Algérie

Plus de 3 milliards de dollars d'évasion fiscale en Algérie : un danger pour la sécurité nationale



Plus de 3 milliards de dollars d'évasion fiscale en Algérie : un danger pour la sécurité nationale
Une déclaration passée presque inaperçue mais d'une extrême importance pour le devenir du pays a été faite par le ministre des Finances, Karim Djoudi, durant la mi-octobre 2011 où il a affirmé officiellement devant les députés que le préjudice pour la période allant de janvier 2010 à juin 2011 est de 110 milliards de dinars, soit près de 1,53 milliard de dollars au cours de 72 DA un dollar.
1- Si l'on prend une moyenne de 3 milliards de dollars de 2008 à 2011, seulement pour quatre années, nous aurons un montant cumulé de 12 milliards de dollars, soit 864 milliards de dinars ou 864.000 milliards de centimes. Cela donne un taux faramineux cumulé de15 milliards de dollars et une moyenne annuelle de 2% du PIB. Les analystes auraient aimé savoir la ventilation sectorielle et structurelle de ce montant par catégories socioprofessionnelles afin de calculer l'indice de concentration du revenu national au profit d'une minorité rentière. Il est utile de rappeler que, déjà, pour 2009, l'Union des commerçants algériens analysant la situation de la sphère informelle l'évaluait à plus de 2,5 milliards de dollars. Cette sphère contrôle plus de 65% des segments de produits de première nécessité auxquels plus de 70% des ménages consacrent pres-que l'intégralité de leurs revenus (marché fruits et légumes, poisson, viande rouge et blan-che, textile et cuir ) et plus de 40% de la masse monétaire globale en circulation. Cette dernière a été évaluée dans le dernier rapport de la Banque d'Algérie à 2.439 milliards de dinars fin 2010, donnant ainsi 976 milliards de dinars. Ainsi, la sphère informelle contrôlerait au cours de 72 dollars un dinar, 9,75 milliards de dollars. Aussi, il semble que le montant de l'évasion fiscale donné par le ministre des Finances soit largement sous-évalué. Ce sujet très sensible de l'évasion fiscale appelle deux observations. 2- L'Algérie est une économie rentière dominée par la fiscalité des hydrocarbures qui fluctue selon la conjoncture entre 75 et 60%. Pour les données récentes, les recouvrements de la fiscalité ordinaire de l'Algérie ont été de 10,76 mds de dollars au 1er semestre 2011 et celle de la fiscalité pétrolière, hors Fonds de régulation des recettes (FRR), à 20,4 mds USD (61,24% du budget de l'Etat ), données de l'organe officiel APS citant la Direction générale des Impôts (DGI). Aussi la solution de facilité du fait de rentrées faciles ne provenant pas du travail mais de la rente est de fermer les yeux sur les rentrées fiscales hors hydrocarbures et de distribuer des revenus sans contreparties productives pour une paix sociale fictive. En cas de difficultés financières, l'on taxera les revenus fixes (retenues à la source des travailleurs et cadres) et les activités visibles. Mais, devant l'injustice fiscale, ils iront grossir la sphère informelle. Cela ne peut que conduire le pays à terme à la dérive, la population algérienne étant en 2011 de 36 millions et sera dans 25 ans 50 millions mais sans hydrocarbures - entendu en termes de rentabilité économique. 3- Un système fiscal rénové doit être au c'ur d'une véritable politique de développement intimement lié à la réforme globale, qui doit concilier l'efficacité économique et une profonde justice sociale. La dominance de l'économie algérienne est le cash et les transactions informelles qui favorisent la corruption. Cela constitue un frein à la généralisation des transactions par chè-ques ou carte électronique. La dialectique des liens entre la logique rentière et l'extension de la sphère informelle favorise l'évasion fiscale et constitue un véritable frein au véritable développement hors hydrocarbures. C'est que l'économie moderne repose sur deux fondamentaux : le crédit et le contrat. Il existe une loi fiscale : la progressivité de l'impôt direct traduit le degré de citoyenneté et l'importance de l'Etat régulateur stratégique en économie de marché, les impôts indirects étant souvent la solution de facilité, injustes par définition puisque touchant toutes les couches sociales sans distinction, comme pour les subventions généralisées. Concernant justement les subventions et l'explosion de la facture d'importation des produits alimentaires (100% d'accroissement entre 2009/2011 l'atteste), l'Algérie, ramenée à la population, est un des plus gros importateurs de blé au monde. Cela s'explique certes par la pression démographique, la détérioration du pouvoir d'achat (les ménages pauvres consommant de plus en plus de céréales et de lait subventionnés), la faiblesse de la production et de la productivité intérieure mais également par le bas prix qui favorise le gaspillage et la distorsion du taux de change de pays riverains qui favorisent les importants trafics aux frontières. La solution réside dans des mécanismes de régulation clairs, renvoyant au rôle stratégique de l'Etat régulateur, l'économie de marché concurrentielle ne signifiant pas anarchie, étant impossible de mettre sur pied une armée de douaniers, de contrôleurs du fisc et des prix. Bref, la lutte efficace contre la fraude fiscale renvoie à l'approfondissement de la réforme globale, donc un Etat de droit et une bonne gouvernance (une profonde moralisation de la société) reposant sur le savoir et les entreprises compétitives devant tenir compte tant des mutations mondiales (mondialisation) que des transformations sociales, économiques et politiques internes.


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