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Planète - France: Les chasseurs: faux écologistes, mais vrais lobbyistes Une nouvelle tribune libre anti-chasse d'Alain Volle



Planète - France: Les chasseurs: faux écologistes, mais vrais lobbyistes Une nouvelle tribune libre anti-chasse d'Alain Volle
Suite à de nombreux incidents et accidents liés à la pratique de la chasse qui ont eu lieu à la fin de l’année dernière avec de nouvelles victimes à la clé (dont un mort récemment à Taulignan) et devant ce qu'il estime une impunité anormale dont bénéficieraient les chasseurs, notre contributeur Alain Volle nous a adressé une nouvelle tribune libre.


Les chasseurs représentent moins de 2% de la population mais ils s’approprient la nature tous les jours de la semaine pendant 9 mois de l’année, au détriment des 98% restants. Leurs pouvoirs financiers et politiques sont tels qu’ils se comportent trop souvent comme des vandales de la nature… sans concertation et avec de l'argent public.

Menace pour la vie sauvage, la chasse représente aussi une menace pour la vie humaine: 143 accidents ont eu lieu en 2016-2017, qui ont causé 18 morts.
En France, aucune véritable mesure ne garantit la sécurité des non-chasseurs, qui souhaiteraient profiter de la forêt et des chemins de campagne en toute sécurité.
Pour la grande majorité des Français l’ouverture de la chasse c’est la fermeture de la nature. Le lobby de la chasse a beaucoup trop de pouvoir en France.
Dans le même temps, à travers d’intenses campagnes de communication, ces 1.100.000 chasseurs obsédés par la pulsion de tuer se présentent comme des défenseurs de la nature, voire comme de « vrais écologistes ». Ils cherchent surtout à améliorer leur image qui s’est considérablement dégradée ces derniers temps.

Un lobbying puissant et bien organisé

Il y a en France 80.000 sociétés de chasse et une fédération de chasseurs par département ; chaque assemblée générale regroupe entre 300 et 2000 chasseurs qui en connaissent d’autres ; la mobilisation peut se faire rapidement à grande échelle, particulièrement en période électorale.
Voilà pourquoi les chasseurs sont sur-représentés au parlement. Le groupe Chasse et territoires de l’Assemblée et le groupe Chasse et pêche du Sénat totalisent à eux deux plus de 250 membres ; c’est de loin le plus nombreux de tous les groupes parlementaires.
Pour le président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC) Willy Schraen : «le vote chasseurs existe, les chasseurs ont autant d'alliés à gauche qu'à droite».
Pour assouvir leur passion les chasseurs français font pression pour obtenir toujours plus d'espèces chassables, toujours plus d'espaces de chasse, toujours plus de jours de chasse. Et ils contestent sempiternellement les cadres prévus par les textes ou préconisés par les instances scientifiques.



Dans un rapport publié en 2013 la Cour des comptes signale que la FNC rémunère un lobbyiste dont la mission consiste à «accompagner les négociations politiques et techniques en liaison avec les parlementaires, les cabinets ministériels...»
Ce lobbyiste interviendrait aussi bien auprès des députés que des sénateurs et il aurait la mission d’entretenir des contacts permanents avec les conseillers des ministres qui ont en charge un volet chasse dans leur portefeuille.

Le renfort d'Emmanuel Macron

Lors de sa visite au château de Chambord en décembre dernier, le président de la République a retrouvé en pleine forêt des présidents de fédérations de chasse ayant traqué le sanglier lors d’une «battue de régulation». Devant ses invités et un tableau de chasse, il a réaffirmé son attachement à cette pratique. «C’est la première fois depuis quarante ans qu’un président de la République vient en forêt à la fin de la chasse», s‘est réjoui le lobbyiste Thierry Coste, qui défend les intérêts des chasseurs et a conseillé le candidat d’En marche!

Emmanuel Macron adore la chasse, un peu comme Giscard d’Estaing à la grande époque, et on peut dire qu'il a sorti le grand jeu de la séduction auprès des chasseurs : «La chasse est un formidable atout pour la biodiversité, le développement de nos territoires ruraux et une activité populaire à sauvegarder». Voilà les termes dans lesquels Emmanuel Macron s'est adressé aux chasseurs, ajoutant qu’il défendrait de manière permanente la ruralité et la pratique de la chasse.
À Chambord Emmanuel Macron s’est déclaré favorable à la «réouverture des chasses présidentielles». Devant les chasseurs, le Président a affiné ses arguments: «les chasses républicaines représentent «la culture française», «il ne faut pas être honteux, il faut les reconnaître comme un élément d'attractivité. C'est quelque chose qui fascine partout», a-t-il insisté.

