Rome, correspondant - Les chewing-gums sont-ils "le" problème de Rome ? C'est le genre de nouvelle qui fait le tour du monde en quelques clics sur Internet. En déclarant la "guerre" au chewing-gum, le maire de Rome, Gianni Alemanno (droite), et son service de nettoyage (Ama) se sont provisoirement accordé un brevet de propreté et de lutte acharnée contre la pollution urbaine. Et lancé une belle opération médiatique. C'est la propre épouse de l'édile, Isabella Rauti, qui est à l'origine de l'initiative avec son association Noi per Roma ("Nous pour Rome"). Le maire de la capitale italienne est souvent attaqué pour son "immobilisme" et la réputation de l'Ama a été ternie par un scandale de népotisme.
Le 13 décembre, une petite armée de volontaires et d'employés municipaux a donc lancé une guerre éclair contre la gomme à mâcher, devenue pour un jour le problème numéro un de la capitale italienne. Rassemblée sur la place Largo Argentina, cette escouade a gratté et récuré quelque 500 mètres de voie publique. Pas de quartier : les restes verts à la chlorophylle ou roses à la fraise ont été traqués sur le bitume ou sur le travertin des bancs publics. Une deuxième offensive a eu lieu samedi 17 décembre.
"C'est évidemment une opération symbolique, qui ne résout pas le problème, a reconnu Mme Rauti avec modestie. Mais elle a un impact culturel notable. Vu le temps que met un chewing-gum à se décomposer, les gens qui les collent sur du marbre ou les jettent par terre devraient y réfléchir à deux fois avant de le faire."
Promu spécialiste mondial de la vie et de la mort du chewing-gum, Piergiorgio Benvenuti, le patron de l'Ama, a fourni quelques chiffres à faire froid dans le dos : "Chaque jour à Rome, 15 000 gommes à mâcher sont jetées dans les rues et même sur les sites archéologiques ; chaque année, on se retrouve avec 5,54 millions de chewing-gums dans les rues. Ils sont très polluants et mettent cinq ans à se dégrader. Chaque intervention pour retirer un chewing-gum nous coûte un euro, soit 5,5 millions d'euros par an."
Sale "comme Calcutta"
La propreté de la capitale est un problème récurrent. En mai 2009, Silvio Berlusconi, alors président du conseil, avait jugé que "Rome était sale comme une ville africaine". Un élu de la Ligue du Nord avait estimé qu'elle était "comme Calcutta". Reste que le problème du chewing-gum ne paraît pas le plus urgent. En septembre, l'association écologiste Legambiente a publié les conclusions d'une enquête sur la propreté de la Ville éternelle. Hormis le centre historique balayé chaque jour, les quartiers plus périphériques souffrent d'une attention plus relâchée de la part des services publics. Faute de moyens, de nombreux espaces verts sont laissés à l'abandon. "Il y a encore, écrit l'association, trop de lieux qui ne sont jamais nettoyés, sans parler des poubelles qui débordent."
L'Ama a lancé, depuis un peu plus d'un an, un service de ramassage d'ordures quotidien à partir de 7 h 30 du matin pour les habitants du centre-ville. Chaque citadin est invité à jeter ses poubelles dans un petit camion au coin de sa rue. Force est de constater que les premiers véhicules n'arrivent pas avant 8 heures, voire plus tard. Mais faire arriver une benne à l'heure est probablement moins médiatique que de faire disparaître un reste de chewing-gum.
Philippe Ridet
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Posté Le : 21/12/2011
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Le Monde / 19 décembre 2011
Source : Le Monde.fr