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Planète (France/Europe) - La Camargue pourrait-elle, un jour, disparaître ?



Planète (France/Europe) - La Camargue pourrait-elle, un jour, disparaître ?


CLIMAT: À l’occasion de la Journée mondiale des zones humides, «20 Minutes» s’est demandé si ce petit paradis pourrait ne plus être, un jour, qu’un lointain souvenir

. L'essentiel

- Confrontée, notamment, à une hausse irrémédiable du niveau de la mer, et à une explosion de la salinité des sols, la Camargue est lourdement menacée.

- Ce petit coin de paradis, dont le flamant rose est l’emblème, perd du terrain, et certaines espèces, végétales ou animales, sont menacées de disparition.

- «Si on regarde les scénarios du Giec [Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat], si on regarde les prévisions de la hausse du niveau de la mer, cela paraît difficile que la Camargue résiste», confie Stephan Arnassant, responsable du Pôle Biodiversité au Parc naturel régional de Camargue.

«C’est inéluctable…» Ceux qui connaissent bien la Camargue ont du mal à cacher leur pessimisme, quant à la disparition, un jour ou l’autre, de ce petit paradis. Le changement climatique, sévère dans ce coin du sud de la France, met à mal l’équilibre, déjà particulièrement fragile, de cette région. A l’occasion de la Journée mondiale des zones humides, dont la Camargue est une ambassadrice, 20 Minutes s’est demandé si, un jour, ces envolées de flamants roses pourraient n’être qu’un beau et lointain souvenir.

«Si on regarde les scénarios du Giec [Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat], si on regarde les prévisions de la hausse du niveau de la mer sur un ou deux siècles, cela paraît difficile que la Camargue résiste», confie Stephan Arnassant, responsable du Pôle Biodiversité au Parc naturel régional de Camargue. Bien sûr, cette région, à la nature riche, est déjà verrouillée, par de nombreux textes. Il y a des élevages de taureaux, des cultures, du tourisme et même des sites de production de sel, dans le Gard et les Bouches-du-Rhône, mais on ne peut pas faire n’importe quoi, en Camargue. Mais ces lois ne la protègent pas des effets dévastateurs du changement climatique.

- La Camargue, menacée par la hausse du niveau de la mer

En quelques décennies, la Méditerranée a avancé d’une bonne centaine de mètres, et certaines digues construites jadis pour protéger les terres ne sont plus visibles, au large, qu’avec un masque et un tuba. La mer grignote, irrémédiablement, du terrain, chaque année. Et le changement climatique aggrave ce phénomène. Selon le Parc naturel régional de Camargue, l’élévation du niveau de la Méditerranée «se situe actuellement entre 2 et 6 mm par an, auxquels il faut ajouter un enfoncement du delta, sur sa base, d’environ 2 mm par an. Dans de telles conditions, le delta pourrait être partiellement envahi par la mer au cours du siècle à venir. Le risque majeur concerne toutefois les terres et les infrastructures proches du littoral, les bassins de préconcentration des salins, le village des Saintes-Maries-de-la-Mer (Bouches-du-Rhône). Exposés à des tempêtes de plus en plus fréquentes, ils pourraient se révéler difficiles à protéger.»

Selon Stephan Arnassant, il y a, en effet, «des risques de submersion d’une partie de la Camargue par des eaux marines, en particulier les zones les plus proches de la mer. Et le problème, c’est que la majeure partie de cette zone est en dessous du niveau de la mer.» Et la marche funeste est déjà en marche, depuis de longues années. «Si vous regardez des cartes de la Camargue du XIXe siècle, vous vous dites, mais ce cartographe, ce n’est pas possible, il était en plein délire!», confie Jean Jalbert, le directeur général de la Tour du Valat, une organisation qui se bat pour l’étude et la préservation des zones humides, en particulier de la Camargue, où elle est installée. «Et pourtant non! Au XIXe siècle, la Camargue ne ressemblait pas du tout à ce à quoi elle ressemble aujourd’hui.» Alors oui, on peut craindre que dans quelques siècles, «si on ne fait rien», ce site exceptionnel, où le flamant rose, le taureau et le cheval blanc sont rois, soit rayé de la carte.

