Algérie

Pétarades Ainsi va le sous-développement



Pétarades Ainsi va le sous-développement
Il est deux heures, la ville est plongée dans une profonde torpeur. Hormis quelques âmes tourmentées et les rares noctambules impénitents, tout le monde dort profondément. Brusquement, de plus en plus assourdissant, surgit d'on ne sait où, un vacarme d'enfer qui avait la forme d'une mobylette rachitique et brinquebalante. Juché crânement sur ce destrier diabolique, un jeune loubard, visiblement «pété» aux psychotropes, hurle aussi fort que le vrombissement de son moteur qu'il pousse à son paroxysme.Il chante à tue-tête avec les pétarades hargneuses qui emplissent la nuit. Il arbore un rictus de satisfaction sadique ; de pouvoir provoquer un tel baroud le rend tout guilleret, il avait débarrassé le pot d'échappement de sa machine du silencieux réglementaire. Cela le vengeait quelque part de quelque chose et de tout le monde. Il se donne aussi l'illusion sonore qu'il chevauche la grosse cylindrée de ses rêves. Il croit rouler à un train d'enfer. En fait, il ne dépasse pas les 30 km à l'heure, mais le bruit de sa bécame pourrait passer pour celui d'un gros camion lancé à tombeau ouvert. Ici et là, des fenêtres s'illuminent, des cris de nourrissons brusquement réveillés fusent.
On devine des imprécations, des soupirs de personnes dont le sommeil avait été irrémédiablement gâché, mais lesquelles, de guerre lasse, ne s'en formalisent même plus. Notre intrépide motard déboule sur le boulevard qui longe l'unique hôpital de la ville. Le sommeil des malades est dérangé. Ils se retournent dans leur lit en marmonnant. Ils se demanderont demain, pourquoi leur sommeil n'a pas été réparateur.
Des policiers, qui faisaient leur ronde dans les parages, regardent placidement ou plutôt écoutent passer la machine infernale. Sans aucune réaction. Comble du comble, ces jeunes policiers, hâtivement formés, ne savent pas que le tapage nocturne est interdit. La fureur de la moto s'éloigne pour aller déranger le sommeil des habitants d'un autre quartier. C'est comme ça toutes les nuits et personne ne se plaint plus.
Fariza B.


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