Dans le Tarn, des poissons se sont mis à chasser... le pigeon, révèle une étude française. Certains des poissons en question en ont même fait leur spécialité et s’en nourrissent à 80%.
C’est la première fois qu’on observe des poissons d’eau douce se nourrir d’oiseaux. Pourtant, la chose n’est pas qu’anecdotique comme l’a vérifié une équipe de scientifiques français du Laboratoire Ecologie fonctionnelle et Développement. Dans l’étude qu’ils publient dans PLoS ONE, les chercheurs ont étudié des silures glanes, le plus gros poisson d'eau douce d'Europe, qui est arrivé dans le Tarn (la rivière) en 1983.
Ainsi, entre juin et octobre 2011, l'équipe scientifique a dressé un poste de surveillance depuis un pont sur le Tarn, à Albi. Ils ont procédé à l'observation (à raison de 24 fois une durée de 3 heures) d’une petite île caillouteuse au bord de laquelle les pigeons se regroupaient pour boire et faire un brin de toilette. Au cours de ces observations, les chercheurs ont alors non seulement confirmé cette chasse mais aussi constaté son efficacité : ils ont comptabilisé 54 attaques de silures dont 15 ont été couronnées de succès !
Les silures se sont attaqués aux pigeons qui se déplaçaient plus qu’à ceux qui étaient immobiles, certainement car les poissons ne se servaient pas d'indices visuels pour les repérer mais plutôt des vibrations de l'eau que les oiseaux produisaient en y bougeant. Pour se saisir de leur proie, les poissons jaillissaient brièvement hors de l'eau dans des attaques-éclairs, rapporte le blog Passeurdesciences. Certains s'échouaient même sur la rive afin de saisir les pigeons, un peu comme ces orques qui se jettent sur les plages pour attraper des phoques. Ils regagnaient ensuite l'eau en se tortillant avec ou sans prise.
Les poissons ont modifié leur rythme de vie pour chasser le pigeon
Pour en savoir plus, les chercheurs ont réalisé des prélèvements sur les silures et sur leurs proies et ils ont découverts que si certains poissons s'abstenaient de manger de l'oiseau, d'autres s'étaient spécialisés dans le domaine. Pour certains d’entre eux, le pigeon représentait près de 80% de leur régime alimentaire. Comme l'explique Frédéric Santoul, qui fait partie de l’équipe scientifique, "ces silures ne s'intéressaient plus à leurs proies habituelles, chevesnes et barbeaux, qui pouvaient passer assez près d'eux sans que cela déclenche la moindre attaque". De plus, "ce comportement implique un bouleversement du rythme d'activité des silures".
Habituellement, ces gros poissons passent la journée au fond de la rivière et ne se mettent à chasser qu’à la tombée du soleil. En choisissant le pigeon comme proie, ils ont dû modifier leur rythme de vie pour chasser de jour, lorsque les oiseaux sont là. Néanmoins, les auteurs de l'étude ignorent la raison de ce nouveau comportement, tout comme la réaction des pigeons. Pour l'heure, "ils n'ont pas encore intégré que l'attaque pouvait venir de l'eau. Pour eux, la prédation tombe du ciel, notamment avec les faucons pèlerins", précise ainsi Frédéric Santoul.
"Sans doute, avec les reflets du soleil dans l'eau, les silures ne sont-ils pas faciles à voir mais, tout de même, il y a tellement peu de fond là où les pigeons se trouvent que, quand ces gros poissons approchent, leur dos finit par sortir de l'eau. Mais les pigeons ne réagissent pas. Peut-être faudra-t-il attendre plusieurs générations pour voir une adaptation de leur part à ces nouveaux prédateurs", ajoute t-il encore.
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Posté Le : 09/12/2012
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: Dieter Florian ; texte: Publié le 07 décembre 2012 par Emmanuel Perrin
Source : maxisciences.com