Algérie

Pour ceux qui ont raté France 2


C'était l'heure du «ftour», mardi soir. Entre deux lampées de chorba, l'oeil restait rivé sur le petit écran. Pour ceux qui savaient que France 2 allait diffuser une émission sur Sarkozy et l'argent libyen. Pour les autres, voilà (un peu) de ce qu'ils ont raté...«Délinquant chevronné.» C'est le parquet national (français) financier qui, dans son réquisitoire, utilise ces mots pour qualifier l'ancien président de la République française, Nicolas Sarkozy. C'est le quotidien français Le Monde du 14 octobre 2017, qui a rapporté l'information après avoir eu accès au document, C'est en effet une affaire où la réalité dépasse la fiction. Il s'agit, vous l'avez compris, du dossier libyen où est impliqué l'ancien président de la République française, Nicolas Sarkozy. Le 21 mars dernier, vers 21 h, il a été mis en examen par la justice française pour «recel de détournement de fonds publics libyens», «financement illégal de campagne électorale» et de «corruption passive». Ce qui veut dire que le dossier contient plus que des doutes. Il faut rappeler que l'enquête avec ses multiples ramifications dure depuis la publication par le journal électronique Mediapart, en 2011, des premières révélations sur cette affaire inédite dans l'histoire politique de la France. Mardi dernier, à l'heure du «ftour», la chaîne de télévision publique française «France 2» a consacré son magazine «Cash-Investigation» (durée plus de 2 h) à cette affaire. Fruit d'une enquête journalistique qui aura duré deux longues années. Petit résumé de l'affaire. C'est en 2005 que Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur du gouvernement de Dominique de Villepin nommé par le président Jacques Chirac, se rend à Tripoli (Libye). Il rencontre sous la tente, le leader Libyen Maâmar El Gueddafi, auquel il aurait annoncé qu'il sera candidat à l'élection présidentielle française de 2007. L'information est de taille et émane d'un nouveau témoin que les journalistes de France 2 ont pu retrouver. C'est l'interprète de Gueddafi. Elle est de taille car à cette époque-là personne ne savait encore que Sarkozy allait être candidat. Et s'il s'est confié en «avant-première» au dirigeant libyen, ce n'est pas sans raison. Selon l'interprète, Sarkozy aurait sollicité l'aide de Gueddafi. Vu les capacités de la Libye sur l'échiquier international, ce pays ne pouvait répondre qu'à «une aide» financière. Rien d'autre. Gueddafi rassura Sarkozy et donna des instructions à ses collaborateurs pour «aider» le candidat français. Le premier d'entre eux est le patron des services secrets libyens, Abdallah Senouci. Arrêté en Mauritanie et extradé en Libye, il avoue au tribunal avoir versé 5 millions d'euros, via des intermédiaires, à Sarkozy. L'autre collaborateur est le chef de cabinet du leader libyen, Bachir Salah, qui reconnaît «l'aide» de 1,5 million d'euros qu'il aurait transférée à Sarkozy via des intermédiaires. On retrouve sa trace dans un versement de 500 000 euros opéré par une fondation libyenne, qu'il dirigeait, au profit de Claude Guéant, ancien ministre de l'Intérieur de Sarkozy. C'est un autre acteur de premier plan dans le système du «délinquant chevronné». Il a fait trop d'achats en liquides sans en retirer de la banque. Il a même acheté un appartement luxueux à Paris quelques jours après le versement des 500 000 euros. L'autre personnage dont le témoignage est arrivé à titre posthume dans le dossier est l'ancien Premier ministre libyen, Choukti Ghanem retrouvé mort, en 2012, dans le Danube (Autriche) où il s'était réfugié. Il a laissé cependant un carnet où il notait les versements en euros et en cash notamment dans cette affaire. Notons également qu'après son témoignage à Cash-Investigation, Bachir Saleh, le chef de cabinet qui a trouvé refuge en Afrique du Sud a été blessé, en février dernier, dans un attentat qui l'a ciblé à Johannesburg. C'est une véritable organisation qui s'est constituée autour de ce «financement illégal de campagne électorale». Il y a les intermédiaires comme Takieddine, un Franco-Libanais qui aurait transporté plusieurs fois des valises d'euros (5 millions) entre Tripoli et Paris. Ou Alexandre Djouhri, ce Français qui vient d'être arrêté en Angleterre en application d'un mandat d'arrêt. Il aurait participé au montage financier très complexe pour blanchir «l'aide» libyenne. On retrouve Eric Woerth qui était le trésorier de la campagne électorale de Sarkozy en 2007. Bref une affaire digne des plus grandes intrigues policières qui dégage une forte impression de la participation d'un autre pays étranger vu les actions qui se poursuivent (comme l'attentat de Johannesburg), le montage financier qui fait «le tour du monde», ou le cadavre que l'on découvre même dans le Danube et son carnet entre les mains de la justice norvégienne. Il ne s'agit ni d'une affaire du grand banditisme, encore moins de l'oeuvre d'un «délinquant chevronné», mais des moyens d'un Etat. En hommes, en réseaux, en violence, en omerta, etc. Certains se demandent ce que pouvait attendre Gueddafi en retour de cette supposée «aide» financière accordée à Sarkozy. Il faut juste leur rappeler qu'à l'époque Gueddafi voulait briser son isolement et réintégrer la scène politique internationale. Quelle suite aura l'intrusion de l'interprète, ce nouveau témoin' Sarkozy qui a refusé de répondre aux enquêteurs du magazine, réagira-t-il à cette nouvelle donne'
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