Algérie

Pluies, végétation abondante, aliments de bétail moins chers... Qu'est-ce qui peut convaincre les maquignons ?


A quelques semaines de l'Aïd El-Kébir, la conjoncture actuelle n'a jamais été aussi favorable pour les maquignons qui semblent garder, désormais, leurs «têtes» bien froides. La «bonne saison» des affaires s'annonce donc prometteuse pour les éleveurs qui ne pouvaient mieux espérer après les dernières averses du mois d'octobre suivies d'une baisse soutenue des aliments de bétail. L'avènement des premières pluies a généré la végétation, garantissant ainsi une alimentation abondante mais, surtout, à moindre coût pour le cheptel. Les averses et la baisse des températures ont également anéanti tout risque de transmission de maladies virales comme la «blue tongue» qui a fait des ravages l'année dernière causant la perte de milliers de têtes en l'espace de quelques semaines. Les moustiques, vecteurs de transmission des maladies virales, ne supportent pas les basses températures sous 10° degrés Celsius et les wilaya des Hauts Plateaux comme El-Bayadh, Djelfa et Tiaret, réputées pour l'élevage ovin, se trouvent ainsi épargnées. Cette clémence du ciel, qui ne pouvait mieux tomber, s'est répercutée sur les prix des aliments de bétail qui ne cessent de dégringoler atteignant des seuils tolérables. Le quintal de son et d'orge qui avait dépassé la barre symbolique des 2.000 dinars est revenu au seuil tolérable de 1.400 dinars, soit une baisse de 30% en seulement quelques semaines. Celui à base de maïs ou de soja, qui était cédé durant la saison d'été à 2.000, voire à 2.200 dinars, est proposé, actuellement, jusqu'à 1.600 dinars. La botte de fourrage, qui a atteint l'année dernière le seuil intolérable de 400 dinars, est proposée, aujourd'hui, à seulement 180 dinars, alors que celle de paille est cédée à des prix en dessous des 120 dinars. Avec la régénération de la végétation et notamment dans les wilayas du Sud-Ouest (Béchar, Naâma, Aïn Sefra et El-Bayadh), les éleveurs se sont empressés de transhumer vers ces régions pour s'assurer des pâturages à moindre coût pour leurs bétails. Ce qui explique l'effondrement des prix des aliments de bétail à cause de la baisse de la demande sur ce genre d'aliments utilisés essentiellement dans l'engraissement du bétail dans les périodes de sécheresse. Cette conjoncture plus que favorable ne fait pas seulement le bonheur des grands éleveurs mais même des petits éleveurs et surtout les «moualas» de circonstance trouvent leurs comptes. Une situation qui risque d'être mise à profit par les spéculateurs qui ne laisseront pas passer l'occasion cette année pour faire grimper au maximum les prix. Pour l'instant, les prix des moutons restent stables et à la portée des bourses moyennes. Cependant, à plus d'un mois de la fête du sacrifice, il faut surtout se garder de se réjouir puisque nos «moualas» de circonstance nous ont habitués ces dernières années à frapper fort au moment opportun. Les revendeurs et les maquignons de saison ont, d'ailleurs, reconquis les marchés à bestiaux pour s'approvisionner en prévision de l'approche de la «bonne saison». Notre virée dans les abattoirs communaux d'Oran nous a fait constater que la majorité des acheteurs sont en fait des revendeurs qui viennent s'approvisionner en gros. Certains d'entre eux, qui possèdent des garages ou les louent pour la circonstance dans les périphéries de la ville comme à Aïn El-Beïda, Bir El-Djir ou Haï Bouâmama, sont déjà en «bottes» à la recherche de la bonne occasion. Le prix de gros de l'agneau de taille moyenne est entre 9.500 et 11.400 dinars, alors que le prix de détail peut atteindre les 12.500 dinars. Un bon négociateur peut avoir l'agneau de ses rêves à seulement 11.000 dinars. Le prix de gros du bélier, bête idéale de sacrifice avec des cornes bien pointues, est proposé entre 15.000 et 17.000 dinars, alors que son prix de détail ne dépasse guère les 18.000 dinars. Ces prix pratiqués dans les abattoirs communaux d'Oran ne reflètent pas fidèlement la situation du marché, puisque ceux pratiqués dans les marchés à bestiaux des wilayas de l'intérieur comme El-Bayadh et Tiaret restent moins de 2.000, voire de 4.000 dinars. Difficile ainsi de trouver moins cher et cette année, sauf imprévu de dernière minute, le mouton devra être à la portée de toutes les bourses. Toutefois, on doit garder à l'esprit le scénario de l'année passée où en seulement une semaine de la fête du sacrifice, les spéculateurs ont fait grimper au maximum les prix à des seuils intolérables. Des connaisseurs du marché à bestiaux avouent que toutes les conditions sont favorables pour les «spéculateurs» dans un marché objet de toutes les fluctuations. D'abord il y a la crainte «légitime» des grands éleveurs à venir vendre, au détail, leurs moutons dans les grandes villes en raison de l'insécurité et la hausse des vols à l'arme blanche. L'année dernière, des dizaines de vols avec agression à l'arme blanche et parfois avec des armes à feu ont été enregistrés à travers le territoire national et certains éleveurs y ont même laissé la vie en essayant de défendre leurs troupeaux. Il est plus sûr ainsi de vendre en gros son bétail à des intermédiaires au lieu de s'exposer aux risques des vols et des agressions. Les grands éleveurs préfèrent également la vente en gros, puisqu'elle leur permet d'éviter de rester plusieurs jours dans les marchés à bestiaux des grandes villes et leur permet, ainsi, d'épargner les frais de gardiennage et autres. Il y a ensuite le prix de la viande qui ne cesse de prendre l'ascenseur ces derniers mois dépassant les 600 dinars et atteignant, chez certains bouchers, les 700 dinars le kilo tout-venant. Cette hausse qui n'obéit à aucune logique économique laisse perplexe plus d'uns puisqu'il est impossible d'expliquer cette tendance à la hausse alors que les prix des aliments de bétail ne cessent de dégringoler et il existe une grande abondance dans le cheptel. Le kilo de côtelettes, prisées pour les grillades, est proposé au marché de M'dina J'dida à 680 dinars alors que d'autres parties de l'agneau comme l'épaule sont cédées à pas moins de 650 dinars. Le kilo de filet est proposé, selon le boucher, entre 680 et 700 dinars. Les prix de la viande bovine ont également pris une centaine de dinars de plus frôlant ainsi la barre symbolique des 900 dinars le kilo. Le kilo de rumsteck est cédé à 900 dinars, alors que celui de bifteck est proposé à 860 dinars. Les prix des autres parties comme l'épaule ou les côtes varient entre 850 et 900 dinars le kilo. Cette tendance à la hausse des prix de viande dans les marchés rassure les éleveurs qui ne sont pas ainsi pressés à se «débarrasser» de leur cheptel. Selon un connaisseur du marché, avec un prix fort de la viande, une baisse des charges liées à l'alimentation du bétail et la prolifération des intermédiaires dans les marchés à bestiaux des grandes villes comme Oran et Alger, la tendance des prix va sûrement à la hausse dans les prochaines semaines. On doit s'attendre, désormais, à une forte offensive des spéculateurs qui se frottent déjà les mains dans un marché où les instances chargées du contrôle des prix sont les seuls grands absents.
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