?ensemble et elle n?est pas portée en tant que telle. C?est de la myopie économique. La différence entre l?économie sociale et le secteur économique capitaliste (dans le sens où le pouvoir et le profit appartiennent in fine au capital) se situe au niveau des objectifs poursuivis. Le plus important ne réside pas dans le profit parce que l?économie sociale a besoin aussi de surplus pour tourner mais plutôt dans le service rendu aux membres ou à la communauté. Les profits ou les excédents réalisés par les structures de l?économie sociale sont mis au service du but premier. Il est bon qu?une coopérative par exemple fasse des profits. Elle constituera une réserve pour développer des services, elle pourra aussi distribuer une partie des excédents aux coopérateurs mais pas plus qu?un certain taux parce que la finalité n?est pas la maximisation du rendement du capital. Une autre différence majeure se situe au niveau du mode d?organisation. Dans une entreprise ou une organisation d?économie sociale, le pouvoir n?est pas réparti au prorata du capital. Dans une entreprise capitaliste, c?est le principe « une action, une voix », tandis que dans une coopérative, une mutuelle ou une association, à l?assemblée générale, c?est en principe la règle « une personne, une voix ». L?économie sociale ou le troisième secteur n?est rien d?autre qu?une forme de pluralisme économique qui empêche la domination d?un seul type d?objectifs économiques et de modes de fonctionnement. C?est la possibilité d?encourager et de favoriser des citoyens de prendre en s?associant des initiatives dans des activités encore peu ou mal explorées : crèches, gardiennes encadrées des personnes âgées, etc., insertion professionnelle des personnes handicapées, les nouveaux services aux personnes (par exemple les services et soins à domicile ou les écoles de devoirs), les activités de récupération et de recyclage, le commerce équitable, l?épargne et l?investissement, etc. C?est un peu cela l?économie sociale dont on parle beaucoup mais qu?on ne perçoit pas concrètement dans les faits.
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