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Planète - Biodiversité, comment inverser la tendance ?


Planète - Biodiversité, comment inverser la tendance ?


La planète traverse aujourd’hui la sixième grande crise d’extinction des espèces depuis le début de la vie sur terre, il y a 3,8 milliards d’années. En effet, tout au long de la préhistoire et de l’histoire, ont eu lieu des disparitions d’espèces animales et végétales. Le problème auquel l’humanité doit faire face actuellement, c’est l’accélération de ce phénomène.

Les modifications rapides de l’environnement, la dégradation des sols, le réchauffement climatique, la chasse ou la cueillette non contrôlées, la destruction de l’habitat de certaines espèces et la sélection commerciale en agriculture provoquent la disparition de nombreuses espèces et une baisse inquiétante de la biodiversité. S’y ajoute la biopiraterie, qui est un contournement des règles internationales de protection de la biodiversité.

Bien que la diversité du vivant sur terre soit vertigineuse (plus de 80 % des espèces restent aujourd’hui inconnues), le concept de biodiversité renvoie à la volonté récente d’établir un état des lieux de notre biosphère. En 1982, sous l’égide des Nations unies, une première Charte mondiale de la nature exhorte les pays à préserver leur biodiversité. Dix ans plus tard, la Convention sur la diversité biologique est signée par 168 pays au Sommet de Rio (Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement). L’article 2 de cette convention définit la biodiversité comme la «variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre les espèces, ainsi que celle des écosystèmes». Depuis cette date, la conservation de la diversité biologique, son utilisation durable et le partage équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques [1] fait l’objet de nombreuses résolutions internationales. En 2020, en raison de la pandémie mondiale de Covid-19, la 15e réunion de la Convention de l’ONU sur la diversité biologique (COP15 en Chine) et le Congrès mondial de la nature (UICN en France) sont repoussés à 2021.

Notre planète a traversé cinq épisodes critiques en matière d’extinction d’espèces mais les scientifiques estiment qu’au cours des dernières décennies le rythme d’extinction attribué aux activités humaines occasionne une brutale accélération des perturbations des écosystèmes. Dans la dernière édition de la Liste rouge mondiale des espèces menacées, l’Union internationale pour la conservation de la nature estime 31.030 espèces menacées sur les 116.177 espèces étudiées.

Depuis la Conférence mondiale de la biodiversité de Nagoya en 2010 (COP10) et le lancement de la Décennie 2010-2020 des Nations unies pour la biodiversité, une partie des efforts internationaux concerne notamment les zones terrestres ou marines qui possèdent une grande richesse de biodiversité particulièrement menacée par l’activité humaine. 36 points chauds (hotspots) ont ainsi été recensés (récifs coralliens du Pacifique Sud, bassin méditerranéen, Andes tropicales, forêt atlantique du Brésil…) mais tous ces engagements pris dans le cadre d’un plan global stratégique en faveur de la biodiversité, dits objectifs d’Aichi, restent difficiles à honorer [2].

Au-delà de cet inventaire mondial qui a pour but de prioriser les actions et de limiter le taux d’extinction des espèces, les scientifiques s’attachent désormais à intégrer la question de la biodiversité dans les problèmes de société. La pensée écosystémique se développe autour de l’idée que l’être humain est directement ou indirectement dépendant des services écologiques [3] issus de la biodiversité: régénération des sols et pollinisation pour produire des ressources alimentaires, régulation du climat pour protéger les populations des risques naturels mais également des maladies infectieuses.

Des instances comme l’Office français de la biodiversité et de nombreuses associations de protection de l’environnement (WWF, Ligue de protection des oiseaux, etc.) tentent d’enrayer le déclin de la biodiversité en développant des programmes régionaux, nationaux ou supranationaux (sites naturels du réseau européen Natura 2000, corridors biologiques de la Trame verte et bleue en France…). Cependant, l’irréversibilité des changements environnementaux n’est plus occultée et la notion d’anthropocène [4] est désormais utilisée pour évoquer plus largement les conséquences des activités humaines sur la biosphère. Les quatre principaux facteurs d’érosion de la biodiversité sont en effet d’origine humaine: destruction des habitats, surexploitation des ressources, pollution et introduction d’espèces envahissantes. Enfin, dans des parties du monde comme l’Amazonie, particulièrement exposée aux appétits de grandes firmes pharmaceutiques et/ou au pillage des ressources naturelles, le contournement des règles internationales de protection de la biodiversité et des intérêts des peuples autochtones se traduit aussi par des actes de biopiraterie [5].

Nos sociétés qui ont cru pouvoir s’affranchir de la nature prennent conscience qu’il est indispensable de coopérer avec le vivant (écologie de la réconciliation/bio-inspiration [6], etc.), de limiter le prélèvement des ressources naturelles (il faudrait cinq planètes si le monde consommait les ressources selon le modèle nord-américain) et donc de s’inscrire dans des modes de vie plus respectueux de la diversité.


Photo: Image de Michael Siebert - Pixabay


Notes

[1] En 1992, lors du Sommet de Rio, les ressources génétiques d’origine végétale, animale, microbienne ou autre contenant des unités fonctionnelles de l’hérédité ont été désignées comme un bien commun. Leur préservation a été considérée comme cruciale pour la biodiversité et leur exploitation doit également prendre en compte les droits des peuples autochtones à travers un partage équitable des bénéfices.

[2] Par exemple, en ce qui concerne une partie de l’objectif 11 des objectifs d’Aichi qui engage les pays à protéger au moins 17 % de zones terrestres sensibles, seuls 14 pays ont atteint cet objectif (33,4 % de zones protégées pour la Nouvelle-Zélande, 19 % pour le bassin méditerranéen, 9 % et 8 % pour la forêt atlantique du Brésil).

[3] Les services écologiques correspondent aux biens et aux services que les êtres humains, directement ou indirectement, retirent du bon fonctionnement des écosystèmes pour assurer leur bien-être (pollinisation, qualité de l’eau, paysages, protection contre les inondations, etc.).

[4] Le terme anthropocène (du grec anthropos : homme) indique l’entrée dans une nouvelle ère géologique marquée par les conséquences globales des activités humaines sur la biosphère : perte de biodiversité, dérèglement climatique, érosion des sols…

[5] Voir le combat des Amérindiens guarani pour l’usage du stevia comme édulcorant dans l’industrie agroalimentaire en 2016.

[6] L’écologie de réconciliation est la branche de l’écologie qui étudie les moyens d’encourager la biodiversité dans les écosystèmes anthropiques. La bio-inspiration est un changement de paradigme qui conduit ses concepteurs à s’inspirer de la nature pour développer de nouveaux systèmes. La bio-inspiration s’appuie souvent sur le biomimétisme.


par CDTM 34
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