Pêche massive et illégale de l'espadon à Béjaïa

L'arrêt de l'activité de pêche de certaines espèces est pourtant réglementé. Il doit intervenir à la fin septembre et reprendre le 1er avril. En Algérie, la période s'étale du 15 avril au 31 décembre.La pêche anarchique continue de faire des dégâts sur la côte de béjaouie. L'alerte a été donnée par les membres de l'association écologique Nemla (la fourmi) de Béjaïa. Sur leur page Facebook, les animateurs de cette association, à leur tête Smaïl Hassissène, ont exprimé leur colère en voyant exposer à la vente des bébés espadons, qui pèsent 2 kg au maximum.
Ils ont écrit que leur association "est furieuse de constater sur l'étalage des poissonniers des bébés espadons de 2 kg exposés à la vente".
Le hic, déplore-t-on, est que cela intervient "au moment où nous sommes en train, avec nos partenaires, dans le cadre du projet Cogeto, de classer en aire marine protégée la partie marine du Parc national de Gouraya.
Et ce, par l'installation de deux sentiers marins au niveau de Boulimat et des Aiguades en vue de sensibiliser les citoyens à la protection de la faune et de la flore et en prévision d'un autre projet, Pesca Tourisme, inscrit au bénéfice de six pêcheurs professionnels de la wilaya de Béjaïa. Nemla ne s'arrête pas au constat mais réclame une enquête des services concernés.
La pêche de l'espadon est réglementée : pour le pêcher, il faut qu'il ait atteint 1,20 m de la queue au museau. Quant au poids, il doit dépasser 13 kg. Mais, localement, c'est par la taille que l'on contrôle, soit 1,20 m". Bien que son rôle soit la préservation de l'activité des quelque 2 000 pêcheurs, sans compter les emplois indirects induits par cette activité, il pense que certains pêcheurs ont capturé par erreur ces poissons bébés.
La preuve, une partie d'entre eux a cessé la pêche, mais "ce n'est pas le cas de tout le monde". Ils ont continué bien qu'ils aient vu qu'il s'agissait de bébés espadons.
La solution pour Farouk Kharfallah, président de la Chambre de la pêche et de l'aquaculture, c'est de revenir aux dates de l'Iccat (Commission de gestion des pêches dans l'Atlantique) et à l'arrêt biologique pour aller à la pêche de l'espadon. L'arrêt de l'activité doit intervenir à la fin septembre ; la reprise le 1er avril. En Algérie, la période s'étale du 15 avril au 31 décembre.
C'est la raison pour laquelle il plaide pour le retour aux dates de l'Iccat pour éviter les pêches accidentelles. Il faut dire que lors de sa réunion annuelle en 2016, la Commission de gestion des pêches dans l'Atlantique a décidé d'instaurer des quotas de pêche sur l'espadon de Méditerranée. La raison : l'espèce serait en profond déclin.
Et avant d'aboutir à un tel accord, il aura fallu trente ans pour que "les 51 Etats membres de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (Cicta) se décident à limiter les prises de l'espadon de Méditerranée". Lequel, au contraire du thon, ne faisait l'objet "d'aucune mesure de restriction, alors que les indices s'accumulent sur la surexploitation de cette ressource".
En novembre 2016, la Cicta avait corrigé cette anomalie en annonçant un "taux maximum de capture de 10 500 tonnes en 2017, puis une réduction de 15% des prises tous les ans entre 2018 et 2022".
Les membres de l'Union européenne, qui représentent 75% des prises, et les pays du Maghreb devaient se partager ce quota lors de négociations prévues début 2017. La surpêche des halieutes était constatée depuis au moins deux décennies.
"Depuis 1988, les débarquements d'espadon déclarés en Méditerranée chutent, fluctuant principalement entre 12 000 et 16 000 t, notait un rapport officiel de la Cicta. Ces niveaux, relativement élevés, sont similaires à ceux de zones plus grandes, comme l'Atlantique Nord", où le stock disponible est bien plus élevé.

M. OUYOUGOUTE