Les chasseurs ne sont pas des écologistes !

La biodiversité est l’expression de l’équilibre naturel des milieux, qui favorise la diversité et l’adaptation des espèces dans le respect des règles de la chaîne de la vie.
Toute intervention extérieure représente une agression à laquelle les milieux s’adaptent jusqu’à la limite du possible. 
La préservation de la biodiversité nécessite le respect de l’équilibre et des conditions favorables à la diversité des espèces.
Au contraire, les chasseurs organisent les espaces naturels en faveur de leur activité qui consiste à débusquer et tuer les animaux.
 Pour le monde de la chasse, la biodiversité est «cynégétique», elle n’a rien de naturel. La nature et sa biodiversité deviennent au service du chasseur et de son activité. Ils n’ont donc aucune légitimité écologique. La passion de la chasse et leur concurrence avec les prédateurs naturels leur donne une vision déformée de la faune, qu’ils partagent entre gibier, espèces animales agréables à chasser 
et nuisibles, espèces jugées indésirables, concurrentes, à éliminer.



Leur opposition aux mesures de protection de la biodiversité, leur opposition aux ours et aux loups, leur absence dans les combats pour la défense des animaux sauvages, leurs contentieux quasi quotidiens contre les protecteurs de la nature, ne rendent pas leur discours «écologiste» crédible.
On estime à 40 millions le nombre d’animaux tués annuellement par les chasseurs/piégeurs. A cela, s’ajoutent des millions d’animaux blessés non retrouvés voués à la mort. Il s’agit donc d’une mortalité d'origine artificielle, causée intentionnellement et à des fins ludiques de surcroît, d’une ampleur inégalée.
La chasse, activité de divertissement et de loisir consistant à tuer des animaux sauvages, n’est pas sans conséquence pour la biodiversité.
 Elle a un impact quantitatif sur les populations des espèces, en diminuant les effectifs des espèces chassées par la mortalité directe qu’elle occasionne. Le dérangement provoqué par la chasse à lui aussi des effets néfastes, provoquant une diminution de la survie, ainsi qu’une baisse du succès de la reproduction.
En modifiant le comportement et l’état de santé des animaux chassés, elle a aussi un impact qualitatif non négligeable sur la faune. Elle sélectionne pour certaines espèces, au fil des années, une population d’animaux craintifs, aux distances de fuite anormalement élevés. La plupart des espèces chassables étant en régression, environ 20 millions d’animaux sont annuellement lâchés dans la nature par les chasseurs afin de garantir un tableau de chasse suffisant. Cette pratique désastreuse affaiblit les dernières populations naturelles notamment par l’apport de maladies, perturbe les écosystèmes et cause une pollution génétique de la faune.
En outre, l'écologie, qui est indissociable de l'éthique, implique une nouvelle approche du vivant. Elle nécessite de considérer les animaux comme des êtres sensibles dignes de respect et elle se doit de condamner les pratiques violentes et irrespectueuses de la vie, telles que la chasse. La chasse, par le préjudice écologique important qu’elle occasionne, est contraire au maintien de la biodiversité et empêche la protection efficace de la faune.



Depuis plusieurs dizaines d’années, le nombre de chasseurs en France est en nette diminution, la notion du respect de l’animal se développe, en particulier chez les jeunes.
Mais il est clair qu’une réforme de la chasse ne viendra pas demain des hommes politiques. Pour se faire entendre, les amoureux de la nature, les sportifs, les randonneurs vont devoir se mobiliser sur le terrain en créant des associations pour exiger dans un premier temps un partage équitable des espaces naturels et un renforcement des mesures de sécurité. Ou rejoindre celles qui se battent déjà pour les 98% de non chasseurs, comme l’ASPAS, le RAC (rassemblement pour une France sans chasse) ou la FRAPNA 26.

Voir l'article dans son intégralité avec d'autres illustrations: :

Alain Volle


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