Algérie

Pieds-noirs, entre haine et «travail de deuil»


Comme promis, une cinquantaine de rapatriés et de vétérans ont manifesté, dans l'après-midi de samedi, devant les portes du théâtre de la Criée, à  Marseille. Peut-être moins nombreux que la veille, mais plus virulents et agressifs, ils n'auront toutefois pas pu empêcher la tenue de ce qu'ils qualifient de «trahison». Fait notable : des jeunes, de moins de vingt ans, rivalisaient avec leurs aînés dans les huées et les invectives à  l'adresse des intervenants et même du public. «Ils émargent au Front national. Ils ont fait le déplacement en famille. Cela est quand même triste que des enfants soient impliqués dans la haine de leurs parents ou grands-parents», commente l'une des personnes venue assister aux débats. Une autre se fait d'ailleurs violemment prendre à  partie par un homme d'une soixantaine d'années. «Vous àªtes une collabo, une traîtresse. Vous àªtes du côté des assassins», hurle-t-il. Elle tourne le dos en lui assénant un «Je ne vous réponds pas, vous seriez capable de me frapper». Un peu plus loin, deux femmes hurlent, l'une répétant les griefs des «nostalgiques» ressassés depuis la veille, l'autre la traitant de «raciste» et de «folle furieuse». Et les plus affectés par ces scènes de déchaînement haineux semblaient àªtre leurs «congénères». «J'ai été traitée de Fellouze, de nazi, ai failli recevoir des œufs à  l'extérieur. Ce n'est pas grave, j'ai l'habitude avec ces gens-là», déplore une sexagénaire. «Je suis née en Algérie et j'ai dû la quitter dans les mêmes conditions. La souffrance et la douleur sont toujours là, et les plaies ne se refermeront jamais», relate-t-elle. «Seulement, en 50 ans, il y a un travail sur soi à  faire, un travail de ''deuil , pour que la haine similaire à  la leur ne s'installe pas», affirme une autre pied-noir, septuagénaire. L'une d'elles estime d'ailleurs que «ces gens-là, tous ces nostalgiques extrémistes, sont quelque part responsables de l'impasse» dans laquelle se trouvent les relations entre les deux pays, du moins sur ce chapitre. «D'ailleurs, un réel rapprochement serait bloqué par cette frange», dit-elle, considérant qu'il est impératif d'essayer d'apaiser les choses au lieu de les enflammer. «Quel retournement de situation ! Il y a 50 ans, c'était eux qui se faisaient insulter dans la rue par les Français. Aujourd'hui, ce sont eux qui les insultent», commente, quant à  elle, une rapatriée du Maroc. Pourtant, tout le monde n'est pas aussi attristé par cette situation et la persistance de violence et d'agressivité de la part des ultras. «Ce sont des manifestations prévues de longue date, organisées par des réseaux structurés, dont le FN. Pourtant, ils n'ont pu réunir qu'une cinquantaine de personnes», analyse un sexagénaire, pied-noir également. «Je pense qu'il y a de quoi se réjouir...»
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