Algérie

Plus de 600 familles exposées à l'amianteCité Sicel de Fil-Fila


Plus de 600 familles exposées à l'amianteCité Sicel de Fil-Fila
Connue pour être hautement cancérigène et internationalement prohibé, l'amiante qui fortifie les murs de la cité risque aujourd'huide se retrouver à l'air libre devant l'état de dégradation et de corrosion avancé.
Construite en 1985, à base de charpente et d'amiante, la cité Mohamed Zendouh à Fil-Fila, plus connue sous l'appellation de Sicel en référence à l'entreprise constructrice italienne, continue d'être livrée à elle-même. Sonatrach qui l'avait érigée au profit de ses employés a vite fait de se débarrasser de cette «encombrante cité» laissant les 656 familles qui y habitent dans le désarroi total. Aujourd'hui, Sicel n'appartient à personne, ni à ses habitants ni à aucun autre organisme. «Une partie des habitants qui sont employés de Sonatrach continuent de payer leurs loyers à leurs entreprises respectives. D'autres ne payent pas de loyer pour la simple raison qu'ils ne savent pas qui est le propriétaire de leurs logements. C'est une cité dont personne n'en veut apparemment chose qui a amplifié la dégradation des 82 immeubles formant la cité et qui commencent à s'effriter», témoigne un habitant.
Effectivement, certains immeubles accusent de graves défaillances. La corrosion amplifiée par l'air marin ronge déjà la charpente métallique. «Au niveau des immeubles A3, A4, et A5, les escaliers se trouvent dans un état de dégradation très avancé chose qui a emmené les habitants de ces immeubles à opter pour le système D afin de les 'rapiécer'», affirme Abdelhamid Kaabach, président de l'association de la cité Sicel. Et de poursuivre : «La cage d'escalier de l'immeuble A 8 s'est totalement effondrée sans parler des toitures de l'ensemble de la cité qui sont devenues de véritables passoires. Les balcons risquent aujourd'hui de s'écrouler sous l'effet de la corrosion et nous commençons déjà à craindre les effets de la saison pluviale qui s'annonce. La situation s'est nettement dégradée et aucune opération de réhabilitation ou de confortement n'a été faite depuis 1985. On a sollicité plusieurs responsables pour limiter les dégâts mais à chaque fois on nous répond que juridiquement aucun organisme étatique, ni des collectivités locales d'ailleurs, ne peut intervenir car notre cité n'appartient à personne. Voilà où nous en sommes.»
La lente descente aux enfers
Devenue une cité fantôme, Sicel se détériore en silence. Cette descente aux enfers ne date pas d'aujourd'hui. Elle retrouve ses essences en 1987 quand Sonatrach qui gérait à l'époque la cité, avait décidé de retirer les employés qui en assuraient le gardiennage. Croyant que l'entreprise allait finalement leur allouer définitivement leurs logements, les habitants ont alors jubilé. Mais pas pour longtemps car par ce retrait Sonatrach venait en fait de signifier sa volonté de se désister de ce qu'elle qualifiait de fardeau sans pour autant prendre le temps d'assainir la situation de ce bien délaissé. Depuis, plusieurs tentatives de résoudre de problèmes avaient été faites sans pour autant y parvenir. En 1992, une commission regroupant la direction générale du Trésor, de Sonatrach, de l'habitat et des Domaines devait en principe parvenir à une ébauche d'un règlement. Il n'en sera rien.
En 1995, Sonatrach, acculée par les pouvoirs publics qui avaient été sensibilisés quant au marasme dans lequel vivaient les habitants de Sicel, revient une fois encore à la charge. Elle reconnaît alors « les difficultés » d'un règlement définitif quant à un éventuel transfert de la cité mais promet qu'en attendant un tel épilogue, des opérations d'entretien allient êtres engagées. En 2002, le dossier n'en finit plus de traîner. La direction générale de Sonatrach revient sur le problème de Sicel lors du conseil d'administration et lui consacre même une résolution. Celle-ci recommande d'engager les procédures de ventes des logements au profit des travailleurs de Sonatrach et d'expliquer même les modalités de cette opération. Seulement, fallait-il encore réhabiliter ces biens pour pouvoir les vendre. Sonatrach accepte d'unir ses efforts avec ceux des pouvoirs publics de la wilaya et de la daïra et accepte de prendre part à un groupe de travail qui aura à relever l'ensemble des travaux de réhabilitation à apporter à la cité.
Deux années après, madame la chef de la daïra de Skikda et une délégation de Sonatrach se rendent sur site pour estimer les travaux à y apporter. «Les gens de Sonatrach en se rendant sur les lieux ont constaté le degré de dégradation et ont certainement conclu que l'opération de réhabilitation allait leur coûter trop cher et c'est pour cette raison apparemment qu'ils n'ont plus donné signe de vie à ce jour. La résolution du conseil d'administration recommandant la mise en vente de ces logements n'a jamais été concrétisée depuis. A ce jour, la situation reste la même et les dégradations ne font que s'accentuer», remarque le président de l'association de la cité Sicel. En 2007, le dossier Sicel refait, une fois encore, surface. Le coût de l'opération de réhabilitation est finalement connu et avoisineraient, selon certaines sources proches du dossier, les 140 millions de dinars. La wilaya, afin de régler définitivement ce problème, propose de participer financièrement à l'opération mais aucune suite ne sera apportée par Sonatrach.
L'amiante qui tue
Celle-ci semble même avoir trouvé l'aubaine pour se tirer de ce bourbier en estimant qu'elle n'a fait que construire cette cité et que toute opération de réhabilitation et de maintenance incombe plutôt aux pouvoirs locaux. Entre-temps, l'amiante, telle une vermine incrustée dans les murs des immeubles préfabriqués continue de nuire à plus de 2 000 personnes qui habitent les lieux. Connue pour être hautement cancérigène et internationalement prohibée, l'amiante qui fortifie les murs de la cité risque aujourd'hui de se retrouver à l'air libre devant l'état de dégradation et de corrosion avancé. Mais que faire devant le silence de tout le monde ' La sonnette d'alarme est tirée au mois d'octobre 2012 lorsque l'association de la cité rend public un communiqué pour faire part du décès de 20 personnes des suites des effets qu'elle attribue à l'amiante.
L'association note, dans le même communiqué, que la cité était initialement construite pour ne tenir que 25 ans. «Aujourd'hui, ces immeubles ont plus de 27 années d'existence et nous continuons à y habiter avec tous les dangers que génère l'amiante», note l'association. La sortie de l'association trouve dans un premier temps écho et le wali de l'époque saisit, le 8 décembre dernier, la daïra et la direction de l'énergie et des mines pour plus d'informations. Le mois d'avril 2012, l'office public de la gestion immobilière (OPGI) se déplace à la Sicel pour y mener un recensement. Il sera relayé un mois après par une commission composé de la direction du logement et d'es équipements publics (DLEP), la direction de l'urbanisme et du CTC. Un rapport est alors élaboré mais les habitants ne voient rien venir. «On a saisi le 9 novembre dernier le nouveau wali et on espère trouver enfin une solution à cette terrible situation», déclare M. Kaâbache. L'espoir fait vivre dit-on, seulement l'amiante, elle, fait plutôt mourir. Qu'on se le dise et qu'on agisse vite'il y va de la vie de plus de 2 000 personnes.
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)