- La salinité des sols, une peste pour la faune et la flore camarguaises

Mais la hausse du niveau de la Méditerranée n’est pas le seul danger auquel est confrontée la Camargue: l’explosion de la salinité des sols est une peste, pour cette zone humide. Là encore, c’est en partie la faute à la mer. Car le delta du Rhône est témoin d’un duel permanent entre l’eau douce et l’eau salée. Il y a plusieurs années, lorsqu’il pleuvait à souhait, l’eau douce l’emportait. Mais aujourd’hui, les précipitations sont de plus en plus rares, en Camargue, et le sel a tendance à gagner plus souvent ce duel. Et quand il y a trop de sel dans les sols, c’est une catastrophe, pour la flore et les cultures, comme pour la faune. Si beaucoup d’espèces parviennent à s’adapter, dans la douleur, à cette nouvelle donne, des centaines d’hectares de vignes des très prisés Vins des sables ont par exemple été décimées par cette montée de la salinisation, en Camargue. A Saint-Laurent-d’Aigouze (Gard), «des chênes et des peupliers blancs sont en train de mourir, à cause du manque d’eau, mais surtout en raison des remontées de sel, liées à ce manque d’eau. Le sel est un poison violent, pour de très nombreux végétaux», déplore Jean Jalbert.

. Un cheval, dans le Parc naturel régional de Camargue. - imageBROKER.com/SIPA (Voir photo sur site)

Certains animaux, aussi, n’aiment pas beaucoup quand l’eau est trop salée. Notamment le crapaud cultiprède, une espèce rare, «qui a besoin d’eau, au printemps, pour se reproduire, poursuit le directeur général de la Tour du Valat. Cela fait cinq ans que la pluviométrie est au plus bas. Ils pondent leurs œufs, mais les têtards n’arrivent pas à se développer. Il y a donc zéro reproduction. Si ça dure, c’est une espèce qui va disparaître de ce territoire.» Le crapaud cultiprède rejoindrait alors la liste déjà bien fournie des espèces, notamment d’oiseaux, qu’on n’observe plus, aujourd’hui, en Camargue.

- «Laissons faire la nature. Par elle-même, elle s’adapte»

Mais des Bouches-du-Rhône au Gard, des initiatives sont toutefois menées, pour tenter de ralentir l’impact du changement climatique sur la Camargue. Des constructions de digues, notamment, pour protéger les zones humides des assauts de la mer, des opérations de protection des espèces, de reboisement ou de gestion de l’eau douce.

. Notre dossier sur le changement climatique (A consulter sur site ci-dessous)

Mais, surtout, confie Jean Jalbert, «il faut prendre acte de tout ça. On est encore dans un monde où toutes ces nouvelles, apportées par le Giec, sont tellement inquiétantes, qu’on est un peu traumatisées, et qu’on a parfois du mal à l’accepter. On ne pourra pas trouver de bonnes solutions si on ne pose pas un diagnostic, partagé par tous. Documentons-nous, partageons les connaissances…» Et, peut-être, «laissons aussi faire la nature, poursuit le directeur général de la Tour du Valat. Elle génère des écosystèmes, qui sont des amortisseurs climatiques. La nature, par elle-même, s’adapte».

À l’occasion de la Journée mondiale des zones humides, des animations sont organisées partout en France durant le mois de février. Tout le programme, par ici. (A consulter sur site ci-dessous






Photo: Un flamant rose, aux Saintes Maries de la Mer, en Camargue. - imageBROKER.com/SIPA / SIPA

Pour accéder aux annexes ci-dessus: https://www.20minutes.fr/planete/4073971-20240202-camargue-pourrait-jour-disparaitre

Nicolas Bonzom


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