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Planète (Europe/France) - Un bon génie sanctuarise des forêts de Gironde



Planète (Europe/France) - Un bon génie sanctuarise des forêts de Gironde


Jacques-Eloi Duffau a signé mardi 9 mars une ORE (obligation réelle environnementale), qui met sa parcelle de 40 hectares de forêts sous protection du Parc naturel des Landes de Gascogne. C’est le deuxième contrat de ce type conclu par cet amoureux de la nature.

Des grands chênes qu’on abat sans réagir, il ne pouvait plus le souffrir. Pour sauver des centaines de ces arbres centenaires, ainsi qu’une frênaie entière, Jacques-Eloi Duffau a décidé de vendre un appartement à Arcachon et d’acquérir une parcelle de 40 hectares à Belin-Béliet (Gironde) en bord de Leyre. Cette rivière, surplombée d’une forêt galerie, forme avant de se jeter dans le Bassin d’Arcachon «une magnifique zone d’étalement de près d’un kilomètre de large, où on trouve des loutres et des cistudes», décrit ce chef d’entreprise retraité de 72 ans.

Il a racheté pour plus de 200.000 euros cette zone humide et ses bois à un groupement forestier pratiquant la sylviculture intensive – «dont les machines esquintent tout sur leur passage». Et vient de la placer sous la protection du Parc naturel des Landes de Gascogne, avec lequel il a signé, ce mardi 9 mars, une obligation réelle environnementale (ORE).

C’est la deuxième du genre que contracte Jacques-Eloi Duffau, qui avait déjà innové en confiant, en décembre dernier au conseil départemental de la Gironde, une forêt de 8 hectares. Une parcelle acquise «au prix fort» – 55 000 € – après avoir été alerté de la coupe de grands pins, vieux de 150 ans et hauts de 30 mètres.

- «La plus belle donation, c’est le vivant»

L’ORE, dispositif créé en France en 2016, permet à un particulier de confier aux pouvoirs publics la gestion et l’entretien d’un terrain. S’il en conserve la propriété et peut le vendre ou le léguer, il a la garantie que cela restera un espace naturel pendant toute la durée de l’ORE – jusqu’à 99 ans. Le propriétaire prend de son côté certains engagements comme l’interdiction d’utiliser des pesticides, de modifier les cours d’eau ou de faire passer des engins motorisés…

Jacques-Eloi Duffau a choisi le niveau de protection maximal: «On ne touche à rien et on laisse vivre la nature!» Il reconnaît que cela n’a «pas été facile» avec sa famille. «Mais dans 10 ans, je ne serai peut-être plus là et les pouvoirs publics vont pouvoir assurer. Ce qui est chouette dans cette affaire, c’est qu’on renverse les symboles: la plus belle donation, c’est de laisser en héritage du vivant. En attendant qu’on le comprenne, collectivement, il faut mettre des barrières pour sauver la biodiversité.»

Sa parcelle de Belin-Béliet sera ainsi «au cœur de la future réserve naturelle régionale» (RNR) de 400 ha, explique Camille Dewaele, chargée d’études au parc: «Sur les 118 propriétaires privés situés dans le périmètre concerné, Jacques-Eloi Duffau est le premier à soutenir le projet de réserve. Pendant 100 ans on va pouvoir garder l’identité forestière de la vallée de la Leyre, touchée par l’exploitation forestière. C’est un geste dont on peut lui être reconnaissant. Il faut désormais que d’autres propriétaires surfent sur la vague.»

- Rouler sur l’ORE

L’initiative est particulièrement symbolique à Belin-Béliet, où un projet de construction d’une immense plateforme logistique (72.000 m2) pour un géant de l’e-commerce (dont l’identité est encore inconnue), suscite une forte opposition, notamment de la Sepanso, association de protection de l’environnement dont Jacques-Eloi Duffau est un administrateur.

«On parle beaucoup de nous quand nous sommes contre de grands projets – autoroute, LGV… –, et Jacques-Eloi Duffau voulait mener des actions plus positives, relève Daniel Delestre, président de l’association. Il faut des gens de bonne volonté, qui donnent du temps et de l’argent pour essayer de ralentir l’érosion de la biodiversité. Cela peut donner des idées à des industriels. Acheter des territoires pour les préserver, c’est moins fréquent chez nous qu’aux États-Unis, où les parcs nationaux ont pu être créés grâce à des donations privées.»

Si Jacques-Eloi Duffau a décidé d’arrêter ses emplettes – «Je ne suis pas Crésus!» – il planche sur la création d’un site Internet afin de donner les clés des ORE aux propriétaires qui voudraient l’imiter.




Photo: Jacques-Eloi Duffau a créé une réserve naturelle sur une parcelle de 8 hectares de forêt. Ici à Aublac, le 29 décembre 2020. - Jérôme Jamet/SUD OUEST/MAXPPP

Simon Barthélémy (à Bordeaux)


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