Pillage patrimonial

Le sens de la manœuvre pointu, le royaume marocain n’hésite ni sur les moyens ni sur la méthode dans sa guerre contre l’Algérie. Après l’offensive diplomatique assortie d’un constant lobbying pour isoler le pays, le voisin de l’Ouest affine sa stratégie en s’attaquant carrément au patrimoine culturel et religieux algérien. À la façon des braconniers, M6 décide d’inscrire à l’Unesco le raï, musique algérienne, comme patrimoine culturel de son pays. Ainsi, a-t-il tenté, sans grand succès, d’accaparer la confrérie Tidjania en se rapprochant de ses adeptes sénégalais, en lui inventant une histoire de paternité marocaine. Aussi, toujours dans la manœuvre, entre deux tentatives d’apaisement avec Alger, s’est-il attelé récemment à s’attaquer à l’autre confrérie, âlawiya, pour en faire un legs exclusif.
C’est dire qu’il s’agit bel et bien d’une entreprise bien orchestrée pour piller le patrimoine algérien, pour rendre le pays orphelin de sa culture. Et ça prend les formes d’une véritable agression à rajouter à ces fournées de cannabis qui franchissent la frontière sous la bonne protection des gardes-frontières du roi.
Pour autant, une résistance s’organise… par les concernés, comme les adeptes de la Tidjania. Malheureusement, au niveau officiel aucun responsable n’a réagi. C’est plutôt le silence complice, comme si on voulait se débarrasser de cette musique qui a conquis le monde. Comme on se débarrasse d’une tare honteuse. La même position est adoptée lors de la tentative d’OPA sur la Tidjania ou timidement en rappelant son “centre” In Madhi.
Bien sûr, comme pour le raï banni jusqu’à sa reconnaissance internationale, les confréries n’ont d’intérêt pour les responsables politiques que pour leur bénédiction “électorale”.
Il est clair qu’on ne peut pas demander à un système qui a régné par le déni culturel de défendre ce qu’il a, un moment, interdit sur son territoire. Et aussi, parce que les hautes autorités du pays continuent d’agir et de penser suivant les paradigmes d’une vision éculée. Une doctrine dépassée comme le démontrent les échecs diplomatiques.