Algérie

Pétrole : Crise ouverte entre producteurs et consommateurs



Le marché mondial de l'or noir s'achemine-t-il vers une autre crise pétrolière majeure ? Les divergences entre producteurs et consommateurs de pétrole sont apparues hier encore plus profondes à Madrid, lors du 19e Congrès mondial du pétrole, que lors du dernier Forum de l'énergie, organisé la semaine dernière à Djeddah. Les clivages entre les deux tendances ont ainsi pris une tournure dangereuse après les menaces et les critiques à peine voilées adressées par les pays consommateurs membres de l'OCDE envers les pays producteurs membres de l'OPEP. A Madrid, la guerre entre les deux tendances a pris des proportions de non-retour. Aux accusations des pays et groupes pétroliers contre l'OPEP qui veut serrer les vannes au risque de provoquer une autre crise énergétique mondiale, les pays représentant l'organisation dénoncent les tendances spéculatives sur les marchés financiers, à l'origine de l'envolée des prix du brut, qui ont atteint hier les 140 dollars à New York, et le panier OPEP à 136 dollars/baril. Ainsi, les pays producteurs membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole estiment que l'offre est suffisante pour satisfaire la demande mondiale, et que l'envolée des prix est due à la faiblesse du dollar et à la spéculation, et hésitent à investir pour augmenter la production. Selon son président, M. Chakib Khelil, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole est «préoccupée» par une éventuelle stagnation de la demande pétrolière qui ne lui garantirait pas assez de retour sur investissement si elle dépense beaucoup pour produire plus d'or noir. «Il y a de grosses incertitudes sur ces investissements», a précisé le ministre algérien de l'Energie devant le XIXe Congrès mondial du pétrole. En fait, l'OPEP craint surtout que cet alourdissement de la facture pétrolière, conjugué aux préoccupations écologiques des pays riches, ne pousse ces derniers à réduire leur consommation. Elle s'alarme enfin de l'état de la croissance mondiale, et donc de la consommation de pétrole dans le monde. Autant de facteurs qui alimentent ses craintes sur les débouchés de son pétrole pour l'avenir, a expliqué M. Khelil.

De leur côté, les consommateurs industrialisés, dont les pays du G-7, réclament une augmentation de production pour calmer les cours et disent que l'offre ne sera pas suffisante pour apaiser la soif de pétrole mondiale, celle des géants émergents chinois, indien ou brésilien notamment. L'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui s'est alignée sur les thèses des pays riches, et défend les intérêts des pays industrialisés, a indiqué par la voix de son directeur général, Nobuo Tanaka, que «ce sont principalement les fondamentaux du marché qui poussent les prix à la hausse». «Notre étude met une fois de plus en lumière le besoin d'un accroissement des investissements en haut et en bas de la chaîne pétrolière, pour assurer que le marché est correctement approvisionné», a estimé M. Tanaka. Alors que les pays producteurs ont affirmé à plusieurs reprises que la spéculation jouait un rôle important dans la hausse des prix, perturbant le marché, l'AIE a rétorqué hier que la spéculation ne devait pas être un «bouc émissaire», ajoutant qu'»accuser la spéculation est une solution de facilité». Pour autant, c'est le roi d'Arabie Saoudite, plus grand exportateur mondial, qui a répondu aux jérémiades des pays industrialisés, estimant que «les pays consommateurs doivent s'adapter aux prix et aux mécanismes du marché» pétrolier. Les pays producteurs n'ont «rien à voir avec l'actuelle flambée des cours du brut», a-t-il ajouté. Par ailleurs, un rapport d'un organisme spécialisé britannique (Oxford Business Group) a confirmé que ce sont bien les grands investissements spéculatifs qui sont la principale cause de la flambée des prix du pétrole sur les marchés mondiaux. Contrairement aux déclarations des chefs des grandes compagnies pétrolières au congrès de Madrid, le rapport souligne que ce sont bien les manoeuvres spéculatives et la recherche du profit qui sont à l'origine de l'envolée constante des prix du brut, même si les tensions géopolitiques demeurent un facteur explicatif. A New York, place forte des marchés financiers américains, la spéculation sur le pétrole représente 71% du prix affiché par le marché pétrolier américain.




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