PARIS (Reuters) - De faibles disponibilités de céréales dans le monde après des accidents climatiques dans plusieurs régions pourraient enflammer les prix tant que le marché ne sera pas rassuré quant à l'importance des prochaines récoltes.
Les cours mondiaux des céréales sont redescendus pics atteints cet été, après que la pire sécheresse depuis plus de 50 ans aux Etats-Unis a ravagé la récolte de maïs et de soja.
Les craintes des Nations Unies relatives à une crise alimentaire mondiale imminente se sont d'ailleurs quelque peu apaisées.
Mais les conditions météorologiques restent préoccupantes, ont souligné mercredi des analystes et traders, lors du séminaire international Global Grain qui s'est tenu à Genève.
Dans l'hémisphère Sud, les récoltes de blé sont pénalisées par le mauvais temps tandis qu'en Europe de l'Ouest et aux Etats-Unis, c'est les semis de blé d'hiver qui souffrent de mauvaises conditions météo, ont-ils noté, n'excluant pas un risque prolongé de tensions alimentaires.
Une flambée des prix alimentaires peut avoir de vastes implications pour l'économie mondiale, l'inflation qui en découlerait pouvant contraindre les banques centrales à relever leurs taux d'intérêt, alors que la crise affecte des consommateurs déjà aux prises avec le chômage.
"On est sur le fil du rasoir en termes de disponibilités en céréales", a estimé Dan Basse, président d'AgResource lors d'une conférence.
"Il serait bien que nous ayons du beau temps l'an prochain. Si ce n'est pas le cas, on ne sait pas où mettre le curseur", a-t-il ajouté.
Le maïs, aliment de base de l'alimentation animale, est cette année sous la pression de la maigre récolte américaine et son prix pourrait atteindre un nouveau record en attendant l'arrivée de la récolte sud-américaine en 2013.
"Tout le complexe céréalier est fondamentalement sous le joug du maïs", a dit à Reuters Chris Gadd, analyste pour Macquarie Capital.
"Les marchés semblent très serrés pour la deuxième moitié de l'année et ce sera une préoccupation pour les prix", a-t-il ajouté.
LA MÉTÉO DE L'AMÉRIQUE DU SUD CRUCIALE
Malgré quelques révisions en hausse de la récolte américaine de maïs, cette dernière demeure attendue à un plus bas depuis 17 ans et bon nombre d'opérateurs craignent que le ministère de l'Agriculture réduise ses prévisions en janvier lorsqu'il ajustera les surfaces récoltées.
"Si le rapport de janvier ne comporte pas de nouvelles réductions, alors les capitaux reviendront. Et quand l'argent revient, le consommateur peut espérer un rétablissement de la production, en Amérique du Sud en particulier", a dit Jeffrey McPike, directeur de la maison de négoce néerlandaise Cefetra.
Des pluies abondantes font planer des doutes sur l'importance de la récolte à venir en Argentine et la capacité de cet exportateur de poids à pouvoir soulager dans les mois à venir les besoins mondiaux.
"Le temps en Amérique du Sud va être l'élément directeur du marché", a ajouté Erin FitzPatrick de Rabobank.
"Il y a encore beaucoup de "si"'', a-t-il noté.
Ces moindres disponibilités mondiales de maïs interviennent alors que celles du blé sont, elles aussi, plus faibles.
Le mauvais temps en Argentine et en Australie, deux exportateurs majeurs de blé, risque en effet de priver le marché mondial de volume complémentaire, alors que la Russie et l'Ukraine ont déjà quasi-épuisé leurs surplus exportables.
La situation pourrait devenir explosive en Europe qui pourrait voir ses stocks de blé fondre à cause d'exportations élevées, alors que la région doit aussi faire face à une forte augmentation de ses besoins d'importation de maïs.
"Nous allons avoir un bilan très serré en Europe", a dit Erin FitzPatrick, en soulignant que Rabobank table sur un ratio stocks/utilisations à un plus bas historique cette campagne pour le blé dans l'Union européenne.
"Il est nécessaire que les prix du blé européen sur le marché à terme augmentent pour que la demande se reporte sur le blé américain", a-t-il ajouté.
AgResource table également sur une hausse des prix du blé européen pour rationner la demande à l'exportation et limiter les importations de maïs qui seront difficiles à trouver dans un contexte de faible offre mondiale.
Des conditions météorologiques plus favorables dans les mois à venir pourraient toutefois soulager la tension et il est peu probable de voir se répéter les accidents climatiques de cette année.
"L'an dernier à cette époque, on craignait la Nina. Aujourd'hui, l'anomalie climatique est plus neutre", a dit Erin FitzPatrick.
Reste que la demande mondiale, de la Chine en particulier, va continuer de croître et de fait maintenir les prix à des niveaux historiquement élevés.
"Le talon d'Achille de la Chine est d'ordre alimentaire" a dit Dan Basse en marge de la conférence, en rappelant que le pays est devenu importateur de maïs et de riz après être devenu le plus grand acheteur mondial de soja ces dernières années.
* Photo: De faibles disponibilités de céréales dans le monde après des accidents climatiques dans plusieurs régions pourraient enflammer les prix tant que le marché ne sera pas rassuré quant à l'importance des prochaines récoltes. /Photo prise le 26 octobre 2012/REUTERS/Nigel Roddis
Valerie Parent et Axelle du Crest pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten
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Posté Le : 15/11/2012
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo:REUTERS/Nigel Roddis; texte: Gus Trompiz et Emma Farge du mercredi 14 novembre 2012
Source : Reuters