Avec le confinement et la crise sanitaire, les cyclistes se sont multipliés dans Paris et toutes les grandes villes en France. Frédéric Héran, urbaniste et auteur du 'Retour de la bicyclette, une histoire des déplacements urbains en Europe de 1917 à 2050', analyse ce phénomène.
Entre les Français et le vélo, la relation mouvementée dure depuis 130 ans, mais sa montée en puissance actuelle s'inscrit dans le long terme, selon le professeur d'économie et urbaniste Frédéric Héran, auteur du 'Retour de la bicyclette, une histoire des déplacements urbains en Europe de 1817 à 2050'.
- Cette explosion de la pratique du vélo est-elle inédite en France?
Le vélo connait un essor extraordinaire en 1891 avec l'invention du pneumatique facilement démontable par Michelin. Il est immédiatement considéré comme plus efficace et moins cher que le cheval et plus rapide que le tramway. Pendant dix ans, il n'a pas de concurrent dans l'imaginaire des citadins. Dans les années 50, même face à la montée en puissance de la voiture, le vélo reste le moyen de mobilité préféré des classes populaires. Mais les années 60 signent le triomphe de la mobylette avec Solex qui se choisit comme slogan "une bicyclette qui roule toute seule". La pratique s'effondre.
La crise de l'énergie en 1974, remet sur le devant de la scène la bicyclette. On voit apparaître les premiers plans vélos à la Rochelle, pionnière, puis Strasbourg, Grenoble et Lille. Mais cette évolution n'est pas soutenue par les gouvernements. Il fallait alors plutôt relancer le métro et les tramways. Les années 80 sont les années noires du vélo en France.
- Qu'est-ce qui a finalement permis aux cyclistes de se faire une place dans les villes françaises?
On assiste aujourd'hui a une accélération d'une tendance qui a 30 ans d'ancienneté: la modération du trafic auto qui profite par ricochet au vélo.
Il y a eu une première volonté de réduire la voiture à Strasbourg sous Catherine Trautmann (1989-1997 et 2000-2001), dans Paris sous les mandats de Bertrand Delanoë (2001-2014) puis cela s'est emballé avec Anne Hidalgo (depuis 2014) qui n'a plus peur de faire une place confortable aux cyclistes. Il faut comprendre que historiquement, si on développe un mode de déplacement, cela se fait toujours au détriment d'un autre. C'est impossible de faire plaisir à tout le monde.
- Ce rebond du vélo est-il selon vous durable?
La hausse spectaculaire, telle qu'elle est aujourd'hui, peut se tasser. On verra ce qu'il en reste dans un an. Il peut y avoir un effet d'atténuation, avec notamment la fin de la crise sanitaire. Le métro reste un concurrent redoutable.
Mais le vélo va continuer de monter en puissance, on n'en est qu'aux prémisses. Et puis il ne faut pas oublier la marche, qui reste aussi le fondement de l'urbanité et de la démocratie en cela qu'elle rend tout le monde égal en moyen, sur l'espace public.
Je vois dans les années à venir une alliance forte de ces deux modalités de mobilité active, la marche et le vélo. Mais il faut pour cela que les nouveaux cyclistes apprennent à respecter les piétons, à ne pas rouler trop vite, à rouler selon une vitesse homogène, comme au Danemark ou aux Pays-Bas. C'est une question d'habitude et elle viendra peu à peu.
Photo: Entre les Français et le vélo, la relation mouvementée dure depuis 130 ans. © Pixabay
Par GEO avec AFP
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Posté Le : 06/12/2020
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Par GEO avec AFP - Publié le 25/09/2020
Source : https://www.geo.fr/