Le désert n'avance pas, il surgit après quelques épisodes d'inondations/sécheresses
Contrairement à une croyance répandue, le désert n'avance pas d'un pas décidé. La désertification résulte de la dégradation des sols, rendant impossible la croissance des plantes. Les vents et les pluies, incapables de s'infiltrer dans ces terres endommagées, emportent les couches superficielles, ne laissant derrière eux que des cailloux. Ce phénomène, déjà observable en Kabylie à la plus haute pluviométrie, risque de s'aggraver si les forêts continuent de brûler et si aucune mesure de rétention et de conservation des eaux de pluie n'est mise en place.
Un avenir sombre pour la Mitidja
La région fertile de la Mitidja pourrait bien devenir désertique si les pratiques agricoles actuelles persistent. Monoculture, herbicides, pesticides, érosion des terres... autant de facteurs contribuant à la dégradation des sols. L'introduction de l'agroforesterie et de haies protectrices contre les ruissellements pourrait inverser cette tendance.
Redonner vie aux oasis
Paradoxalement, même en plein désert, des oasis peuvent prospérer grâce à des pratiques ancestrales telles que l'agroforesterie, la rétention des eaux, le compostage et le recyclage des déchets. En réinstaurant ces méthodes, nous pourrions transformer des étendues arides en oasis florissantes.
«Planter l'eau» : une approche innovante
Face au problème croissant de la sécheresse, il est impératif de réviser le programme de barrages verts. Comme l'a popularisé Brad Lancaster, pionnier de la récupération des eaux de pluie en Arizona, il faut «planter l'eau» avant de planter des arbres. Zephaniah Phiri Maseko, un écologiste zimbabwéen reconnu, enseignait qu'il fallait d'abord planter la pluie. Cette approche, combinée aux techniques de conservation des eaux et de gestion durable des sols, pourrait transformer notre paysage.
Apprendre des succès mondiaux
Des pays comme le Kenya, le Rwanda, le Zimbabwe, le Burkina Faso et l'Éthiopie ont démontré qu'il est possible de restaurer les sols et de gérer durablement les eaux de pluie. Le projet de régénération du Plateau de Loess en Chine, la revitalisation du bassin aride d'El Bayadha en Arabie Saoudite, et la permaculture appliquée par Geoff Lawton en Jordanie sont autant d'exemples inspirants. Pourquoi ne pas appliquer ces leçons en Algérie ?
Une gestion globale et intégrée de l'eau
Pour résoudre nos problèmes d'eau, de sécheresse, et de désertification, une vision globale et intégrale de la gestion durable de l'eau est nécessaire. Cela implique la collaboration entre les différents secteurs : agriculture, environnement, ressources en eau, forêts, aménagement du territoire, urbanisme, enseignement supérieur, éducation et culture. Il est crucial de mettre à jour les connaissances et de mobiliser les énergies pour des actions coordonnées.
Des solutions simples et efficaces
Les inondations annuelles et la sécheresse résultante montrent l'inefficacité de nos infrastructures actuelles. Des mesures simples comme creuser des cuvettes, des fossés, des tranchées d'infiltration, des demi-lunes, construire des obstacles en pierre perpendiculairement aux ruissellements peuvent limiter les inondations, maximiser les infiltrations et irriguer les pâturages.
La technique zai, qui consiste à creuser des demi-lunes inversées pour planter des arbres et des herbes, peut transformer des zones arides en forêts verdoyantes.
Restauration des écosystèmes dégradés
La régénération des oasis dégradées au Sud, l'extension de leurs périmètres en utilisant des techniques traditionnelles, et l'arrêt du déversement des eaux usées dans ces oasis sont des actions prioritaires. La phytoépuration, simple et efficace, peut verdir et épurer les eaux usées, comme le montrent de nombreux exemples en France.
Des ceintures vertes pour nos agglomérations
Autour de chaque agglomération, des ceintures vertes irriguées par des eaux usées épurées par des roseaux peuvent offrir de multiples avantages : parcs de détente, agriculture maraîchère, bassins de rétention des eaux pluviales, terrains de pâturage, arboriculture... Ces ceintures vertes sont essentielles pour lutter contre la sécheresse et la désertification.
Une nouvelle vision de l'urbanisme
Planter de l'eau dans les steppes, les déserts, les montagnes, les villes et les villages révolutionne l'urbanisme, et l'aménagement du territoire. La ville éponge, capable d'absorber les eaux pluviales grâce à une infrastructure verte, est une vision d'avenir. Plutôt que de forer pour irriguer des arbres alors que les humains ont soif, il est essentiel de stopper les ruissellements destructeurs par des mesures de récolte des eaux de pluie.
La phytoépuration : une solution d'avenir
La phytoépuration, technique utilisée par des communes françaises et même des écoles à Washington, doit être promue en Algérie. Les lobbies d'importation ne doivent pas compromettre des solutions rationnelles et durables pour la gestion de l'eau.
Planter des arbres en agglomération
Les arbres en pleine agglomération sont nécessaires pour lutter contre les îlots de chaleur urbains et la sécheresse. Planter des palmiers ne suffit pas ; il faut des arbres, à grand feuillage, offrant de l'ombre, et contribuant à un environnement plus frais et agréable.
Conclusion
Planter de l'eau est une problématique cruciale pour régénérer les écosystèmes et lutter contre la sécheresse et la désertification. Il est temps d'adopter des solutions préconisées par les scientifiques de changement de paradigme de l'eau, et de s'inspirer des succès mondiaux pour assurer un avenir durable à notre pays.
*Kenadza. Bechar. Architecte-Urbaniste depuis 1993, de l'université Mouloud Maameri de Tizi-Ouzou.
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Posté par : presse-algerie
Ecrit par : un Président qui joue aux apprentis-sorciers
Source : www.lequotidien-oran.com