4.000 km en 2 mois… en véloto, ces véhicules à mi-chemin entre l’auto et le vélo. Objectif de ce tour de France original réalisé par Jérôme Zindy : montrer qu’il est possible de sortir du tout-voiture.
Saint-Georges-d’Orques (Hérault), reportage
Regard pétillant et sourire enthousiaste, Jérôme Zindy nous fait le tour du propriétaire. Quatre roues à rayons, deux pédales, un guidon, deux sièges l’un derrière l’autre et une carrosserie en fibre de lin. Conclusion: l’engin tient plus du tuk-tuk asiatique que de la Tesla. Pourtant, il s’agit bien d’un véhicule électrique, un «véloto» diront certains, entre l’auto et le vélo.
À l’avant, un petit écran affiche les performances de la bête: 45 km/h maximum, 80 km d’autonomie et «2 kWh de puissance pour la batterie, contre 40 à 60 kWh pour une voiture électrique». Le cycliste aime comparer son bolide à ses cousines automobiles. «Il peut transporter 2 personnes, ou 1 adulte et 2 enfants, et ne pèse que 120 kg, insiste-t-il. Une auto ne transporte en moyenne que 1,2 personne par trajet, et pèse 1,2 tonne!»
Intarissable, le fringant pédaleur achève un tour de France original: 4.000 km en deux mois pour «montrer que des solutions crédibles existent pour sortir du tout-voiture». Dix étapes à la rencontre des «pionniers» des véhicules intermédiaires, ces bécanes à mi-chemin entre la bicyclette et le tacot thermique. Ce jour-là, dernière étape dans les environs de Montpellier, à Saint-Georges-d’Orques, avec Mehdi Khouda et son vélobus.
. Avec son véloto (en blanc), Jérôme Zindy filme des élèves à bord du vélobus (en jaune) de Mehdi Khouda. © David Richard / Reporterre (Voir photo sur site ci-dessous)
Tous les jours, cet ex-animateur périscolaire devenu chauffeur écolo emmène une dizaine d’enfants à bord de son fourgon jaune à pédales. «Cela permet de désengorger les abords de l’école, qui étaient pris d’assaut par les voitures», explique-t-il. À ses côtés, caméra en main, Jérôme Zindy filme avec entrain. «Il faut faire connaître ces initiatives, insiste-t-il. Sur les véhicules intermédiaires, on en est au même stade qu’aux débuts des vélos électriques, les gens ne savent pas que ça existe, mais il suffirait de pas grand-chose pour que ça décolle.»
C’est toute l’ambition de sa «nouvelle aventure mobile», financée par l’Agence nationale de la transition énergétique (Ademe). «Il faut arriver à changer d’imaginaire, celui lié à l’automobile reste très fort», abonde Gabriel Plassat, qui œuvre au sein de l’instance pour développer ces véhicules du futur.
- Quadricycle électrique, low-tech...
Prendre le virage de la transition sans pour autant sortir de la route, c’est possible. Jérôme Zindy en veut pour preuve son propre parcours: biberonné à la bagnole, il se dit désormais cycliste convaincu. «Enfant, je recevais une petite voiture à chaque bonne note, se rappelle-t-il. Mon père m’emmenait au Salon de l’auto et on regardait avec passion le Paris-Dakar.» C’est donc logiquement qu’il se tourna, une fois adulte, vers le rallye. «J’ai bossé plus de dix ans à suivre des courses.»
Jusqu’au déclic, en 2019: des vacances en Auvergne, en pleine sécheresse, et des camions-citernes apportant l’eau dans les villages. «J’ai pris une claque ultra-violente, raconte-t-il. J’étais confronté au changement climatique, et je me rendais compte que j’avais bâti ma vie sur les énergies fossiles.» En quête de sens, il découvrit le vélo solaire, un deux-roues électrique alimenté par des panneaux photovoltaïques. «Une révélation.» Reconverti en «vélo-reporter», il sillonne à présent les routes de France et de Navarre afin de filmer les initiatives écolos pour sa chaîne YouTube et son site dédié.
. Jérôme Zindy filme les élèves à bord du vélobus de Mehdi Khouda à Saint-Georges-d’Orques, le 27 mars 2024. © David Richard / Reporterre (Voir photo sur site ci-dessous)
Pour ce tour hexagonal, il a délaissé son biclou solaire pour un quadricycle électrique fabriqué par l’entreprise QBX. Le constructeur audois est d’ailleurs le protagoniste de la première vidéo réalisée par Jérôme Zindy. «L’idée, c’est de montrer la diversité de projets et de profils qui développent les véhicules intermédiaires», explique le reporter, persuadé que ces appareils stables et boostés par la fée électricité peuvent séduire un large public, de 7 à 77 ans.
