La hausse spectaculaire des candidats à l’émigration clandestine, communément appelés harragas, a mis Alger face à une affaire des plus sensibles. Les côtes ibériques et la Sardaigne sont en état d’alerte pour faire face à l’arrivée massive des Algériens et font part de leur inquiétude aux responsables algériens, auxquels ils reconnaissent cependant les efforts entrepris pour lutter contre le phénomène.
Abla Chérif - Alger (Le Soir)
Le drame humanitaire qui se déroule chaque nuit en partant le long de nos côtes Est et Ouest a fini par se transformer en «dossier politique» très lourd à gérer. Alger ne se voile pas la face et reconnaît la gravité des faits. Les éléments lui permettant de constater l’élévation soudaine du nombre d’Algériens en partance pour l’Europe lui parviennent régulièrement à travers des rapports établis par les services chargés de la surveillance des côtes.
Il y a moins d’une semaine, un communiqué du ministère de la Défense évoquait à ce sujet «l’ampleur prise par les tentatives de quitter le territoire national de manière illégale». Pour être directement engagé dans la lutte contre ce phénomène, le MDN a observé l’évolution de cette situation durant les semaines écoulées et sait, par conséquent, de quoi il en retourne.
Pour rassurer, il évoque dans le même texte la mobilisation permanente des «unités du Service national de Gardes-côtes des Forces navales (…) en vue d'intercepter et neutraliser les réseaux de passeurs».
L’information majeure contenue dans ce communiqué consiste, cependant, à faire savoir que 450 personnes ont été interceptées uniquement au cours de la semaine précédente. Parmi elles, 280 ont été arrêtées en 72 heures.
Combien sont-ils à avoir cependant réussi à déjouer la vigilance des gardes-côtes? A être passés de l’autre côté des frontières?
Beaucoup plus qu’ils ne l’étaient il y a quelques mois encore, à en croire les chiffres publiés de l’autre côté de la Méditerranée.
Alors que les responsables de la Sardaigne (Italie) évoquaient, il y a quelques jours, l’arrivée de plus d’une centaine d’Algériens en une nuit, les médias espagnols faisaient état, mardi, de l’arrivée de 1.200 migrants clandestins algériens durant les trois dernières semaines. Ceci a eu pour effet de mettre en alerte les gardes-côtes des pays concernés et le durcissement des lois envers ces derniers.
Habituellement transférés dans des centres conçus spécialement pour les harragas en attendant que les autorités statuent sur leur cas, les migrants algériens sont, depuis quelques jours, placés directement dans des centres de détention en attendant leur extradition vers Alger.
Selon des informations rapportées par la presse espagnole, le ministre espagnol de l’Intérieur a fait savoir qu’il rencontrerait l’ambassadeur d’Algérie au cours de cette semaine en vue de lui transmettre un message dans lequel il est demandé aux autorités algériennes de renforcer la lutte contre l’émigration clandestine. Cette annonce a eu pour effet de surprendre Alger car ces mêmes autorités avaient précédemment loué les efforts du pays dans le cadre de sa lutte contre le phénomène.
Dans un reportage réservé aux harragas, la chaîne BBC a évoqué lundi l’existence d’une loi «votée en Algérie en 2009». Cette dernière prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à six mois contre les migrants clandestins. Les «passeurs» encourent de leur côté jusqu’à 20 ans d’emprisonnement.
Selon la BBC, cette législation «reflète la détermination des autorités algériennes à faire face à ce problème» avant d’ajouter qu’elle n’avait pas pour autant permis de réduire le phénomène.
Ce sujet a été également au centre d’un rapport publié il y a quelques semaines par un think tank américain émanant du Centre pour la stratégie et les études internationales. Ce dernier met en relief la position géographique de l’Algérie en Afrique du Nord, indiquant que les «efforts fournis pour la stabilité sécuritaire et socio-économique du pays ont fait du territoire une zone d’attrait pour les migrants subsahariens (…) Comparé aux autres Etats voisins, ce pays, poursuit la même source, dispose d’un arsenal juridique sévère pour lutter contre l’immigration clandestine des Subsahariens et des Algériens vers l’Europe».
A. C.
Posté Le : 24/11/2017
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Abla Chérif
Source : LeSoirdAlgerie.com du jeudi 23 novembre 2017