Les dégâts collatéraux des élections législatives du 10 mai ressemblent à s'y méprendre à des ondes tout en vibration, propagées par un séisme de moyenne intensité, comme diraient les stratèges de la militaro-diplomatie. Latent mais présent jusqu'à l'ennui, il y a d'abord ce réveil de l'urticaire du «redressement» (haraka tashihiya), en sommeil dans certains partis politiques et qui, à défaut d'être économique 'pour le plus grand bien du pays-, meuble épisodiquement la chronique politicarde. C'est que les résultats du scrutin n'ont pas eu l'heur de plaire à toutes les chapelles. L'arrivée en tête, loin, très loin devant tous les autres compétiteurs, de ce bon vieux FLN n'a pas calmé les ardeurs de son aile contestatrice, qui s'est empressée de dénier à Belkhadem tout mérite dans le succès, préférant le mettre sur le compte du président de la République. Mais qui donc est le président d'honneur du FLN et pourquoi, alors, ce ciblage précis sur la seule personne de Belkhadem ' Et les voilà derechef repartis à l'assaut du sanctuaire qui ouvre les portes du pouvoir et que les centres de décision aiment avoir à leur côté plutôt qu'à la périphérie. Le problème, c'est que, depuis la mobilisation de brigades canines et les empoignades physiques pour le contrôle des locaux du parti, l'opinion a fini par oublier pourquoi se battent les deux ailes d'une formation politique régulièrement promise au musée. Mais gageons que la gamelle de la fin des hostilités va bientôt tinter et qu'il y en aura pour tout le monde. Arrivé deuxième, avec un score d'à peine un tiers de celui de son compagnon de route et ami-rival, le RND, lui aussi, subit une réplique lointaine d'un séisme de magnitude 2 ou 3, qui l'avait frappé, au début des années 2000. Né in vitro, en pleine tourmente terroriste, le parti d'Ouyahia, ci-devant Premier ministre pour quelques jours encore, voit les choix et les méthodes de son chef contestés. Ici, le meneur apparent est, en fait, une meneuse, à la tête d'une organisation de femmes, satellite du RND. La bonne dame s'est signalée une fois, pour déclarer le casus belli, puis plus rien. Elle n'a pas omis, cependant, de faire une précision de taille, à savoir qu'elle n'est pas seule et que d'autres responsables connus du parti sont partie prenante de cette esquisse de redressement. Ces responsables, qui n'ont ni démenti ni confirmé, reprocheraient à Ouyahia ses «méthodes bureaucratiques» et sa prédilection pour une action d' «appareil», sans action «partisane réelle». Ils ont raison, au moins sur ce dernier point car, quand on refuse d'être
pris pour des apparatchiks, on joue à terrain et visage découverts. L'anonymat, dans un parti où il est normal que des dissensions et des clivages se manifestent, est précisément un des meilleurs symboles de l' «apparatchikisme»(sic). De toute façon, et si, d'aventure, Ouyahia est reconduit à son poste dans le gouvernement, les voix du redressement se tairont aussitôt. Sauf qu'entre temps, le RND devrait veiller à ce que les propos de certains de ses élus ne soient pas ceux du camelin, qui voit la bosse sur le dos de son congénère et oublie la sienne. Quand une tête de liste RND affiche une perplexité suggérant une vilénie à propos du score trop élevé du FLN, c'est un peu l'hôpital qui se moque de la charité, non ' Secoués, d'autres partis, parmi la quarantaine (excusez du peu) qui a pris part au vote du 10 mai, pour beaucoup d'entre eux dans la précipitation, l'ont été, eux aussi, mais pour des raisons qui tiennent davantage au doute, à la déception et au dépit. S'accrochant à l'antienne d'une fraude hautement scientifique et machiavélique, orchestrée par le pouvoir, ils n'ont avancé, jusqu'à présent aucune preuve formelle et indiscutable en appui à leur accusation. Il est, pourtant vrai que les conditions générales de la préparation et du déroulement du scrutin ne leur étaient pas favorables. Mais de là à incriminer, comme le font certains, le mode de scrutin (proportionnelle intégrale, avec prime au plus fort reste), c'est vraiment chercher à justifier l'injustifiable. La nouveauté les excusant quelque peu, la plupart de ces partis se montrent inaccessibles à la culture du rassemblement politique et de l'union dans la démarche. Divisés au départ, ils le seront davantage à l'arrivée. Un chef de parti, qui a reconnu avoir monnayé l'inscription sur ses listes, vient de perdre, d'un seul coup, tous ses élus, qui refusent d'obéir à son injonction de déserter la chambre basse. Un autre, évincé de deux partis qu'il avait précédemment créés, se complait dans l'anathème contre des partis qui, le connaissant, ont bien pris garde à ne pas répondre à ses appels à l'union sans lendemain. Mais il faut dire que, pour cette dernière catégorie de partis, l'onde de choc n'a rien de surprenant, car nés d'une faille tellurique et habitués à tous les avatars et à tous les échecs, pourvu qu'ils soient reconnus comme acteurs politiques. Tout n'aura pas été vain, en définitive. On a eu la forme, puisque les
nouveaux députés ont pris leurs fonctions. Le reste, ça aura été pour le fun. En attendant, le mieux est de prendre son mal en patience et d'attendre le seul redressement qui vaille, le redressement économique et social, que le système de rente a plombé pour longtemps.
A. S.
Posté Le : 27/05/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : A Samil
Source : www.latribune-online.com