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Planète (Europe) - La Suisse doit tirer les leçons du Sommet sur la biodiversité



Planète (Europe) - La Suisse doit tirer les leçons du Sommet sur la biodiversité


OPINION. La COP15 sur la diversité fin décembre a laissé la Suisse face à des défis majeurs, écrit François Turrian, de BirdLife Switzerland: le pays concentre un grand nombre d’espèces menacées, tout en réservant peu de place aux surfaces protégées

La 15e Conférence des parties (COP15 de Kunming-Montréal) à la Convention sur la diversité biologique qui s’est achevée le 19 décembre dernier a permis aux pays signataires de s’entendre sur un certain nombre d’objectifs, en vue de tenter d’enrayer la sixième extinction de masse des espèces vivantes, la première provoquée par les activités humaines.

La question des surfaces à protéger a été sans nul doute la plus médiatisée: d’ici à 2030, la communauté internationale s’est engagée à protéger et à entretenir 30% des écosystèmes marins, d’eau douce et terrestres au bénéfice de la biodiversité. En parallèle, 30% des écosystèmes dégradés seront à restaurer. D’autres valeurs cibles ont été fixées. Ainsi, il s’agira de réduire les risques dus aux pesticides de 50%, tout comme les excédents de fertilisants. Autre objectif ambitieux et essentiel: réduire de 500 milliards les subventions néfastes à la biodiversité. Des objectifs généraux sont aussi fixés pour verdir les espaces urbains, lutter contre les espèces envahissantes et les sources de pollution ou gérer de manière durable les activités telles que l’industrie du bois, l’aquaculture, la pêche et l’agriculture. Point positif: un mécanisme de financement pour la mise en œuvre a été décidé avec le Fonds mondial pour la biodiversité. Le sommet a ainsi adopté un train de mesures de solidarité internationale, en particulier à l’égard des pays les plus vulnérables et les plus riches en biodiversité.

- La Suisse doit s'engager fermement

Evidemment, ce paquet, prometteur en apparence, ne pourra être atteint que si les 196 Etats membres s’engagent à le mettre en œuvre sur leurs territoires respectifs. En ce sens, cette conférence ne déroge pas à l’habitude de ces grands raouts: les bonnes intentions ne sont rien sans une mise en œuvre rapide, robuste et mesurable dans chaque pays.

A cet égard, la Suisse, dont la délégation a plaidé pour un accord ambitieux, doit s’engager fermement pour faire sa part, c’est-à-dire beaucoup plus que ce qu’elle a consenti jusqu’ici. Quatre raisons au moins plaident pour une action forte dans ce domaine.

Premièrement, notre pays est un mauvais élève dans la classe des pays européens: à la fois lanterne rouge pour ce qui est des aires dévolues à la nature (entre 9 et 13% de la surface du pays, selon ce que l’on considère comme surfaces protégées) et au sommet en ce qui concerne la proportion des espèces menacées – un organisme sur trois vivant en Suisse figure sur liste rouge.

Ensuite, il y va de la crédibilité du pays. Pays prospère, elle ne peut se contenter de donner de la voix à l’échelle internationale sans s’investir pleinement pour préserver et restaurer ses propres richesses naturelles.

Troisièmement, la Suisse a une responsabilité européenne pour la conservation d’habitats spécifiques et d’espèces particulières. Je pense ici surtout aux plantes et animaux vivant en altitude.

- La nature nous rend service

Enfin et surtout, l’investissement dans la protection de la nature bénéficie à l’ensemble de la société. Chaque personne peut constater à quel point des habitats restaurés retrouvent leur vie. Les mesures tangibles contribuent à la valorisation des services que nous rend la nature: des forêts riches en biodiversité sont plus résilientes face aux aléas du climat. Les villes où des espaces verts de qualité sont aménagés améliorent notre bien-être. La préservation de la biodiversité dans les campagnes renforce la fertilité des sols et ménage les si précieux insectes pollinisateurs. La restauration de zones alluviales joue un rôle salvateur de tampon, à la fois contre la puissance des crues et les sécheresses estivales, tout en alimentant les nappes phréatiques. Pour ne citer que ces exemples.

La Suisse, comme la planète, a besoin d’un pacte fédérateur pour aboutir. Pour paraphraser à la fois Simonetta Sommaruga au moment de son départ du Conseil fédéral et le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, «la biodiversité n’est pas un luxe» et «il est temps de forger un pacte de paix avec la nature».




Photo: Un lagopède alpin, dans des rochers. — © OLIVIER BORN / KEYSTONE

François Turrian directeur romand de BirdLife Suisse


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