Les Egyptiens continuaient dimanche de réclamer massivement le départ de
Hosni Moubarak et la fin de son régime. Les tentatives du régime de reprendre les
choses en main ne résistent pas à ce déferlement.
Signe que les choses s'emballent, des journalistes d'Al Ahram ont signé
une déclaration appelant à la fin du régime. Les Etats-Unis continuaient d'être
embarrassés par la radicalité des exigences des Egyptiens qui veulent en finir
avec un de ses plus importants alliés dans la région. Les derniers changements
introduits par Hosni Moubarak – désignation du patron des services Omar
Souleimane comme vice-président et d'un ancien général à la tête du gouvernement
– n'ont eu aucun impact sur la révolte des Egyptiens. Elles ont au contraire
avivé la mobilisation des Egyptiens. Pour eux, le régime se livre à des
manÅ“uvres. Les actes de pillage et de destruction menés par des bandes
organisées sont désormais perçus comme une tentative du régime de créer les
conditions d'une répression violente. Que l'armée, sans basculer du côté de la
population, ne semble pas prête d'assumer. De fait les choses se sont
accélérées. Le «vendredi de la colère» a entrainé un passage de l'état de
révolte contre le régime à une situation révolutionnaire. Une évolution
qualitative radicale qui met dans un embarras total les Américains et les
Occidentaux soucieux avant tout de préserver les intérêts d'Israël et la
neutralisation de l'Egypte sur l'échiquier régional. Les Egyptiens n'avaient
pas respecté le couvre-feu samedi. Ils ont continué à occuper la place Etahrir
– la bien nommée ! -.
La fin du régime et rien de moins !
Hier, malgré les violences et les psychoses orchestrées, les Egyptiens
ont à nouveau déferlé dans le centre du Caire et dans de très nombreuses villes
du pays pour réclamer le départ de Moubarak, pour rejeter ces dernières
décisions et pour exiger la fin du régime. Ils continuaient encore, après
l'entrée en vigueur du couvre-feu, d'occuper l'espace public pour renvoyer le
régime tandis que les habitants s'organisaient pour se défendre des bandes de
pillards qui cherchent à créer un climat d'insécurité généralisé. Face aux
désordres que d'aucuns pensent orchestrés par le régime, les Egyptiens
agissent. Et pour cause, la police, honnie par les gens, a disparu des rues du
pays, laissant le champ libre aux pillards. L'armée assurait la protection des
principaux bâtiments publics et des musées. Le musée du Caire, défendu par les
citoyens contre les pillards, est sous contrôle de l'armée qui a été déployée
autour d'autres sites archéologiques d'importance comme les pyramides de Gizeh
ou le temple de Louxor. Des milliers de prisonniers se sont évadés de la prison
de Wadi Natroun, à 100 km au nord du Caire. Parmi eux, des dirigeants des
Frères musulmans. Aux abois, le pouvoir égyptien a décidé la fermeture du
bureau de la chaîne Al-Jazira au Caire, et la révocation des accréditations de
tous ses journalistes dans le pays. Les autorités égyptiennes ont directement
bloqué la diffusion de la chaîne dans l'ensemble du pays. La chaîne, dont le
rôle a été considérable, a dénoncé une attaque contre la liberté d'expression.
Le pouvoir semblait sonné par l'ampleur du dégoût qu'il inspire aux Egyptiens.
La télévision égyptienne avait fait état d'une visite du président Moubarak au
centre opérationnel des forces armées et d'une réunion entre Hosni Moubarak, le
vice-président Omar Souleimane, le ministre sortant de la Défense, Mohamed Hussein
Tantawi, et le chef d'état-major, Sami Anan. Des avions de chasse ont survolé
le Caire à très basse altitude à plusieurs reprises.
El Baradeï : Moubarak doit partir aujourd'hui !
Les forces d'opposition, des Frères musulmans aux organisations de gauche
en passant par les libéraux se sont mis au diapason de la rue et exigent le
départ de Moubarak. L'opposition regroupée dans la Coalition nationale pour le
changement a désigné l'ancien patron de l'AIEA et prix Nobel de la paix,
Mohamed ElBaradei de «négocier» avec le régime. «Des groupes politiques
soutiennent El Baradeï afin qu'il négocie avec le régime», a dit Essam
el-Eryan, un des dirigeants de la confrérie islamiste, à la chaîne de
télévision Al Djazira. ElBaradei qui a fixé l'ordre de priorité immédiat :
«Chacun en Egypte le dit de manière forte et claire: Moubarak doit partir
aujourd'hui», a déclaré Mohamed El Baradeï, l'ancien directeur général de
l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dans une interview
accordée à la chaîne CNN. Il a encore fustigé l'attitude du gouvernement
américain qui cherche, à défaut de sauver Moubarak, de préserver un régime
allié et vassal. «Les Etats-Unis perdent de la crédibilité jour après jour en
soutenant le régime de Moubarak» a-t-il déclaré. Les Américains sont soucieux
de contenir la poussée révolutionnaire et de préserver les intérêts d'Israël,
cherchent une transition contrôlée par le régime. Hillary Clinton, la chef de
la diplomatie américaine, a demandé «instamment au gouvernement Moubarak, qui
est toujours au pouvoir (...), de faire ce qui est nécessaire pour faciliter ce
genre de transition ordonnée». «Nous voulons assister à des élections libres et
équitables, et il nous semble que ce sera l'un des aboutissements de ce qui se
passe en ce moment en Egypte», a-t-elle indiqué sur NBC.
Les Egyptiens maintiennent la
pression. Un bilan provisoire fait état de 120 morts pour la seule journée de
vendredi dont 18 enfants et 3700 blessés. Le nombre des victimes serait
beaucoup plus important. L'association des ulémas que dirige l'imam Qaradhaoui
qui a invité Moubarak à partir a décidé que les victimes de la répression
avaient le statut de martyrs. Hier soir, dans un climat très combatif, les
Egyptiens s'apprêtaient à passer une nouvelle nuit place Etahrir. Ils ont été
rejoints par El Baradei dont le discours s'est radicalisé. Au rythme de la
montée de la colère des Egyptiens contre Moubarak et son régime.
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Posté Le : 31/01/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com