Algérie - Revue de Presse

Planter un arbre c’est bien, l’entretenir c’est mieux



Publié le 28.10.2024 dans le Quotidien le soir d’Algérie

DJAMILA SEDDIKI

La Journée nationale de l’arbre a été célébrée dans la wilaya de Tipaza, comme à l’accoutumée, par la mise en terre de centaines de plants de diverses variétés. Cette fois, le site retenu a été la forêt de Bourouis, située dans la commune de Meurad, contrairement aux années précédentes où le site du barrage de Boukourdane était la destination privilégiée des responsables du secteur.
Ces opérations de repeuplement des espaces forestiers et autres, ô combien nécessaires, seraient plus efficaces si elles faisaient l’objet d’un suivi et les arbustes entretenus car, malheureusement, faute d’entretien, les efforts des responsables et de la société civile (toujours présente dans ce genre de manifestations) ne sont pas récompensés, puisque les plants sont, soit arrachés par des riverains, soit disparaissent, faute d’arrosage en particulier dans les espaces urbains. L’exemple le plus parlant est celui des ronds-points et de l’espace vert situé le long de la bretelle, menant de l’autoroute au chef-lieu de wilaya, qui a fait l’objet de plusieurs opérations de plantation de végétaux, qui se sont fanés et qui, hélas, sont loin d’offrir de belles images de plantes agrémentant le regard de l’automobiliste. Une entreprise chinoise avait même réalisé un rond-point vert à l’entrée-est, offert à la commune de Tipaza. Sitôt celle-ci partie (car ayant achevé ses projets), ce jardin est tombé en désuétude dans l’indifférence générale. Un ex-maire, interpellé par une journaliste sur cet état de fait, répondit que c’était « le jardin des Chinois pas le nôtre ». Les exemples sont, hélas, innombrables et même la création d’une Epic chargée des espaces verts n’a rien apporté de nouveau car étant loin de répondre à son cahier des charges. Le choix des espèces inadaptées, le manque de professionnalisme des travailleurs de ladite Epic recrutés dans la précipitation sont, certainement, pour beaucoup dans ces mauvais résultats.

L’été le plus clément, en matière de feux de forêt, depuis l’indépendance

Heureusement que, parfois, la nature fait bien les choses. La bonne nouvelle, cette année dans la wilaya de Tipaza, est celle relative à la baisse des feux de forêt, contrairement aux années précédentes qui ont été catastrophiques. Selon les responsables de la Conservation des forêts, la wilaya a connu l’été le plus clément depuis l’indépendance. En effet, lors des 4 premiers mois de la saison estivale (du 1er mai au 31 septembre), il a été enregistré, à peine, 14 incendies même si celui du 24 septembre qui s’est déclaré à Sidi Semiane (daïra de Cherchell) a provoqué des sueurs froides, puisqu’il a fallu faire appel à un bombardier d’eau qui a été d’un grand secours pour circonscrire le feu. Selon la Conservation des forêts, ce bilan est unique et à marquer d’une pierre blanche comme on dit. Pendant 4 mois, et malgré un été caniculaire, seuls 13 foyers d’incendie ont été enregistrés qui ont parcouru une surface forestière de près de 5 hectares (représentant 0,77 ha de pins d’Alep, 2,06 ha de maquis et 2,08 ha de broussailles), alors que les deux années précédentes, le feu a détruit plus de 4000 ha de forêt dont 3500 ha en 2022. Le bilan définitif de la saison 2024 sera fait à la fin du mois d’octobre qui clôturera la saison des feux mais on peut dire d’ores et déjà que celui-ci est largement positif. Il n’est pas inutile de rappeler que l’année la plus clémente, ces 10 dernières années dans la wilaya, remonte, selon la Conservation des forêts, à 2018 qui a enregistré 110 ha détruits par les feux.

Comment expliquer cette baisse des incendies ?

Cette situation est d’autant plus inédite que la wilaya a connu un été caniculaire, avec plusieurs pics de plus de 40 degrés et une absence totale de pluviométrie. Les responsables, bien sûr, se veulent optimistes (en espérant rééditer cette situation l’année prochaine), tout en l’expliquant par la combinaison de plusieurs paramètres, dont celui d’une meilleure coordination entre les secteurs et services concernés par le dispositif de lutte contre les incendies, avant et pendant la campagne. Le souvenir du mont Chenoua en flammes en 2023, pendant près de 2 semaines, a, aussi, marqué les esprits, puisqu’il est complètement dégarni en certains endroits et a du mal à se régénérer, faute de pluie. De plus, il a fallu faire appel aux éléments de l’ANP qui ont utilisé leurs hélicoptères, pour aider à éteindre la vingtaine de foyers d’incendie déclarés. Les autres explications, sur cet été clément pour les forêts, se résument en une meilleure sensibilisation, selon les forestiers et la Protection civile, sur le nouveau cadre juridique plus contraignant et sévère contenu dans la loi 23-21 relative aux forêts et aux richesses forestières. Le durcissement des peines, en cas de provocation criminelle ou involontaire des feux de forêt, a dissuadé tout citoyen qui projette d’allumer un feu, même involontairement. D’autres mesures, dont celle de la mise en place d’un poste de commandement opérationnel de lutte contre les incendies, installé, depuis le 1er mai au niveau du champ de tir du Chenoua, ont, aussi, beaucoup aidé. Ses missions sont de mobiliser, en permanence, des brigades mobiles pour sillonner, surveiller les forêts et prévenir les incendies, ce qui permet d’engager une intervention rapide. Ce dispositif de sentinelles, fixes et mobiles, sera complété par la réception de 6 postes de vigie, en plus des 9 déjà opérationnels, très utiles pour détecter les départs de feu à des kilomètres à la ronde. Il sera fait appel, aussi, aux drones avec des caméras embarquées pour sillonner, préventivement, les massifs forestiers. D’autres mesures ont été peaufinées avant le lancement de la campagne anti-feux comme la mise en place de nouveaux points d’eau (destinés, aussi, aux animaux en errance dans la forêt), la réalisation de nouvelles tranchées pare-feu sur une surface de 212 ha, en plus de l’aménagement des 139 ha existants, et l’ouverture de plus de 52 km de nouvelles pistes qui s’ajoutent aux 70 km existants pour stopper la propagation des feux. Le domaine forestier de la wilaya de Tipaza couvre une superficie de 40.315 ha, dont 28% appartenant à des privés. Les pinèdes représentent 57% de la surface totale des forêts, suivies de 17% de chêne vert, 17% de maquis et 6% de chêne-liège.

Vers l’utilisation du premier détecteur de feux de forêt à distance 100% algérien

Les nouveaux moyens techniques peuvent venir à la rescousse du secteur qui utilise déjà les drones avec caméras embarquées. Ce sera, peut-être, le cas du premier détecteur de feux de forêt à distance conçu et développé, entièrement, en Algérie. Le système, expérimenté au niveau du pôle urbain de la wilaya voisine à Médéa, est une «station fixe équipée d’un émetteur d’impulsion optique couplé à un mécanisme rotatif sophistiqué. L’intérêt de ce détecteur réside dans sa capacité à scanner l’horizon sur un rayon de 10 à 30 kilomètres permettant une détection précoce des fumées, signes avant-coureurs d’un départ de feu, offrant ainsi un temps de réaction précieux aux services de lutte contre les incendies». Toujours selon son concepteur, ce système «ne se contente pas de repérer les incendies. Il fournit des informations cruciales telles que la localisation précise du foyer et les voies d’accès les plus proches, optimisant ainsi l’efficacité des interventions».
D. S.




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