Une école d’ingénieurs qui forme ses étudiants à la mobilité durable, des Aveyronnais adeptes des transports doux, un constructeur automobile savoyard et ses 650 salariés en pleine conversion low-tech, mais aussi une plateforme citoyenne en ligne qui promeut le véloto open source.
«Les solutions sont là, mais il manque des décisions politiques pour les pousser», estime Jérôme Zindy. Un avis corroboré par Gabriel Plassat, qui a comptabilisé une cinquantaine de projets autour des véhicules intermédiaires à travers la France: «Techniquement, on sait faire des véhicules légers, sobres, efficaces, dit-il. Mais il reste des obstacles à lever côté usagers.»
- «L’aube d’une nouvelle ère»
D’après l’expert, «la perception de la sécurité, ou de l’insécurité, à bord de ces véhicules est encore un gros point noir». Il faudrait donc travailler sur les conditions de circulation des vélotos — par exemple en abaissant la vitesse maximale sur certaines routes départementales — et former les automobilistes à ces nouveaux usagers plus lents.
Pour Jérôme Zindy, la plus grosse difficulté demeure le prix de ces cycles écolos, qui dépassent généralement les 10.000 euros. «On pourrait jouer sur les aides à l’achat, estime-t-il, car un véhicule intermédiaire est actuellement subventionné comme un vélo électrique, donc avec des aides de 500, 900 euros, tandis qu’une voiture électrique peut toucher entre 5.000 et 13.000 euros d’aides.» L’Ademe travaille à l’élaboration d’un score environnemental pour ces véhicules, afin d’orienter le soutien public vers les engins les plus vertueux.
Mais la clé se trouve sans doute dans une possible industrialisation. En d’autres termes, il faut que les dizaines de start-up et de petites entreprises qui testent actuellement ces vélonefs dans un coin de leur hangar se mettent à les produire en série. «On pousse à la mutualisation des machines, des lieux de production, pour avoir aussi des commandes groupées de composants et faire des économies d’échelle», explique Gabriel Plassat.
. Jérôme Zindy: « La bonne surprise de ce tour de France, c’est que les gens sont enthousiastes et se projettent.» © David Richard / Reporterre (Voir photo sur site ci-dessous)
Reste des freins avant la massification. En premier lieu la réglementation, qui méconnaît trop souvent ces tricycles et quadricycles chimériques. «Certains véhicules, comme le vélobus, n’entrent dans aucune des cases existantes», reconnaît le spécialiste de l’Ademe. Surtout, l’homologation coûte cher (environ 200.000 euros), alors qu’elle est obligatoire pour faire des expérimentations, donc avant même d’avoir validé, industrialisé et financé le projet.
Dernier point, et non des moindres, la difficulté pour attirer des investisseurs: «Ce sont des projets risqués. Le marché est quasi inexistant pour l’instant et les entreprises qui se lancent ont peu de capitaux», observe Gabriel Plassat.
À Saint-Georges-d’Orques, Jérôme Zindy veut pourtant croire à «l’aube d’une nouvelle ère»: «La bonne surprise de ce tour de France, c’est que les gens sont enthousiastes et se projettent. Beaucoup aimeraient se passer de leur auto, mais ne savent pas comment faire: quand on leur apporte une solution, ils sont partants!» Pour le vidéaste, les véhicules intermédiaires ont ainsi toute leur place aux côtés des vélos et des trains. «Il faut le dire et le redire: on peut continuer à aller travailler, faire ses courses, et même voyager… sans voiture!»
Photo: Jérôme Zindy filme des élèves à bord du vélobus de Mehdi Khouda (en orange), à Saint-Georges-d’Orques (Hérault), le 27 mars 2024. - © David Richard / Reporterre
Voir l'article dans son intégralité avec plus d'illustrations: https://reporterre.net/Velotos-velobus-Ils-inventent-la-mobilite-de-demain-Velotos-velobus-Le-tour-de-France-des
Par Lorène Lavocat
Nous avons eu tort.
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Nous nous disions qu’il suffirait que la population et les décideurs politiques soient informés, que les journaux et télévisions s’emparent du sujet, pour que les choses bougent.
Nous savons aujourd’hui que nous avions tort.
En France et dans le monde, l’écrasante majorité des médias est désormais aux mains des ultra-riches.
Les rapports du GIEC sont commentés entre deux publicités pour des SUV.
Des climatosceptiques sont au pouvoir dans de nombreuses démocraties.
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Posté Le : 06/04/2024
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Par Lorène Lavocat - 5 avril 2024
Source : https://reporterre.net/